Écologie et rentabilité, la difficile équation du secteur automobile
En 2020, le président de la République, Emmanuel Macron annonçait un plan de relance de 8 milliards d’euros en faveur du secteur automobile. Un an plus tard et face aux contraintes environnementales auxquelles sont confrontés les constructeurs, l’avenir paraît toujours aussi compliqué pour la filière qui réclame 17,5 nouveaux milliards pour l’aider dans cette transition.
Cela n’avait rien d’une surprise et pourtant le choc a eu lieu. Bruxelles a dévoilé en juillet dernier sa feuille de route pour la réduction des émissions de CO en matière de transports. 2 Entre autres mesures fortes : l’arrêt des ventes de véhicules neufs à moteurs diesel et essence à partir de 2035, la taxation du kérosène à partir de 2023 pour l’aérien et la réforme du marché du carbone au risque de voir certains prix augmenter.
UNE TRANSFORMATION NÉCESSAIRE. Ces mesures doivent contribuer à atteindre les objectifs climatiques de l’Union Européenne, mais “elles bénéficieront aux citoyens en réduisant les dépenses énergétiques et en améliorant la qualité de l’air” a expliqué la Commission. Pour autant, le secteur automobile se montre très inquiet quant à l’application de ces nouvelles mesures. En amont des annonces de Bruxelles, le président de la République, Emmanuel Macron a tenu à réunir les constructeurs, équipementiers et partenaires sociaux afin de discuter du plan détaillé mais surtout de l’accompagnement renforcé de l’État à l’ensemble de la filière.
Pour l’Élysée, “il s’agit d’une transformation nécessaire que le Président est prêt à soutenir” a fait savoir le gouvernement. Mais pour la Plateforme Filière Automobile (PFA), “cette accélération va avoir des conséquences dévastatrices” pour le secteur a prévenu son président, Luc Chatel, dans une interview. PFA chiffre d’ailleurs le besoin à 17,5 milliards d’euros sur quatre ans. “Il y a deux scénarios : celui du déclin, avec le risque de voir disparaître 100.000 emplois d’ici à 2035, mais aussi celui du rebond, qui implique un soutien fort de l’État” indiquet-il encore.
SEULEMENT 33.000 BORNES ÉLECTRIQUES. Le secteur, qui a travaillé avec le cabinet McKinsey, juge lui, qu’il faudra 9 milliards d’euros pour capter et re-localiser en France les technologies nécessaires: batteries électriques (6,6 Mds), hydrogène (1,2 Mds), électronique de puissance (900 millions) et connectivité. Il rappelle que la France ne compte que deux “gigafactories” pour les batteries quand il en faudrait cinq fois plus à l’horizon 2030.
La PFA estime également que l’impact économique de ces investissements se traduirait par la création de plus de 35.000 emplois et 7,5 milliards d’euros de valeur ajoutée. Quelque 8,5 milliards d’euros seraient en outre nécessaires pour accélérer le déploiement de bornes de recharge électrique, sur lequel l’Hexagone est aujourd’hui en retard : environ 33.000 installées à ce jour, quand 100.000 étaient prévues à la fin 2021, selon l’Association pour le développement de la mobilité électrique (Avere).
DES AMBITIONS SANS STRATÉGIES ? De son côté, l’ONG Transport et Environnement estime que“les plans industriels des constructeurs sont inadaptés aux objectifs de réduction de C02 avec un manque d’investissement criant”. Et de poursuivre : “Même ceux qui ont des ambitions sont dépourvus de stratégie pour les réaliser”.
La proposition de la Commission sera discutée pendant plus d’un an par le Parlement européen et les États membres, ce qui pourrait conduire à adoucir les propositions les plus radicales. La voiture, premier mode de déplacement des Européens, représente environ 15% des émissions de CO2, un des premiers gaz responsables du réchauffement climatique.
Cette accélération des mesures écologiques va avoir des conséquences dévastatrices pour le secteur automobile