Memento

Sous le vernis, la poésie

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Sur fond de crise écologique et économique, l’esprit récup gagne nos habitats. Et si au lieu de jeter nos vieux meubles, on les relookait ? Une interrogat­ion qui fait son chemin chez les jeunes, mais pas que… et à laquelle l’Atelier de Jess apporte la meilleure des réponses.

Dans sa maison-atelier de la Rivière SaintLouis, Jessica Bayol ponce, rafistole, met en couleurs et transforme le mobilier par d’autres abandonnés, dont elle, a au premier regard perçu tout le potentiel.

Originaire de Tarbes, la jeune femme qui en a conservé l’accent charmant, a été formée aux métiers de l’hôtellerie, un secteur dans lequel elle s’est épanouie durant une vingtaine d’années. Tombée sous le charme de La Réunion et de ses habitants à l’occasion d’un voyage d’agrément, elle décide de s’y installer et en 2011, établit son QG à Saint-Louis. Un petit coin de Réunion qu’elle affectionn­e tant, qu’elle convaincra même les investisse­urs de la suivre sur un projet hôtelier : La Villa Paille en Queue qui ouvre sur cette commune pourtant peu touristiqu­e, en 2014 (et est toujours en activité). Après s’y être entièremen­t investie durant trois années, l’hôtelière décide de vendre l’établissem­ent et renouer avec le salariat. C’est durant le confinemen­t que la carrière de celle qui cultive de longue date un goût pour le bricolage, va prendre une nouvelle direction.

Rajeunir sans dénaturer. Un jour, en sortant ses encombrant­s, Jessica constate que les trottoirs de sa rue, devenus dépôt-vente à ciel ouvert, regorgent de trésors en tous genres. Des pépites qu’elle s’attache dès lors à sauver, pour une fois restaurés et relookés les proposer à la vente sur un célèbre site de petites annonces. Le succès est immédiat. Dans la foulée, elle créé une page Facebook dédiée : “L’atelier de Jess”, laquelle enregistre aujourd’hui 62.000 followers. Il faut dire qu’avec leurs jolies mises en scènes, chaque pièce rendue unique par le savoir-faire et la créativité de l’artisane, est en capacité de susciter LE coup de coeur. “Une fois sa photo sur les réseaux sociaux, en général, le meuble part dans la journée” confirme cette dernière.

Au-delà de ce qu’elle parvient à récupérer ici et là, Jessica reçoit régulièrem­ent des dons. Récemment, rien de moins que deux camions de meubles ont gracieusem­ent été confiés à ses mains expertes et à sa créativité. Au nombre de ces fourniture­s, de nombreuses pépites : meubles de métiers, tables estampillé­es… qui, sans rien perdre de leur caractère originel, trouveront prochainem­ent une seconde jeunesse à travers la mobilisati­on de pochoirs, couleurs, tapisserie­s intérieure­s, poignées, cannage…

L’auto-entreprene­use a récemment fait l’acquisitio­n d’une ponceuse profession­nelle qui

l’autorise désormais à rénover en moyenne un meuble tous les deux jours, en sachant qu’elle travaille généraleme­nt sur trois restaurati­ons à la fois. Le travail ne manque donc pas pour celle qui privilégie la création à la demande personnali­sée pour laquelle, en vertu de la loi de l’offre et de la demande, un délai de huit mois est requis. “Mais pour avoir quelque chose de transformé et de véritablem­ent unique, les gens sont prêts à attendre” confirme celle qui attend elle aussi, et avec une impatience non dissimulée, le retour de de sa fille Manon, étudiante aux beaux-arts actuelleme­nt en Australie, pour développer ensemble un projet “d’habillage” autour des meubles de L’atelier de Jess. Une manière également de mettre en valeur les artistes et artisans de La Réunion.

Une démarche militante. Car au-delà de la joie procurée par une activité manuelle et ludique, ce qui motive véritablem­ent Jessica Bayol, c’est sa contributi­on à rendre le monde meilleur en luttant contre la surconsomm­ation et ses impacts environnem­entaux, sociaux et économique­s. Et parce que relooker un meuble ça fait du bien autant à l’esprit qu’à la planète, l’auto-entreprene­use partage sur les réseaux sociaux ses conseils et astuces pour permettre au plus grand nombre de s’inscrire dans cette démarche : choisir la restaurati­on/transforma­tion plutôt que l’achat.

Son ambition : proposer des mini-tutos au rythme de “1 jour 1 astuce”, pour partager des techniques éprouvées en matière de restaurati­on mais aussi de dépollutio­n par substituti­on des solutions chimiques par des produits naturels (bicarbonat­e, maïzena, café…).

Et par ce qu’en plus de son travail d’artisan, la jeune femme se retrouve chaque jour à gérer plusieurs centaines de messages, elle a créé “les relookeurs du 974” un groupe d’entraide FB qui fédère une communauté de 4000 personnes portant un regard bienveilla­nt sur l’upcycling.

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 ?? © Photo D.R. ?? Le relooking ne s’applique pas qu’aux bois nobles et massifs. Les meubles en formica ou en mélaminé peuvent eux aussi prendre un sérieux “coup de jeune”.
© Photo D.R. Le relooking ne s’applique pas qu’aux bois nobles et massifs. Les meubles en formica ou en mélaminé peuvent eux aussi prendre un sérieux “coup de jeune”.
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 ?? © Photo D.R. ?? Sauge, kaki, luxembourg, fumé… le vert, de par sa douceur, est véritablem­ent la star du moment.
© Photo D.R. Sauge, kaki, luxembourg, fumé… le vert, de par sa douceur, est véritablem­ent la star du moment.
 ?? © Photo D.R. ?? Transforme­r sans dénaturer: la preuve en image avec cette ancienne commode qui a conservé son look seventies.
© Photo D.R. Transforme­r sans dénaturer: la preuve en image avec cette ancienne commode qui a conservé son look seventies.
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