« Je suis devenue coach rangement »
En panne dans sa carrière professionnelle, Véronique s’est réinventée en coach rangement. Un nouveau métier passionnant qu’elle exerce à son compte et qui satisfait pleinement son altruisme et son engagement écologique.
Conseillère en assurance pendant plus de dix, j’ai eu un jour le sentiment de me trouver dans une impasse. Mon métier n’avait plus de sens pour moi. À l’aube de la quarantaine, j’ai décidé de quitter mon travail pour ne pas me retrouver à la même place vingt ans plus tard. Mon mari m’a beaucoup soutenu lors de ce saut dans l’inconnu. Même si à ce moment-là nous avions les moyens financiers pour le faire, c’était pour moi une décision lourde, car ce n’était ni dans mon éducation ni dans ma nature de quitter un job stable sans savoir précisément ce que je voulais faire.
Le déclic est venu en regardant un reportage sur l’une des premières consultantes rangement en France. Après des recherches, j’ai découvert que la Japonaise Marie Kondo, auteure du best-seller La Magie du rangement, proposait des formations aux ÉtatsUnis. J’ai décidé de suivre son stage, car à l’époque, en 2016, c’était la seule formation reconnue. Le métier étant nouveau, il me semblait important d’obtenir ce label pour asseoir ma crédibilité. Mon mari m’a offert ses miles, cumulés lors de ses déplacements professionnels, pour financer mon billet pour San Francisco. Le stage de 3 jours m’a coûté 1500 dollars, mais ça valait le coup. Outre la visibilité et le réseau dont j’ai bénéficié, il m’a permis de rencontrer des personnes avec la même envie et les mêmes questionnements que moi. Mais j’ai surtout appris comment accompagner un client dans son rangement sans le brusquer, sans juger, en l’aidant à prendre ses propres décisions. Il ne faut jamais oublier qu’on aide les personnes à ranger leur maison avec leur propre sensibilité.
Même si mon travail est nouveau et encore peu connu, je n’ai jamais douté du bien-fondé de mon choix. En revanche, j’avais un peu peur de me lancer dans l’entreprenariat. C’est pour cela que j’ai choisi d’intégrer la SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif) Pau-Pyrénées, qui m’a accompagnée les deux premières années au niveau logistique, comptable, etc. Sans compter l’émulation collective, car être à son compte rime souvent avec solitude. J’ai ensuite fait le choix de la micro-entreprise pour développer mes activités. Être à son compte nécessite de jongler avec plusieurs casquettes : en plus de mon travail de consultante, je fais l’administratif, la prospection, la communication… Il faut également accepter les mois avec et les mois sans. Bien qu’installée dans la région de Pau, je me déplace à travers la France pour mon travail, sans surcoût : pour tout le monde, c’est 350 euros la séance d’environ 5 heures. Une séance permet généralement de s’occuper d’une pièce ou d’une catégorie (vêtements, papiers…). C’est assez intense et fatigant, un peu comme un cours de sport : on en sort épuisé mais heureux de ce que l’on a accompli !
J’ai créé ma propre méthode cette année*. Je ne suis donc plus consultante Marie Kondo, dont la technique me semble peu adaptée sur certains points à la société européenne.
Par exemple, au Japon, il n’est pas obligatoire de garder des papiers, Marie Kondo conseille de tout jeter, ce qui est impossible en France où nous avons des obligations légales de garder certains documents ! La notion de joie que procurent les objets, leitmotiv de Marie Kondo, est également difficilement compréhensible ici ; je l’ai adaptée en demandant aux personnes que j’accompagne ce qu’ils ressentent à la vue de telle ou telle chose. Je voulais également inclure les notions d’écologie et de développement durable qui sont fondamentales pour moi. Lorsqu’on se sépare d’objets, on doit se poser des questions avant d’en réintroduire dans son intérieur ; privilégier la qualité à la quantité. J’aide mes clients à réfléchir à leur manière de consommer et, au final, à réaliser des économies.
L’écoute est primordiale dans mon métier. La notion d’utilité n’est pas la seule à considérer face aux objets qui nous entourent, il faut évaluer leur charge émotionnelle. Le meilleur exemple, c’est la robe de mariée. On peut la conserver si elle est associée à de bons souvenirs, mais après un divorce, par exemple, elle peut raviver des choses douloureuses et je conseille alors de s’en séparer. Souvent, mes clients m’appellent car ils procrastinent, n’ont pas l’énergie suffisante pour se lancer, ne savent pas par quel bout
En plus de leur utilité, il faut évaluer la charge émotionnelle des objets
commencer ou ont besoin d’encouragement dans leur démarche. Mon travail est de les accompagner.
Pendant le confinement, j’ai lancé des consultations à distance. Moins chères (100 euros les 5 séances d’environ 30 minutes ; 150 euros pour 10), elles m’ont permis de toucher une nouvelle clientèle. Mon premier client virtuel était un monsieur qui vivait avec ses cartons depuis deux ans, suite à un déménagement. Il voulait profiter du confinement pour tout ranger et je l’ai accompagné avec des rendez-vous réguliers. Récemment, j’ai aidé une petite fille à ranger et organiser sa chambre. Mon objectif était aussi de lui montrer que ranger peut être fun. Mon nouveau challenge est de développer mon activité en entreprise. Le bureau, c’est un peu comme notre deuxième maison et il y a là aussi du tri à faire. Je suis en train de monter une offre pour aider les entreprises à optimiser leurs espaces de travail, mais aussi aider leurs salariés à s’installer en télétravail. Véronique
Pour en savoir plus : ledicia.fr. * Le Cercle vertueux du tri, de Véronique Lebon, éd. Hachette.