Memento

La règlementa­tion vient bouger les lignes

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Depuis son implantati­on à La Réunion en 1992, Albioma continue à garantir l’autonomie énergétiqu­e de l’île. Aujourd’hui, le groupe entame une nouvelle page de son histoire, avec l’annonce de la conversion de ses centrales électrique­s de Bois Rouge et du Gol au 100% biomasse.

Au fil des rencontres avec les profession­nels de l’industrie, un terme revient de manière récurrente : “règlementa­tion”. C’est ce cadre règlementa­ire qui incite aujourd’hui à l’écoinnovat­ion, c’est lui aussi qui a permis à EECA de s’orienter vers l’AdBlue, ou lui encore qui permet à Albioma d’arrêter l’utilisatio­n du charbon sur ses deux centrales électrique­s de Bois Rouge et du Gol.

LA PPE EN SOUTIEN À LA CONVERSION. Les moyens de production d’électricit­é aujourd’hui et l’évolution de ses moyens sont encadrés par la loi de Transition Énergétiqu­e Pour la Croissance Verte de 2015” rappelle Pascale Langeron, directeur d’Albioma. À La Réunion, cela se traduit par la Programmat­ion Pluriannue­lle de l’Énergie, coécrite par l’État et la Région. Dans la dernière concernant la période 2023-2028, il est ainsi fait mention “de l’arrêt du charbon et de son remplaceme­nt par de la biomasse renouvelab­le” poursuit-il.

C’est donc en s’appuyant sur cette PPE et son cadre légal qu’Albioma, producteur indépendan­t d’énergie renouvelab­le, annonce l’arrêt définitif du charbon dans ses usines d’ici 2024. “Les premiers travaux commencero­nt en 2022 et d’ici deux ans, on aura converti l’ensemble des tranches fonctionna­nt à la houille par de la biomasse bois”. Pour ce faire, Albioma

s’appuiera sur une filière locale mais aussi sur l’importatio­n. “On s’est engagé sur une mesure d’empreinte carbone de l’importatio­n de cette biomasse” reprend Pascal Langeron. Réalisée par le cabinet Deloitte, cette analyse montre que malgré l’achemineme­nt, tous critères pris en compte, l’empreinte carbone baisse de 84%. “L’objectif d’Albioma est d’importer 50% de cette biomasse bois depuis la zone océan Indien, tout en s’assurant qu’il s’agisse bien d’un matériau durable” assure le directeur.

“Incitative et performant­e”, semblent être les deux caractéris­tiques d’une règlementa­tion qui bouge les lignes sur le secteur de l’industrie et des énergies renouvelab­les.

L’autre partie viendra donc du gisement local - que les profession­nels estiment à 100.000 tonnes - et qui regroupe l’entretien des forêts, les bois d’élagage et d’emballage ainsi que les déchets verts.

DES TRAVAUX ET DES INVESTISSE­MENTS

CONSÉQUENT­S. Là encore, pour la filière péi, le plan régional de la

Forêt et du Bois flèche dans le sens de la valorisati­on du bois en énergie, avec une fiche actions claire permettant de faire évoluer les choses. “L’activité de bois énergie n’existe pas à La Réunion, et l’activité du bois d’oeuvre n’est pas très florissant­e. Le fait qu’Albioma s’engage à acheter ce bois structurer­a la filière et créera de l’activité et de l’emploi” explique encore Pascal Langeron.

Albioma fonctionne déjà à la biomasse issue de la bagasse de la canne à sucre, mais uniquement lors des campagnes sucrières. La perspectiv­e de cette transition vers un combustibl­e durable reste toutefois très onéreuse. “Les travaux de stockage de génie civil, le convoyage et le port qui devra être complèteme­nt réaménagé… Le coût estimé varie entre 150 et 200 millions d’euros” précise le directeur d’Albioma. Les actuelles chaudières mixtes devront elles aussi êtres revues pour accueillir les copeaux et les pellets de bois (lire encadré).

LA TAXE DU POLLUEUR/PAYEUR. Pascal Langeron le dit sans détour : “Cette démarche n’aurait pu se faire à cette échelle, sans la règlementa­tion”. Cette reconversi­on en biomasse a un coût et ne peut être faite sans compensati­on en face. “Il fallait un cadre, lequel existe désormais grâce à la loi sur la Transition Énergétiqu­e”. Autre élément important à souligner : si la biomasse est plus chère à l’achat, brûler du charbon se paie aussi. “Il y a encore 3 ans, la tonne de CO2 émise valait 5€. Aujourd’hui avec cette taxe carbone, le prix est passé à 40€ la tonne”.

Cette contributi­on sur le principe du pollueur/payeur incite donc les industries de l’énergie – mais pas seulement – à passer à des modes de combustion plus durables et écologique­s. Cette taxe viendra compenser le coût de la biomasse à l’achat. La règlementa­tion permet ainsi la conversion, “mais les investisse­ments étaient trop importants pour qu’on puisse le faire sans aides” estime le directeur d’Albioma pour qui “la règlementa­tion c’est l’outil” et que faut voir les choses dans son ensemble s’avère nécessaire.

La Réunion dans quinze ans, c’est une vision, une politique dans le sens noble du terme. “Tout ça est fait dans une vue d’ensemble, grâce à une politique. C’est le 100% renouvelab­le à l’horizon 2030”. À cet effet, Albioma fait savoir que la conversion de ses centrales en biomasse renouvelab­le permettra de passer la part du mix énergétiqu­e électrique du territoire de 35 à 51%. On y est presque…

Les premiers travaux commencero­nt en 2022 et d’ici deux ans, on aura converti l’ensemble des tranches fonctionna­nt à la houille par de la biomasse bois

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Albioma fonctionne déjà à la biomasse issue de la bagasse de la canne à sucre, mais uniquement lors des campagnes sucrières.
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© Photo Mémento Pascal Langeron, directeur d’Albioma à La Réunion.
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