Le tropisme
Le fait est naturel et le réflexe automatique. Réagir, prendre des décisions simples dictées par l’urgence tient de l’inné.
La logique vient, après réflexion. En ces temps de marasme pandémique, décider n’est pas simple. Les entreprises sont soutenues par l’État pour amortir le choc des mesures sanitaires du gouvernement ; il faut franchir le cap d’une économie pratiquement au point mort. Nous avons tous été élevés dans le culte du travail, qui finance la dépense publique par la grâce des impôts et taxes.
Ce qui nous arrive est tout à la fois inédit et historique; nous bénéficions d’une forme d’État providence, Covid-19 oblige, et les entreprises sont payées pour qu’elles cessent leur activité ! Les théories Keynésiennes prouveraient-elles leur validité ? Avec ça, il faut idéalement un peu de protectionnisme, pour protéger nos atouts industriels, couplé avec beaucoup de services à l’export. Ce serait le meilleur moyen de développement pour nos entreprises. Mais voilà le coronavirus, montre que si le protectionnisme est une bonne chose pour aider les entreprises françaises à relocaliser leur activité industrielle sur le territoire, il enclave simultanément nos capacités de commercialisation à l’international. Cette relation de cause à effet plombe la dette nationale, laquelle n’est plus un sujet tabou, puisque tous les pays s’endettent… et que personne ne conteste la validité de ces dépenses.
D’aucuns s’interrogent d’ailleurs sur l’intérêt qu’il y aurait à fermer les robinets d’argent frais, puisque la dette n’est plus aussi horrible qu’on le pensait, le jour d’avant la pandémie… Si tous les chefs d’entreprise ont été formatés pour s’endetter à bon escient, changement de doctrine en matière de “phynance” et nécessité politique, tendent à nous imposer l’idée selon laquelle une dette colossale ne serait plus très grave, elle pourrait même s’avérer bienfaitrice… si et seulement si nous arrivons à la rembourser. Et pour ce faire, il faut s’abstenir du moindre défaut de paiement, car un impayé dans l’échéancier reste encore, pour l’instant, dans notre état d’esprit économique, une situation à éviter impérativement. Est-ce une pensée réactionnaire ? L’avenir nous le dira. L’objectif reste donc de créer un échéancier à long voire très long terme, car plus il est étalé dans le temps, moins le montant des échéances sera important… Une annulation de la dette est-elle possible ? Sous prétexte d’une théorie monétaire moderne de sérieux économistes proposent cette solution parce qu’ils ont remarqué un “vide” dans le traité de Maastricht. Ce dernier n’interdit pas clairement la possibilité d’annuler une dette détenue par la Banque Centrale Européenne des États membres de l’Union Européenne.
Bref, si l’annulation semble impossible, les effets sanitaires de ce virus s’apparentent à une rééducation de nos méthodologies financières et économiques. S’endetter puis négocier un report du remboursement et commencer à rembourser au long cours, à taux infinitésimal… La génération suivante empruntera à son tour pour assumer cet héritage et ce droit à l’interdiction du défaut de paiement... Cette cavalerie financière va-telle devenir le modèle d’une vie économique sereine? Le tropisme crée le réflexe naturel de ne plus vouloir rembourser.