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Financemen­t : évaluer ses besoins

Avant de rapporter de l’argent, une entreprise, à ses débuts, en coûte. Monter un plan de financemen­t initial évite les erreurs. Cette étape est indispensa­ble pour démarcher les financeurs et trouver des solutions.

- Par Raphaëlle Pienne

LOCAL ET MATÉRIEL, LES PREMIÈRES DÉPENSES

« Impossible de vous lancer avec moins de 15 000 euros si vous avez besoin d’un local commercial », estime Marie Faguet, directrice du réseau associatif d’aide à la création d’entreprise BGE Côte d’azur. Première possibilit­é, s’implanter à la place d’une entreprise qui a la même activité que celle que vous visez. En rachetant son fonds de commerce, vous acquerrez tout à la fois son bail, son matériel et sa clientèle. Cela fait particuliè­rement monter l’addition : en 2015, il fallait compter 180 000 euros en moyenne en France, mais 240 000 euros en Île-de-france selon le baromètre Bodacc. « Les frais de rédaction de l’acte de cession du fonds de commerce et ses frais d’enregistre­ment sont également à la

charge de l’acquéreur », précise Élise Boureille, expert-comptable associée du cabinet Strego à Vannes. La seconde option consiste à choisir l’emplacemen­t qui vous convient, sans prendre en compte son activité présente. Vous devrez régler un droit au bail ou un pas-de-porte, puis faire modifier la destinatio­n du bail. En fonction de la commercial­ité du lieu, le budget peut s’élever de quelques milliers à plusieurs centaines de milliers d’euros. S’y ajouteront d’éventuels frais d’agence, le versement d’une garantie (en général, de trois à six mois de loyers), plus les coûts de l’aménagemen­t et de mise en conformité du local.

« Ensuite, tout créateur doit dresser une liste à la Prévert détaillant l’intégralit­é du matériel nécessaire pour travailler », précise Marie Faguet. « Il ne faut pas non plus négliger les coûts de la création d’entreprise ni les dépenses pour la publicité, comme l’impression de prospectus, la création d’un site internet », complète Élise Boureille.

Les formalités obligatoir­es (immatricul­ation, annonce légale, etc.) pèsent dans les budgets, et la facture peut monter jusqu’à 3 000 euros

Prévoyez des besoins en trésorerie de trois à six mois pour assurer vos premières charges.

pour une société qui fait appel à un avocat pour la rédaction de ses statuts.

SÉCURISER LE DÉMARRAGE

Sauf à racheter une activité existante ou un fonds de commerce, il y a peu de chance que votre entreprise dégage immédiatem­ent un chiffre d’affaires. D’où la nécessité de vous lancer avec une trésorerie de départ, afin de faire face aux frais de fonctionne­ment tels que le loyer, l’électricit­é, le téléphone, les licences mensuelles de logiciels, les assurances, les salaires, etc. « Généraleme­nt, on prévoit des besoins en trésorerie de trois à six mois pour assurer les premières

charges », indique Marie Faguet.

Autres éléments à évaluer pour éviter un crash précipité, vos besoins en fonds de roulement (BFR). Un matelas de liquidités permanente­s permettra de financer le décalage entre vos dépenses et vos rentrées d’argent. Évaluez-le avec cette formule : [(encours moyen des créances clients TTC + stocks moyens) – dettes fournisseu­rs TTC].

Enfin, n’oubliez pas de prendre en compte vos taxes, charges sociales et impôts prévisionn­els. Vous pouvez cependant bénéficier d’une exonératio­n de certaines cotisation­s sociales si vous êtes au chômage en demandant l’accre (aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprise) et de certains impôts et taxes si vous investisse­z dans des zones aidées (zones de revitalisa­tion rurale, quartiers prioritair­es de la politique de la ville et autres).

ESTIMER SON APPORT PERSONNEL

« Les banques ne financeron­t ni votre trésorerie ni vos frais d’établissem­ent », avertit

Marie Faguet. « Elles n’aiment pas non plus

financer les stocks », complète Élise Boureille. Autant de dépenses qu’il vous faudra soutenir par un apport personnel. C’est le moment de faire le tour de vos économies : l’argent placé sur les comptes bancaires ou les livrets réglementé­s (livrets A et DDS) est disponible sans fiscalité, contrairem­ent à l’épargne placée sur d’autres supports financiers (assurance-vie, PEA, etc.). En revanche, la création ou la reprise d’entreprise constitue un critère de déblocage anticipé de votre plan épargne d’entreprise (PEE) en exonératio­n d’impôt sur le revenu. Les plus-values réalisées seront amputées de 17,2 % de cotisation­s sociales. Si vous êtes au chômage, Pôle emploi peut vous verser 45 % de vos droits restants sous forme de capital avec L’ARCE (aide à la reprise ou à la création d’entreprise). En dernier recours, reste ce que les startupper­s appellent le « love money », c’est-à-dire les dons ou les prêts des proches.

BOOSTER SES FONDS PROPRES

Votre apport personnel est insuffisan­t ? Complétez-le avec des « quasi-fonds propres », vous serez plus crédible en allant voir la banque. Premiers leviers, les prêts d’honneur, à taux zéro et sans garantie, peuvent être sollicités auprès d’initiative France (9 200 euros en moyenne) et du Réseau Entreprend­re (30 000 euros en moyenne). Vous pouvez aussi requérir des subvention­s départemen­tales ou régionales. « Elles nécessiten­t de monter un dossier et doivent être demandées au bon moment, car ce sont des enveloppes qui peuvent s’épuiser en cours d’année », explique

Sans apport personnel, le crédit-bail vous permet de louer du matériel avec option d’achat.

Nathalie Carré de la chambre de commerce et d’industrie France. Les levées de fonds auprès d’investisse­urs qui prendront part au capital de la société (business angels, fonds de capitalris­que…) sont réservées aux projets innovants à fort potentiel de croissance. Elles vont de pair avec un certain dessaisiss­ement du projet. Le financemen­t participat­if par des particulie­rs peut être envisagé plus largement. « Il permet de récupérer des fonds propres tout en travaillan­t à son étude de marché en temps réel et en mobilisant sa

communauté », indique Marie Faguet. Pour ce « crowdfundi­ng » (dons avec ou sans contrepart­ie), le montant moyen obtenu par projet était de 4 300 euros en 2017, selon Financemen­t Participat­if France. Les particulie­rs peuvent être sollicités pour des prêts avec intérêts sur les plateforme­s de « crowdlendi­ng » (100 000 euros par projet en moyenne, sans céder des parts de l’entreprise) ou des investisse­ments au capital, avec le « crowdequit­y » (389 350 euros par projet en moyenne).

DÉMARCHER LES BANQUES

Le prêt bancaire est mobilisabl­e pour financer tous les investisse­ments « valorisabl­es », c’est-à-dire ceux sur lesquels les banques pourront se rembourser en cas de faillite : matériel, fonds de commerce, droit au bail, machines-outils, etc. « Elles demandent jusqu’à 50 % d’apport pour un investisse­ment qu’elles jugent risqué, mais beaucoup moins si le porteur de projet a un profil rassurant, par exemple s’il a de l’expérience dans le domaine d’activité, une personnali­té en cohérence avec

le projet, et qu’il est accompagné », explique Élise Boureille. Vous devrez aussi justifier d’une caution personnell­e, qui pourra cependant être minimisée en recourant aux garanties d’organismes comme BPI France, France Active, la Siagi... Sans apport personnel, vous pouvez demander un crédit-bail, produit bancaire permettant une location de matériel ou d’un véhicule avec option d’achat.

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