La semaine de 4 jours testée et validée
Depuis mai 2022, le restaurant L’atelier de Ben à Saint-Denis a choisi de passer à la semaine de 4 jours. Dans un secteur en mal de recrutement et de fidélisation des équipes, cette mini-révolution permet d’offrir une meilleure qualité de vie à tous. Les clients y sont aussi gagnants. Retour sur expérience avec le chef Benoît Vantaux.
La restauration est l’un des secteurs d’activité à avoir été le plus affecté par la crise du Covid. Adaptation pour mettre en place la vente à emporter, réorganisation des équipes, résilience, tout cela s’est fait en un temps record dans un contexte compliqué. L’atelier de Ben, lui, a mis en place une petite structure pour proposer des plats à emporter. “Aujourd’hui cette enseigne représente 1/3 de notre chiffre d’affaires”, souligne Benoît Vantaux. Depuis 17 ans, le chef et ses équipes revisitent des classiques de la gastronomie française en s’inspirant des cuisines du monde et des produits de La Réunion. “Déjà fermé le samedi matin, nous avons décidé de fermer aussi le soir”, explique le gérant. Le personnel est toujours employé aux 39 heures par semaine. Au lieu de faire 7 heures, les journées en font 10.
Qu’est-ce qui a poussé Benoît Vantaux à franchir le pas ? Une remise en question du travail et sa (trop grande) place dans nos vies, et surtout, le fait d’avoir goûté à la vie de famille pendant le week-end lors des périodes de confinement. Jusqu’à récemment, il n’avait jamais eu de samedi soir pour lui. “Cela voulait dire beaucoup de sacrifices, d’énergie déployée, au détriment de la vie de famille”, témoigne celui qui comptabilise 35 ans de métier en tant que cuisinier puis chef et gérant d’entreprise.
Il est trop tôt pour faire un bilan mais le pari semble gagnant. “Les salariés ne veulent pas revenir en arrière”, fait savoir Benoît Vantaux. Et lui non plus. Ils n’hésitent pas à choisir une meilleure qualité de vie au fait de gagner plus d’argent. En effet, bien que le restaurant ait gagné en productivité, il a réduit ses bénéfices. Pas sa qualité, au contraire. La recherche d’amélioration est constante et s’exprime à tous les niveaux : de la barquette gastronomique à la politique sociale. “Investir l’aspect humain, c’est notre stratégie pour nous différencier de la production industrielle”, souligne le chef. L’innovation se développe sur le volet RSE, la réduction des coûts énergétiques, une politique anti-gaspillage drastique. Les salaires proposés sont attirants.
Attirer des talents.
Tout cela en plus de savoir que l’on peut avoir ses week-ends, c’est la combinaison gagnante pour attirer des talents. “Le turn-over est normal dans le secteur de la restauration gastronomique”, explique Benoît Vantaux. D’ailleurs, La Réunion se situe à un bon niveau. L’île et L’atelier de Ben attirent des jeunes doués et bien formés, passés par les meilleures tables en Métropole puis qui continuent leur chemin. Mais réussir à trouver des compétences reste un enjeu de durabilité important. C’est au moment même où Benoît Vantaux rencontrait des difficultés à recruter qu’il a mis en place la semaine de 4 jours. Allergique au prosélytisme, le chef ne veut surtout pas se poser en donneur de leçons. “J’essaie d’être lucide, conquérant et avant-gardiste”, dit celui qui n’hésite pas à retrousser ses manches les soirs de rush, et à se rendre au Sirha1 sur ses propres deniers. L’atelier de Ben avec ses 10 salariés et 4 apprentis soutient la filière, participe à la vie économique locale, communique et veut continuer à faire rayonner La Réunion et ses richesses. Benoît Vantaux formule juste un besoin, celui d’être davantage reconnu par les politiques dans son travail et sa qualité de chef de d’entreprise.
1/ Le Salon International de la Restauration, de l’Hôtellerie et de l’Alimentation, à Lyon. Le prochain aura lieu du 23 au 27 janvier 2025.
Investir l’aspect humain, c’est notre stratégie pour nous différencier de la production industrielle