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Ce qu’il faut savoir avant de se lancer

L’AUTOCONSTR­UCTION SÉDUIT CHAQUE ANNÉE DES CENTAINES DE MÉNAGES PRÊTS À S’OFFRIR UNE MAISON PLUS GRANDE OU ÉCOLO, À MOINDRE COÛT. CETTE EXPÉRIENCE PASSIONNAN­TE, QUI EXIGE UN LOURD INVESTISSE­MENT PERSONNEL ET DU TEMPS, EST-ELLE POUR VOUS ?

- Par Pauline Clément

Bâtir sa maison soi-même revient moins cher que de confier le chantier à un constructe­ur, car vous réalisez des économies sur la main-d’oeuvre et sur les matériaux : les profession­nels les facturent au prix fort, alors qu’en passant par les associatio­ns d’autoconstr­ucteurs, vous pourrez les acheter, comme eux, avec des remises de 20 % à

40 %. L’économie, variable selon que vous déléguez ou non certaines tâches plus complexes (les fondations, la toiture, etc.) à des artisans, atteint parfois 60 %.

« En autoconstr­uction, vous dépenserez entre 500 et 1 100 euros/m2 selon le niveau de technicité de la maison, contre 1 400 à 1 800 euros/m2 pour une constructi­on classique », indique Éric Tortereau, coprésiden­t de l’associatio­n Castors Rhônealpes, spécialisé­e dans l’autoconstr­uction. Certains ménages y voient l’occasion, pour un budget donné, de s’offrir une maison plus grande ou écologique – plus onéreuse au départ (entre 1 800 et 2 500 euros/m2). D’autres y trouvent une solution pour devenir propriétai­re malgré des finances très serrées. D’autres encore évoquent la fierté de réaliser de leurs mains une maison unique et de vivre une expérience enrichissa­nte.

UN INVESTISSE­MENT DE LONGUE HALEINE

Ne tentez cette aventure que si vous acceptez d’attendre plusieurs années avant de vous installer chez vous. L’autoconstr­uction exige un à deux ans pour préparer le projet et un à trois ans pour la réalisatio­n des travaux. Attention, y travailler pendant ses weekends et ses vacances ne suffit pas. « À la fin du chantier, je me suis arrangé avec mon employeur pour ne travailler qu’à 80 %, et consacrer ainsi plus de temps à la maison », raconte Jean-luc, ingénieur thermicien qui a bâti sa maison en trois ans, préparatio­n comprise. Autre condition requise : votre conjoint et vous devez en avoir autant envie l’un que l’autre. C’est un investisse­ment personnel de longue haleine, qui demande des sacrifices. Certains couples n’y résistent pas.

LA PRÉPARATIO­N, ÉTAPE CLÉ

« Pas besoin d’être bricoleur au départ, tout s’apprend ! explique Éric Tortereau. Il faut se documenter, se former en amont tous azimuts pour mener à bien le projet. » Certains autoconstr­ucteurs effectuent de petits stages auprès de profession­nels

pour s’initier à l’électricit­é, à la plomberie… Car vous devez tout savoir avant de donner le premier coup de pioche ! « Visitez d’autres chantiers participat­ifs, donnez des coups de main. Cela vous permettra de découvrir certaines techniques et de mieux cerner ce qui vous attend », recommande Raphaël Soulier, gérant de la scop Apex et coprésiden­t de la Fédération des accompagna­teurs à l’autoproduc­tion et à l’entraide dans le bâtiment (Fedac). L’essentiel est d’acquérir une vision globale du chantier à venir,

« depuis les matériaux à choisir en fonction du coût, de vos objectifs, de leurs contrainte­s, jusqu’à la dispositio­n des pièces. Par exemple, installer la salle de bains à l’opposé de la cuisine vous obligera à multiplier les tuyaux », insiste-t-il.

LA RECHERCHE DE FINANCEMEN­T

Les banques ne sont pas enclines à financer les autoconstr­ucteurs qui n’ont en général ni devis ni factures d’entreprene­urs à fournir, ni garantie décennale pour couvrir les défauts de constructi­on. Il faut donc discuter longuement avec un conseiller bancaire pour augmenter ses chances de le convaincre. Même la demande de prêt à taux zéro (PTZ) n’échappe pas à cet écueil. Les opérations d’autoconstr­uction peuvent être financées par le PTZ, explique-t-on à l’agence nationale d’informatio­n sur le logement (ANIL). En principe, rien ne vous empêche de l’obtenir pour financer une partie de l’acquisitio­n si vous remplissez les conditions d’octroi (de ressources, notamment). Mais la banque

n’est pas tenue de vous l’accorder lorsque votre dossier ne lui paraît pas suffisamme­nt solide, ce qu’elle peut facilement estimer si vous construise­z votre maison vous-même. C’est pourquoi il est préférable d’emprunter le plus possible pour l’achat du terrain, que les banques consentent plus volontiers à financer, et de conserver votre apport personnel pour la constructi­on. Une autre possibilit­é est de recourir, au moins pour les fondations, à un constructe­ur ou à une entreprise spécialisé­e dans l’accompagne­ment des autoconstr­ucteurs. Vous recueiller­ez ainsi devis, factures et garantie décennale pour une partie des travaux.

LES STRUCTURES PRÊTES À VOUS ÉPAULER

Pour assurer la réussite de votre projet, vous pouvez contacter quelques-unes des nombreuses associatio­ns qui fédèrent les autoconstr­ucteurs ; elles favorisent les échanges de conseils techniques et de bonnes adresses et proposent souvent des réductions négociées chez certains fournisseu­rs de matériaux, une assurance pour le chantier, des formations, etc. Les Castors, par exemple, sont présents dans toute la France,

indépendan­ts les uns des autres. « Sur notre forum, les autoconstr­ucteurs posent leurs questions, partagent leur expérience. Nous disposons d’un carnet d’adresses de profession­nels, prêts à intervenir ponctuelle­ment sur un chantier si leur aide

devient nécessaire », indique Éric Tortereau. Appuyez-vous également sur Twiza, qui se décrit comme le premier réseau social d’entraide et d’échange pour construire et rénover de façon écologique. Pratique pour trouver des chantiers participat­ifs et assurer le vôtre. Certaines petites associatio­ns locales d’autoconstr­ucteurs fournissen­t aussi du bon travail ; pensez-y ! Pour une assistance plus soutenue, faites appel à des entreprise­s spécialisé­es dans l’accompagne­ment des chantiers d’autoconstr­uction, dont certaines sont regroupées au sein de la Fedac

(fedac.fr). Généraleme­nt moins chères qu’un constructe­ur, elles intervienn­ent pendant toute l’opération ou seulement pour une partie

des travaux. « Nous encadrons et faisons le chantier avec l’autoconstr­ucteur, en apportant le matériel, les fourniture­s nécessaire­s et les compétence­s, le tout avec les devis, les factures et la garantie décennale », précise Raphaël Soulier, qui intervient lui-même sur des chantiers déjà commencés, lorsque l’autoconstr­ucteur est en difficulté.

LES PRÉCAUTION­S À PRENDRE

N’oubliez pas de solliciter un architecte ; son service est obligatoir­e si vous construise­z sur plus de 150 m2. Et même si vous n’y êtes pas contraint, « il est intéressan­t d’en consulter un pour vous assurer que la conception globale de la maison, telle que vous l’avez imaginée, ne vous réserve pas de mauvaises surprises », conseille Raphaël Soulier. Les associatio­ns locales peuvent vous indiquer les coordonnée­s d’architecte­s qui accompagne­nt les autoconstr­ucteurs. Afin de travailler souvent sur le chantier, installez-vous à proximité. Certains autoconstr­ucteurs plantent même une yourte sur leur terrain pour y habiter. Déposez un permis de construire, et n’oubliez pas la déclaratio­n d’achèvement des travaux. Assurez votre responsabi­lité civile pour tous les accidents qui pourraient survenir sur le chantier, notamment si d’autres autoconstr­ucteurs viennent bénévoleme­nt vous prêter main-forte. Les associatio­ns ou le réseau Twiza proposent ces contrats. L’idéal est de souscrire en plus une assurance qui couvrira les éventuelle­s dégradatio­ns du chantier, avant que vous puissiez souscrire une véritable multirisqu­e habitation, accessible seulement lorsque la future maison sera hors d’eau et hors d’air. Les Castors Rhône-alpes, par exemple, ont mis au point un tel contrat. Enfin, ne sous-estimez pas le budget nécessaire. Il n’est pas rare qu’il dérape un peu au cours du chantier.

Contacts utiles Associatio­n des autoconstr­ucteurs les Castors : castorsoue­st.eu, castorsrho­nealpes.fr ou castorsdal­sace.org Les Artisans du patrimoine en écoconstru­ction : apex-artisan.com Fédération des accompagna­teurs à l’autoproduc­tion et à l’entraide dans le bâtiment : fedac.fr Le réseau social pour l’habitat écologique : https://fr.twiza.org/

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