Et si l’administrateur judiciaire était aussi un partenaire ?
Dans l’imaginaire collectif, le tribunal et le juge, de par la fonction et l’institution, récriminent, sentencient. Or, le tribunal de commerce préserve l’activité économique du territoire ainsi que l’emploi ; il est là pour aider les entreprises en diffi
À en croire les chiffres, la situation est inédite : le nombre de défaillances d’entreprises en France a encore nettement reculé en 2021, en France (DOM-TOM compris). C’est ce que montre une étude de la société Altares, spécialiste de la collecte d’informations sur les entreprises. Ainsi, il y en aurait eu l’an dernier, seulement 28.871, soit 12% de moins qu’en 2020 et 35% de moins qu’avant le COVID.
Prévenir plutôt que guérir. Mais ces chiffres cachent une autre réalité, celle de la pandémie et d’un endettement en hausse des entreprises qui devront bientôt rembourser les PGE (Prêts Garantis par l’État) ou les cotisations non payées à l’Urssaf. “Ces aides de l’État n’ont fait que décaler, différer, masquer un certain nombre de difficultés” estime Sylvie Seignobosc, magistrate et présidente du Tribunal Mixte de Commerce de Saint-Pierre. Et si partout ailleurs on
constate une baisse des procédures, ce n’est pas le cas dans le sud de l’île.
Ainsi, sur le seul premier semestre 2021, le tribunal a enregistré 178 procédures contre 200 sur l’ensemble des douze mois de 2020.
“Ce chiffre s’explique par la prévention que réalisent les administrateurs judiciaires depuis 2019” reprend la magistrate. En effet, à SaintPierre, les équipes n’attendent pas que les chefs d’entreprises daignent venir les voir, mais anticipent les difficultés en scrutant les indicateurs, les bilans ou les éventuelles condamnations.
De la pédagogie. La prévention est d’autant plus importante qu’elle permet d’intervenir suffisamment tôt pour pouvoir établir un redressement judiciaire et un plan de continuation. Pour Sylvie Seignobosc, il est primordial de communiquer auprès des TPE et PME de l’île afin de faire disparaître cette frilosité, ce tabou
même de saisir le tribunal de commerce. “Pour rappel, le rôle de ce dernier est de préserver l’activité économique du territoire et l’emploi. Il est là
pour soutenir les entreprises en difficulté” insiste la présidente du tribunal de commerce.
Il existe un certain nombre de dispositifs pour soutenir les sociétés mises à mal, “encore
faut-il s’y prendre à temps” assène Sylvie Seignobosc. La pédagogie se veut importante également, pour comprendre les étapes et les différentes situations, la cessation de paiement, le redressement ou la liquidation. Des termes qui effraient mais qui ne relèvent pas de la même situation. “L’un permet à une entreprise de retrouver un nouveau souffle [le redressement], quand l’autre signe la fin de l’activité [la liquidation]” explique-t-elle.
Sylvie Seignobosc, comme les autres juges délégués “à la prévention
des entreprises en difficulté” (lire encadré) multiplient leurs interventions auprès des chambres consulaires, des organisations patronales ainsi que des associations professionnelles afin de dédramatiser les situations et montrer que des solutions existent, “que rien n’est figé et surtout, démontrer que cela
fonctionne”. Le Tribunal Mixte de Commerce a une fonction de protection, qui n’exclut pas la volonté d’assainir l’ordre économique. Parce que le risque avec les liquidations judiciaires, c’est celui de l’effet domino. En sauvant une entreprise, le TMC permet de pérenniser celles qui ont des créances avec ces dernières, et maintient l’équilibre économique du territoire. Il est à noter également que la première consultation avec un administrateur est gratuite.