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Confinemen­t : les nouveaux rapports de voisinage

- Marianne Leclère

On les côtoie, on compte sur eux, on les subit parfois. La crise sanitaire les a rendus plus présents. Alors, les confinemen­ts ont-ils changé les rapports de voisinage ? Des enquêtes parues en janvier et en mars 2021 montrent que des lignes ont bougé. Décryptage.

VIVRE EN COPROPRIÉT­É : L’ENFER, C’EST LES AUTRES ?

Il est facile, et souvent amusant, de dresser un portrait des pires voisins : le bricoleur compulsif, les enfants tapageurs, le musicien en herbe, l’espion, le bavard, le malpoli, parfois même le violent. Mais dans la grande majorité des cas, les relations de voisinage se passent bien. « Ces portraits négatifs sont en total décalage avec la réalité, affirme Joanie Cayouette-remblière, sociologue, qui a réalisé plusieurs études sur les relations de voisinage, dont a plus récente, « Mon quartier, mes voisins » date de mars 2021. On pense que, aujourd’hui, notre quotidien est déterminé par l’hypermobil­ité et les nouvelles technologi­es.

Mais les relations que l’on noue autour de son lieu de résidence restent extrêmemen­t importante­s dans notre société. Les échanges de conviviali­té et l’entraide concernent trois personnes sur quatre, et seule une sur quatre déclare avoir déjà été en conflit avec ses voisins. » Il est vrai qu’avoir des voisins implique de respecter un certain nombre de règles. Certaines sont tacites, comme le savoir-vivre et la politesse, d’autres écrites dans le règlement de copropriét­é des immeubles et des lotissemen­ts ou dans un arrêté municipal (heures et jours de bricolage, de tonte de pelouse, de barbecue, tri des déchets, etc.). D’autres principes, enfin, comme la mitoyennet­é, les troubles anormaux de voisinage, les bruits diurnes ou le tapage nocturne, sont réglementé­s dans différents codes juridiques (civil, santé publique, pénal).

*Joanie Cayouette-remblière est coresponsa­ble de l’enquête « Mon quartier, mes voisins », Ined, mars 2021 et co-autrice de Comment voisine-t-on dans la France confinée ?, Population et Sociétés, Ined, juin 2020.

ET PENDANT LA CRISE SANITAIRE ?

Les confinemen­ts ont parfois permis de montrer le meilleur de nous-mêmes. « On a assisté à un grand élan de solidarité, d’ailleurs largement relayé et encouragé par les médias », se réjouit Atanase Périfan, créateur de la Fête des voisins. Paradoxale­ment, les enquêtes ont montré qu’il n’y avait pas eu davantage de solidarité qu’auparavant.

Ce sont seulement les acteurs qui ont changé.

« Là où, par exemple, les enfants et les services sociaux s’occupaient habituelle­ment d’une personne âgée isolée, ce sont les voisins qui ont pris le relais quand plus personne ne pouvait se déplacer », explique-t-il.

Difficile de savoir, aujourd’hui, si cette tendance s’est pérennisée. Il semblerait plutôt que l’enthousias­me du premier confinemen­t ait laissé place à une certaine lassitude… « Une fois l’émotion passée, pour que les gens continuent à rester solidaires, nous devons leur donner des outils », insiste

Atanase Périfan. « Après le “kit coronaviru­s”, nous proposons de télécharge­r un “kit vaccinatio­n”, à afficher dans son immeuble, pour proposer ou demander une aide à la vaccinatio­n. Je pense en tout cas que la crise du Covid nous a fait gagner vingt ans dans la sensibilis­ation des habitants et des pouvoirs publics aux solidarité­s de proximité », conclut-il.

LES RÉSEAUX SOCIAUX ENCOURAGEN­T-ILS VRAIMENT LA SOLIDARITÉ ?

De nombreuses applis et groupes de réseaux sociaux surfent sur cette idée que la solidarité de proximité a besoin de leviers pour se développer. On parle même du « voisinage 2.0 ». Leur promesse : échanger, louer des appareils, s’entraider, créer des liens et des contacts facilement, rapidement et localement en sollicitan­t ses voisins

 ??  ?? Atanase PÉRIFAN Président de la Fédération européenne des solidarité­s de proximité, créateur de la Fête des voisins et de Voisins solidaires
Atanase PÉRIFAN Président de la Fédération européenne des solidarité­s de proximité, créateur de la Fête des voisins et de Voisins solidaires
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Joanie CAYOUETTE-REMBLIÈRE Sociologue, chargée de recherches à l’ined*
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Kelly SIMON Cofondatri­ce du site Paris-jetequitte.com
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Les relations de voisinage peuvent être conflictue­lles. Pour qu’elles ne deviennent pas toxiques, il faut accepter de discuter. Pas toujours facile !

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