Maxi

TÉMOIGNAGE « Ces chiens maltraités ou abandonnés sont ma famille »

Ancienne responsabl­e à la SPA, Céline vient de créer sa propre associatio­n pour protéger les animaux. Depuis qu’elle est enfant, ils ont transformé sa vie. Toujours en mieux…

- Céline * N’abandonnez jamais, de Céline Ravenet, Éd. L’Archipel

Entre les animaux à la maison et ceux de mon refuge, j’ai arrêté de compter ! En ce moment, je n’en ai « que » six chez moi, auxquels s’ajoutent les chiens maltraités que j’accueille parfois avant de leur trouver une famille. Depuis décembre, j’ai dû faire adopter une centaine de bêtes, et ce n’est pas fini. Rien que la semaine prochaine, j’attends 38 chiens de la Guadeloupe et de la Réunion, car les îles n’ont pas toujours les structures suffisante­s pour s’occuper de ces bêtes. Moi, je les prends volontiers et je sais que je vais leur trouver un foyer aimant. Et j’essaie juste de leur donner autant que j’ai reçu…

Enfant, j’ai très tôt trouvé de l’apaisement

auprès des animaux. J’ai grandi au milieu de tensions parentales dues à l’abus d’alcool. Très vite, lors de mes escapades chez Germaine et Marcel, nos voisins, j’ai pris conscience que mes amis à poils ou à plumes avaient l’étrange pouvoir de me soustraire du quotidien. Ils avaient des poules et des lapins, que j’aimais caresser et serrer contre moi. Nous avions aussi Milou, à la maison, un chien qui avait le talent d’un clown pour nous faire rire. Je devais avoir 5 ans quand mon père m’a offert une petite chèvre qui a, elle aussi, embelli ma vie. C’était viscéral : tous les animaux exerçaient sur moi un attrait irrésistib­le et m’apportaien­t un réconfort que, par ailleurs, je ne parvenais pas à trouver. Je pouvais tout leur dire, eux savaient me consoler. J’ai d’ailleurs passé mon adolescenc­e focalisée sur la détresse animale. J’étais abonnée à 30 millions d’amis et je rêvais – déjà – de créer des associatio­ns pour aider les animaux. Combien de fois me suis-je présentée en cours accompagné­e d’un invité à quatre pattes? Je confiais aussi aux pompiers les chiens perdus qui se laissaient approcher. Je savais qu’ils les déposaient dans un refuge, à Hermeray, où ma mère a accepté de m’accompagne­r. J’ai commencé à y travailler comme bénévole. Des adoptions m’étaient déjà confiées, malgré mon jeune âge. Mon amour des animaux m’a ainsi permis d’aller vers les autres, de m’ouvrir, de devenir moimême. Très vite, il ne me serait pas venu à l’idée de passer les vacances scolaires ailleurs ! J’étais loin de me douter de la future carrière que je mènerais dans ce refuge. À 18 ans, j’étais titulaire d’un diplôme de secrétaria­t dont je ne savais trop que faire. J’avais trouvé un travail, sans rapport avec les animaux, et je continuais à travailler à la SPA d’Hermeray comme bénévole le week-end. C’est Gérard, mon mari, qui m’a soufflé l’idée de solliciter un « vrai » emploi là-bas. La responsabl­e m’a donné trois mois pour faire mes preuves et le nombre d’adoptions a soudain monté en flèche! Je n’ai pas de mérite: mon intuition m’a rarement trompée. J’ai toujours guidé les adoptants en fonction de leur mode de vie, m’appliquant, depuis l’enfance, à trouver le chien le mieux adapté à chacun. Si le courant passait mal entre le maître et l’animal, je le ressentais tout de suite. C’était comme un étau qui m’enserrait le plexus. Au fil des ans, j’ai gravi les échelons et pris davantage de responsabi­lités. Dans le milieu de la protection animale, mon refuge, pourtant perdu dans les Yvelines, a gagné une petite notoriété. C’est ainsi que j’ai vu débarquer un jour Emmanuel et Brigitte Macron, en quête d’un chien pour les accompagne­r à l’Élysée. Pour eux, j’ai tout de suite pensé à Nemo, un adorable labrador croisé de griffon. Je ne me

Mon intuition me guide pour trouver l’animal le mieux adapté à chacun !

suis pas trompée, car le courant est tout de suite passé et il les a immédiatem­ent séduits ! Depuis trente ans, j’ai contribué au bonheur

de milliers d’animaux et de foyers. Rien qu’au refuge d’Hermeray, nous affichions 2400 adoptions en moyenne chaque année. J’ai même failli y laisser ma santé. À la fin de ma carrière là-bas, je ne m’entendais plus avec ma direction. J’ai fini par quitter la SPA, le coeur brisé. J’ai pris le temps d’écrire un livre*. Mon mari, toujours de bon conseil, m’a encouragée à monter ma propre associatio­n, « Erka, jamais sans Toit ». D’anciens collègues m’ont suivie et je continue de façon plus indépendan­te. D’anciens adoptants me solliciten­t toujours également. Même si je ne gagne pas encore d’argent ici, j’ai l’idée d’une société de services que j’aimerais monter à côté, toujours dans le domaine des animaux. Avec toutes ces activités, je n’ai jamais eu d’enfant, sans regret. Je crois que je n’ai tout simplement pas eu le temps! J’étais accaparée par les animaux et il était inenvisage­able pour moi de m’absenter plus de cinq jours. Ces chiens maltraités ou abandonnés sont ma famille, c’est ainsi. Et si c’était à refaire, je ne changerais rien car les animaux m’ont comblée et continuent de m’accompagne­r et d’embellir ma vie.

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