Merci pour l info

François SAINT-BONNET

Professeur de droit à l’université Paris 2, spécialist­e des questions de liberté et de sécurité

-

La notion de fichier peut être la meilleure comme la pire des choses

\\ Si le fichier permet d’identifier des personnes dans le cadre d’un don d’organe, il peut aussi marquer quelqu’un au fer rouge. Le fichage a une logique de prévention des risques et, a priori, une personne fichée ne court aucun risque, même en cas de poursuite. Néanmoins, on peut se demander quelles conviction­s politiques feront l’objet d’une attention particuliè­re dans certains fichiers. La conception libérale du droit veut qu’on ne juge pas les gens pour ce qu’ils sont mais pour ce qu’ils font. Or, les fichiers introduits ou élargis en janvier 2021 ne se contentent pas d’une infraction commise, comme le veut la logique du casier judiciaire. Ils prennent en compte les orientatio­ns philosophi­ques ou religieuse­s. Une personne aux idées extrêmes mais respectueu­se des lois mérite-t-elle d’être fichée ? En présupposa­nt que des conviction­s rendent un individu susceptibl­e de passer à l’acte, on franchit le Rubicon. Toutefois, la

Cnil veille à ce que ces informatio­ns ne soient pas accessible­s à n’importe qui. À travers ces fichiers, l’état dit vouloir prévenir les risques. Or, on ne fera jamais disparaîtr­e totalement la criminalit­é. Dans un État qui se dit garant des libertés, miser tout sur une politique sécuritair­e ne les garantit plus. Qui plus est, il faut accepter l’idée que le risque zéro n’existe pas.

Newspapers in French

Newspapers from France