Réunies grâce à un détective
Placée dans une famille d’accueil aimante, Myriam a toujours su qu’elle avait une grande soeur quelque part sans savoir ce qu’elle était devenue. Jusqu’au jour où…
« À 46 ans, j’ai enfin retrouvé ma soeur »
La première rencontre s’est faite par Internet, via Skype. Fabrice est arrivé chez moi et m’a dit qu’elle attendait mon appel. À l’écran, elle est apparue aussi bouleversée que moi. Il faut dire qu’ellemême n’avait appris mon existence que trois jours plus tôt ! Dire que moi, de mon côté, je la cherchais depuis plus de quarante ans…
J’ai toujours su que j’avais une soeur. Ma mère biologique n’a pas eu une vie facile et n’avait pas pu m’élever.
J’avais 4 ans quand j’ai été placée dans une famille d’accueil. Mais mon enfance n’a pas été malheureuse pour autant. J’ai eu beaucoup de chance car j’ai été aimée et choyée par un couple que je considérais comme des parents. Je les appelais « Tatie » et « Tonton ». Ils avaient des enfants et j’ai eu une vraie vie de famille grâce à eux. Je voyais rarement ma mère biologique, mais le contact n’a jamais été rompu. Je savais que sa vie était compliquée, sans en connaître tous les détails. J’ai entendu parler de l’existence d’une soeur un jour, au détour d’une conversation téléphonique. J’ai essayé d’en savoir plus, en vain. Apparemment le sujet était douloureux et c’est un poids qu’elle a porté toute sa vie. J’en ai parlé à ma famille d’accueil qui m’a confirmé l’existence d’une soeur, plus âgée, qui s’appellerait Yolande. J’ai dû attendre plusieurs années avant de mettre un visage sur cette soeur. J’étais déjà adulte quand j’ai récupéré une photo d’elle, bébé, que ma mère avait envoyée à ma grand-mère. Je me plaisais à voir une ressemblance dans nos regards. J’ai aussi retrouvé un extrait d’acte de naissance. J’avais, quelque part, une soeur de quinze ans de plus que moi. Cela ne m’a pas empêchée de vivre ni d’être heureuse. Je me suis mariée et j’ai fondé ma propre famille. Mais, un jour, le passé finit par vous rattraper. J’ai perdu ma grand-mère, puis ma mère. À chaque fois, ce sont des témoins du passé qui s’en vont avec leurs secrets. À un moment, c’est plus fort que tout : il faut savoir !
J’avais entamé des premières recherches discrètement du vivant de ma mère biologique, en vain.
J’ai commencé mes démarches auprès des mairies et de l’Aide sociale à l’enfance. J’ai demandé à voir le dossier de ma soeur, mais je n’ai récolté que de maigres éléments. Apparemment, ma soeur aurait été adoptée en 1961 et ne s’appellerait plus Yolande mais Marie-Hélène. Toutefois, impossible d’en savoir plus. Finalement, j’ai eu l’idée de contacter un détective privé, Fabrice Brault, après l’avoir vu dans un reportage. Il a accepté de s’occuper de mon dossier. Fabrice est très pédagogue et m’a expliqué toutes ses démarches. La principale difficulté, dans des affaires comme la mienne, est que les services sociaux modifiaient encore, à cette époque, le lieu de naissance des enfants adoptés pour empêcher les familles biologiques de les trouver. Cependant, je savais que ma mère était restée quelque temps à la maison maternelle de Saint-Paul, dans la plus grande pouponnière de Paris. C’était parfois le lieu de naissance qui était indiqué. Et j’ai eu de la chance : Fabrice a retrouvé sa trace et sa nouvelle identité, grâce à son prénom, dans les tables décennales qui répertorient les naissances dans le 14e arrondissement. Avec ces informations, il a obtenu son acte de naissance, un document qui comporte des informations précieuses comme des naissances ou des mariages. En l’occurrence, Marie-Hélène avait été mariée et avait divorcé trois fois. Le dernier mariage avait été célébré dans un village du Loiret où il s’est rendu. Il a retrouvé un témoin du mariage. Ce vieil ami savait que Marie-Hélène était une enfant adoptée, ce qui était déjà une bonne nouvelle, elle aurait pu l’ignorer. Il n’était plus en contact avec ma soeur car elle était partie vivre au Canada. Cependant, Fabrice a trouvé le moyen de la joindre…
Pendant toute son enquête, Fabrice m’avait bien mise en garde : je ne pourrais contacter ma soeur que si elle l’y autorisait.
Même s’il retrouvait Marie-Hélène, nous ne serions pas forcément réunies. La loi oblige les enquêteurs à recueillir le consentement des
Par la même occasion, mes fils ont su qu’ils avaient des cousins !
intéressés avant de révéler leurs coordonnées. C’est bien normal et j’étais prête à entendre un refus. À aucun moment, je n’ai voulu perturber sa vie. Si l’on m’avait dit qu’elle ne souhaitait pas bousculer son existence, je l’aurais compris. Je crois qu’une partie de moi avait surtout besoin d’être rassurée. Ayant grandi dans une famille d’accueil qui m’avait choyée, je voulais surtout vérifier qu’elle avait eu une belle vie. Et je dois dire que j’ai été comblée. Un jour, Fabrice est arrivé chez moi les bras chargés de photos. Oui, apparemment, Marie-Hélène avait été heureuse elle aussi : elle a eu quatre enfants et était même déjà grandmère ! Par la même occasion, mes fils ont soudain appris qu’ils avaient des cousins. « Si je vous donne ces photos, c’est que votre soeur veut vous connaître », a poursuivi Fabrice. C’est alors qu’il m’a tendu ses coordonnées en m’annonçant que Marie-Hélène attendait mon appel. J’ai pleuré et j’ai appelé. À 46 ans, j’ai enfin retrouvé ma soeur. J’ai découvert sur mon ordinateur le visage de celle que j’avais tant de fois imaginée. Je n’oublierai jamais ses premiers mots. Très vite, elle m’a dit : « Ma maison est ta maison ! » Elle ne mentait pas. Dès qu’elle a pu, elle est venue me voir à Paris et, à mon tour, j’ai emmené ma famille la voir au Québec. Pour la première fois, nous sommes partis en vacances chez ma soeur. Mais pas la dernière : nous avons tant de choses à nous dire !