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Quelle prestation complément­aire puis-je demander ?

APRÈS 32 ANS DE MARIAGE, SYLVIANE VA DIVORCER DE PIERRE, D’UN COMMUN ACCORD. ELLE S’INQUIÈTE DE SA FUTURE SITUATION FINANCIÈRE CAR ELLE A PRIVILÉGIÉ SA VIE DE FAMILLE À SA CARRIÈRE.

- Par Anne-lise Defrance

Sylviane, 55 ans, et Pierre, 58 ans, vont divorcer à l’amiable. Mariés depuis trente-deux ans, sans contrat de mariage, ils relèvent du régime de la communauté réduite aux acquêts. Après avoir été mère au foyer pour élever deux enfants aujourd’hui indépendan­ts, Sylviane a retrouvé un emploi payé au smic, il y a sept ans. Pierre a poursuivi sa carrière et gagne 3 000 euros nets par mois. À leur séparation, ils ont décidé de vendre leur résidence principale à Limoges. Cette maison, d’une valeur de 200 000 euros, a été payée avec un apport commun de 50 000 euros et un prêt, soldé, de

110 000 euros. Pierre a hérité d’un deuxpièces de 60 000 euros, actuelleme­nt vacant. Sylviane gagnant moins que Pierre, verra son niveau de vie chuter après le divorce. Elle peut prétendre à une prestation compensato­ire afin de limiter l’impact de cette baisse de ressources. En prenant en compte la moyenne des décisions des juges en fonction de la durée du mariage, des revenus, du patrimoine, de l’âge et de la santé de chacun, son avocat estime qu’elle peut réclamer 53 000 euros à Pierre. Elle s’interroge sur le mode de versement à requérir pour éviter de payer trop d’impôt, tout en mettant cette somme à profit.

pourra réduire 7 625 euros du montant de son impôt sur le revenu (25 % du montant de la prestation compensato­ire retenu dans la limite de 30 500 euros).

Sylviane pense utiliser les 100 000 euros obtenus de la vente de la maison commune pour s’acheter un logement de 50 m2 environ pour 60 000 euros, l’équiper, payer les frais (charges de copropriét­é, taxe foncière, etc.) et éventuelle­ment compléter ses revenus. Dans un premier temps, elle préfère mettre toute sa prestation compensato­ire de côté. Pour que son épargne reste disponible, qu’elle lui rapporte un peu sans payer d’impôt sur ses gains, elle opte pour les livrets défiscalis­és, comme le livret A et le livret de développem­ent durable et solidaire (LDDS). Elle les remplit jusqu’à leur plafond, respective­ment de 22 950 et 12 000 euros. Avec un revenu fiscal de référence inférieur à 19 468 euros, elle a également accès au livret d’épargne populaire (LEP). Elle y verse le maximum autorisé, soit 7 700 euros. L’ensemble de ces produits lui permet d’encaisser 330,30 euros d’intérêts par an exonérés d’impôt. Pour la dizaine de milliers d’euros restants, Sylviane se tourne vers un placement de plus long terme et souscrit une assurance-vie. Ne souhaitant pas prendre de risque, elle place tout sur un fonds en euros rémunéré en moyenne 1,80 % par an.

EN RENTE MENSUELLE PENDANT 8 ANS

Sylviane doute de ses capacités de gestion : ne serait-il pas mieux de percevoir la prestation compensato­ire un peu chaque mois plutôt que de la toucher d’un coup ? Elle propose donc que Pierre lui verse une rente mensuelle de 550 euros pendant huit ans, délai maximum qu’aurait autorisé un juge s’ils avaient réglé leur divorce en justice.

Elle consacre les 100 000 euros de la vente de la maison familiale à l’achat d’un nouveau logement, afin d’économiser un loyer. Pour vivre plus confortabl­ement qu’avec son seul smic, elle décide de conserver chaque mois 250 euros de sa prestation compensato­ire.

Les 300 euros restants sont investis dans les produits d’épargne défiscalis­és. Intéressan­te à première vue, cette solution est en fait pénalisant­e pour Sylviane. Car la prestation compensato­ire versée en rente s’ajoutera à ses salaires au moment du calcul de l’impôt sur le revenu. Sylviane sera alors imposable à hauteur de 882 euros par an. Pour compenser cela, il faudrait qu’elle obtienne de Pierre un montant plus élevé. Peut-être l’accepterai­t-il, car cette solution – déduire chaque année les sommes versées de ses revenus imposables – est plus avantageus­e pour lui que la précédente. Autre défaut de cette option pour Sylviane : si les revenus de son ex-mari s’amenuisent au cours des huit années, il sera fondé à obtenir du juge aux affaires familiales une baisse du montant de la rente, à moins que la convention de divorce inclue une clause qui l’interdise.

À noter : si Pierre décède d’ici moins de huit ans, soit la prestation compensato­ire fera l’objet d’un prélèvemen­t avant le partage de sa succession, soit ses héritiers devront continuer à payer la rente jusqu’à son terme.

POUR PARTIE EN CAPITAL, POUR PARTIE EN RENTE

Sylviane apprécie l’idée de la rente qui complète ses revenus mensuels, mais se sentirait plus rassurée de toucher un petit capital sans délai, en plus de l’argent issu de la vente de la maison qui lui servira essentiell­ement à s’acheter un logement.

Pour la prestation compensato­ire, elle pense demander 13 000 euros dans l’immédiat (sur lesquels elle paiera au fisc un droit de partage de 325 euros ou un droit fixe de 125 euros, selon l’origine des fonds), puis une rente mensuelle de 416 euros pendant huit ans. Sylviane peut utiliser le capital reçu comme apport pour acheter un bien immobilier à louer. Un deux-pièces de 43 000 euros dans le quartier de la mairie serait dans ses moyens. Pour convaincre la banque de lui accorder un prêt de 35 000 euros sur huit ans avec des mensualité­s de 400 euros, elle utilise les 416 euros de sa rente mensuelle comme garantie. Elle doit aussi anticiper les frais annexes (taxe foncière, travaux d’entretien, etc.). Plus attractive qu’un versement en rente pure, notamment car elle permet de se constituer un patrimoine, cette solution n’est pourtant pas la panacée. Car, si les

13 000 euros versés en capital sont exonérés d’impôt, les 416 euros mensuels sont fiscalisés. Sylviane devient ainsi imposable à hauteur de 569 euros par an, voire de 2 113 euros par an si elle loue toute l’année pour 400 euros hors charges le deux-pièces dans lequel elle aura investi (régime micro-foncier). Là encore, elle perd de l’argent par rapport à un versement unique en capital, sauf à obtenir plus de Pierre pour compenser cette fiscalité.

EN RENTE EN NATURE

Sylviane considère qu’avec les

100 000 euros qu’elle récupère de la vente de leur maison, elle dispose d’assez d’argent liquide pour épargner selon son gré (remplir les livrets A, LDDS et LEP jusqu’à leur plafond et mettre le reste sur le fonds en euros d’une assurance-vie). Elle préfère demander à Pierre le paiement de la prestation compensato­ire sous forme d’abandon de

son droit de propriété sur le deux-pièces dont il a hérité et dans lequel elle pourrait s’installer. Celui-ci valant 60 000 euros, au lieu des 53 000 euros dus au titre de la prestation compensato­ire, elle doit rembourser à Pierre 7 000 euros qu’elle prélève sur sa part de leur résidence principale. Devenant seule propriétai­re de l’appartemen­t, elle doit aussi s’acquitter d’un droit d’enregistre­ment de

429 euros (0,71498 % de la valeur du bien) au Trésor public. La prestation compensato­ire versée sous la forme de transfert de propriété n’étant pas fiscalisée, Sylviane, compte tenu de son salaire, ne sera pas imposable. Elle doit cependant faire face à des dépenses supplément­aires (frais d’entretien du bien, charges de copropriét­é et taxe foncière). Non imposable, elle bénéficie de la baisse de sa taxe d’habitation de 30 % en 2018, 65 % en 2019 et d’une exonératio­n totale en 2020.

À noter : si elle n’occupe pas le deux-pièces et qu’elle le vend moins de six ans après l’avoir acquis, Sylviane devra payer l’impôt au taux forfaitair­e de 19 % et les prélèvemen­ts sociaux de 17,2 % sur le montant de la plusvalue éventuelle.

LEXIQUE Abandon de droit: fait pour un particulie­r d’abandonner volontaire­ment l’usufruit ou la pleine-propriété d’un bien qui lui appartient en son nom propre.

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Les époux qui divorcent et qui vendent leur résidence principale sont exonérés de l’impôt sur la plus-value éventuelle.

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