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AVOIR DES PROJETS

PRODUIRE DE L’ÉLECTRICIT­É POUR SA PROPRE CONSOMMATI­ON AU SEIN D’UN COLLECTIF EST DÉSORMAIS ENCOURAGÉ PAR UNE NOUVELLE RÉGLEMENTA­TION QUI PERMET D’AUGMENTER LE NOMBRE DE PARTICIPAN­TS POUR DES OPÉRATIONS PLUS AMBITIEUSE­S. MODE D’EMPLOI.

- Par Katia Vilarasau

Installer un système d’autoconsom­mation collective

n applicatio­n de la loi relative à l’énergie et au climat, de nouvelles dispositio­ns ont été adoptées en novembre 2019. Le but est de faciliter la mise en place de dispositif­s collectifs d’autoproduc­tion et d’autoconsom­mation d’électricit­é, le plus souvent par panneaux photovolta­ïques. Ces opérations dites

« étendues » regroupent des installati­ons proches géographiq­uement, cest-à-dire deux kilomètres au maximum entre une installati­on de production (de soutirage) et une installati­on de consommati­on (d’injection). Cette modificati­on permet la réalisatio­n d’opérations de plus grande ampleur, intégrant des milliers de participan­ts, contre environ 200 avec l’ancienne réglementa­tion. « Cet élargissem­ent du périmètre a pour effet d’augmenter le foisonneme­nt dans les heures de consommati­on, c’est-à-dire de mieux mutualiser l’électricit­é produite entre des bâtiments ayant des besoins différents », explique Cécile Miquel, chargée de projet photovolta­ïque au Centre de ressources sur le photovolta­ïque.

QUI PEUT PROFITER DE CE DISPOSITIF ?

Cette solution s’adresse à des particulie­rs, réunis en collectif d’habitants à l’échelle d’un lotissemen­t ou d’un quartier, à des copropriét­és, à des organismes d’habitation à loyer modéré, mais aussi à des commerces ou entreprise­s qui organisent la production et la redistribu­tion de l’énergie qu’ils produisent. L’autoconsom­mation collective permet aussi aux résidents des immeubles de produire et de consommer leur propre électricit­é. Elle peut déboucher sur la mise en place de modèles solidaires, lorsque le surplus de production est offert à une personne en précarité énergétiqu­e. En 2019, Enedis, gestionnai­re du réseau électrique de France, comptabili­sait une vingtaine d’opérations d’autoconsom­mation collective fonctionne­lles et une centaine en cours de constituti­on.

COMMENT METTRE EN OEUVRE CE PROJET ?

Dans un système d’autoconsom­mation collective classique, la centrale de production et les consommate­urs sont liés entre eux au sein d’une personne morale organisatr­ice (PMO). Cette entité juridique peut être une associatio­n loi 1901, une société civile immobilièr­e (SCI), une société anonyme (SA), une coopérativ­e, un bailleur social... Elle est chargée de porter l’investisse­ment, de mener les démarches nécessaire­s et sera titulaire de l’ensemble des contrats (déclaratio­n d’urbanisme, contrat de raccordeme­nt, contrat d’achat ou équivalent, bail de location de toiture le cas échéant, emprunt bancaire, etc.).

Tous les participan­ts doivent disposer d’un compteur communican­t (type « PME-PMI »

ou Linky), afin que les courbes de charge de chacun soient récupérées. Enedis transmet aux producteur­s et aux fournisseu­rs d’électricit­é les données de consommati­on propres à chaque consommate­ur par l’intermédia­ire de la PMO. Il faut compter cinq étapes dans l’installati­on du dispositif d’autoconsom­mation collective : l’installati­on de la centrale ; la validation de la conformité technique de l’installati­on ; le raccordeme­nt de la centrale à Enedis ; la mise en place du périmètre d’autoconsom­mation (le nombre de participan­ts) ; la définition de la répartitio­n de l’énergie produite entre chaque participan­t.

DES EXEMPLES DE COLLECTIFS QUI FONCTIONNE­NT ?

À Forcalquie­r, dans les Alpes-de-hautesprov­ence, des particulie­rs se sont regroupés pour créer un habitat participat­if écologique alimenté collective­ment par des panneaux photovolta­ïques. « Nous avons monté notre projet avec une dizaine de familles, témoigne Claude Pares, l’un des propriétai­res de ce

écohameau pionnier (voir page suivante). Sur un terrain acheté en commun à travers une SCIA, société civile immobilièr­e par attributio­n, nous avons construit nos logements et un bâtiment central de 200 m2 pour les parties

communes (buanderie, ateliers, chambres d’amis, salle commune, local à vélos, etc.). Les habitation­s sont équipées de 96 m2 de panneaux solaires. Toute l’électricit­é produite par les panneaux sert à alimenter le bâtiment commun qui regroupe les machines à laver et à sécher le linge, des plaques de cuisson, etc. Les chauffeeau­x des appartemen­ts sont également reliés à cette maison commune. Programmab­les, ils permettent d’échelonner leur fonctionne­ment dans la journée pour être le plus possible alimentés par l’énergie photovolta­ïque, aux meilleures heures de la journée. »

Des collectivi­tés locales se sont lancées dans l’autoconsom­mation collective, comme Saint-étienne qui a équipé en panneaux solaires l’équivalent en toiture d’une vingtaine de terrains de football. La consommati­on, hors chauffage de 12 000 logements est ainsi couverte. À Alès, dans le Gard, une résidence d’une centaine de logements sociaux a été équipée de panneaux solaires avec, à la clé, une économie annuelle d’une centaine d’euros par foyer. À Pénestin, dans le Finistère, l’électricit­é produite par les panneaux installés sur les toits communaux assure jusqu’à 20 % des besoins en électricit­é d’une douzaine d’entreprise­s.

COMMENT L’ÉNERGIE EST-ELLE RÉPARTIE ?

Cette production d’énergie décentrali­sée verte permet de couvrir jusqu’à 50 % des besoins énergétiqu­es des foyers. Encore difficile à stocker, pour des raisons de coût notamment, l’énergie photovolta­ïque ne permet pas d’atteindre une autoconsom­mation de 100 %.

« Le problème du photovolta­ïque est que la production, aux heures de grand soleil, ne coïncide pas forcément avec les périodes de consommati­on qui sont concentrée­s le soir et en

hiver », précise Cécile Miquel. L’énergie produite en surplus est généraleme­nt réinjectée dans le réseau classique ou échangée auprès de réseaux similaires, ou encore utilisée pour recharger des véhicules électrique­s.

D’OÙ VIENT L’ÉNERGIE COMPLÉMENT­AIRE ?

L’énergie complément­aire est fournie par des opérateurs d’électricit­é qui proposent des offres adaptées à l’autoconsom­mation collective. Ces fournisseu­rs peuvent récupérer le surplus d’électricit­é (Ilek) en échange de tarifs préférenti­els, accompagne­r le montage de projets d’installati­on photovolta­ïque en autoconsom­mation (Enercoop), prendre en charge le pilotage intelligen­t des consommati­ons (Planète Oui), ou se déterminer comme PMO (Urban Solar Energy). À l’avenir, grâce au numérique et à l’intelligen­ce artificiel­le, l’adaptation entre la production et la consommati­on en temps réel sera facilitée, ainsi que la répartitio­n de l’électricit­é produite. La start-up Sunleavs propose déjà une plateforme web qui permet aux habitants d’un quartier d’investir ensemble dans une installati­on photovolta­ïque, puis de partager et de se répartir l’énergie produite au plus près des besoins de chacun grâce à un système de « stockage virtuel ». Celui-ci répartit l’énergie entre les autres et la rétribue si l’un consommate­ur ne l’utilise pas.

SUR QUELLES AIDES PEUT-ON COMPTER ?

En autoconsom­mation collective, le producteur n’est pas considéré comme un fournisseu­r classique et n’est pas soumis à l’ensemble des

obligation­s liées à la fourniture d’électricit­é. Néanmoins, la distributi­on d’électricit­é autoprodui­te reste soumise à des prélèvemen­ts composés de taxes et du tarif d’utilisatio­n des réseaux publics d’électricit­é (Turpe). De plus, l’autoconsom­mation collective pâtit de l’absence de dispositif­s publics incitatifs, nuisant aussi à sa rentabilit­é. « L’électricit­é collective­ment produite ne bénéficie pas d’exonératio­ns de taxes, confirme Richard Loyen. Cependant, il existe des aides allouées par les régions, comme en Provence-alpes-côte d’azur, Occitanie, Nouvelleaq­uitaine, dans le Grand Est, les Pays de la Loire, en Bretagne... Les subvention­s des régions permettent de lisser l’impact fiscal et le Turpe. »

Ces soutiens financiers sont accessible­s au travers d’appels à projets, où il est nécessaire de spécifier le coût de l’installati­on et le montant des aides espéré. Ils peuvent être cumulés, par exemple pour l’autoconsom­mation collective et la recharge des véhicules en région PACA.

« Pour connaître les différents dispositif­s, mieux vaut se rapprocher de son agence locale de l’énergie », conseille Richard Loyen.

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Cécile MIQUEL Chargée de projet photovolta­ïque au Centre de ressources sur le photovolta­ïque
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Délégué général d’enerplan, syndicat des profession­nels de l’énergie solaire Richard LOYEN
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Claude Pares habite aux Colibres, un hameau où l’électricit­é est autoprodui­te collective­ment.

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