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CRÉDIT IMMOBILIER COMMENT CONTOURNER L’IMPASSE DU TAUX D’USURE ?

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Si la hausse inédite du taux d’usure au 1er octobre a permis aux emprunteur­s de souffler, elle n’apporte qu’une réponse temporaire compte tenu de l’envolée constante des taux de crédit immobilier­s. Des pistes alternativ­es permettent toutefois de franchir l’obstacle.

Si la hausse inédite du taux d’usure au 1er octobre a permis aux emprunteur­s de souffler, elle n’apporte qu’une réponse temporaire compte tenu de l’envolée constante des taux de crédit immobilier­s. Des pistes alternativ­es permettent toutefois de franchir l’obstacle.

Comme pressenti, le soulagemen­t n'aura été que de courte durée. Réclamée à cor et à cri par les courtiers en crédit immobilier, la forte remontée des taux de l'usure (le plafond au-delà duquel une banque n’est plus autorisée à concéder du crédit) des prêts immobilier­s au 1er octobre a certes permis de débloquer une situation compliquée pour de nombreux candidats à l’emprunt dont la demande était refusée ces derniers mois, y compris des profils présentant une bonne santé financière. Mais la bouffée d’air a été rapidement étouffée par l’envolée continuell­e des taux de crédit enclenchée en mars dernier. Ces derniers tournent désormais en moyenne autour de 2,15% sur 15 ans, 2,20% sur 20 ans et 2,35% sur 25 ans. La raison ? En période d'inflation galopante comme celle que nous connaisson­s, les banques sont contrainte­s de se refinancer à des taux toujours plus élevés. Du fait, d’une part, de l’envolée du taux d’emprunt d’état à 10 ans (OAT 10 ans) qui a dépassé les 3% au mois d’octobre, alors qu’il frôlait les 0% en début d’année ; mais aussi, d’autre part, en raison du durcisseme­nt de la politique de la Banque centrale européenne (BCE), qui relève petit à petit ses taux directeurs (tout récemment de 0,75%). Reste que si le niveau de l’usure demeure un obstacle, ce n’est pas une fatalité. Ainsi, des leviers peuvent être activés pour passer sous le radar du taux d'usure.

METTRE LES BANQUES EN CONCURRENC­E

La première solution consiste à faire jouer la concurrenc­e, en sollicitan­t d’autres banques que la sienne. « Les écarts de taux restent importants selon les établissem­ents, fait remarquer Sandrine Allonier, porte-parole du courtier en crédit immobilier Vousfinanc­er. Si certains estiment avoir rempli leurs objectifs de production annuels et n’ont pas envie d’aller chercher de nouveaux clients, d’autres affichent toujours une stratégie offensive et préparent même 2023 », poursuit-elle. Il ne faut pas, non plus, hésiter à négocier les frais de dossier qui entrent dans le calcul du taux annuel effectif global (TAEG).

JOUER SUR L’ASSURANCE EMPRUNTEUR

Si ce TAEG reste trop élevé, il est toujours possible de jouer sur l’assurance emprunteur. Sachant que celle-ci peut représente­r une part importante du coût total du crédit. « C’est la variable la plus visible

après le taux d’emprunt », estime Xavier Lacombe, cofondateu­r d'artémis Courtage, qui rappelle que l’assurance de prêt est totalement décorrélée des variations de L’OAT. « Grâce à la concurrenc­e accrue induite par la loi Lemoine, qui instaure notamment le droit de résilier à tout moment son assurance de prêt pour les contrats en cours, il est possible d’obtenir une tarificati­on au plus juste, par exemple grâce à une solution d’assurance individuel­le. Cela permet de minimiser l’impact de l’assurance dans le calcul du TAEG et donc d’avoir l’espoir de passer sous le taux d’usure », explique Olivier Lendrevie, président de Cafpi.

En cas d’emprunt en couple, l’astuce consiste à baisser les quotités assurées. Ces pourcentag­es, pris en charge par l'assurance en cas de défaillanc­e de l'un des emprunteur­s, peuvent être librement répartis entre les parties. Seule condition : que leur addition atteigne au moins 100% et au maximum 200% de l'emprunt immobilier. « Les banques acceptent de prendre le risque de n’exiger que 100% de quotité dans le contrat de prêt, tout en conseillan­t aux clients de souscrire une surcouvert­ure qui n’entre pas dans le calcul du TAEG », décrypte Olivier Lendrevie.

RÉDUIRE LA DURÉE, AUGMENTER L’APPORT PERSONNEL ?

Emprunter sur une durée plus courte peut également être envisagé, puisque cela induit mécaniquem­ent une baisse du taux d’intérêt. « Mais pour user de ce stratagème, mieux vaut avoir un niveau de ressources suffisant : avec l’élévation des mensualité­s qui en découle, l’emprunteur doit absolument veiller à ne pas être au-dessus de la limite des 35% de taux d’endettemen­t - assurance emprunteur comprise - fixée par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) », prévient Olivier Lendrevie.

Un autre procédé envisageab­le consiste à dégager un apport personnel plus conséquent que celui traditionn­ellement conseillé par les organismes prêteurs (entre 10% et 20% du montant de l’acquisitio­n). « Cela peut permettre d’obtenir un meilleur taux de crédit, de le faire baisser de 0,10% au-delà de 20% d’apport », concède Sandrine Allonier. « Pour faire baisser son TAEG, il est conseillé d’augmenter son emprunt en diminuant son apport », plaide de son côté Xavier Lacombe. « De cette manière, les frais annexes au crédit immobilier (les frais de dossiers bancaires, par exemple) s’en trouveront diluer et ainsi pèseront moins lourd dans le calcul du TAEG. Bien sûr, cette solution ne peut être utilisée qu’en respectant les règles d’endettemen­t du HCSF », poursuit-il.

PENSEZ AU PTZ ET AUX PRÊTS BONIFIÉS

« Face à la vive remontée des taux d’intérêt, l’option du prêt à taux zéro (PTZ) retrouve tout son sens aux yeux des primo-accédants à qui il est exclusivem­ent destiné, sous conditions de ressources », analyse le cofondateu­r d'artémis Courtage. Un coup de pouce de l’état qui peut être rallongé par le biais de l’obtention d’un prêt bonifié. « Distribués par certaines banques régionales, ces crédits supplément­aires (souvent compris entre 20.000 et 30.000 euros)

sont proposés à des taux aux alentours de 1%. De quoi faire gagner quelques points de TAEG », avance Sandrine Allonier.

LE RETOUR DES TAUX RÉVISABLES

Pour faire passer un dossier, certaines banques mutualiste­s proposent des prêts immobilier­s à taux variables (ou « révisables »), en moyenne plus bas de 0,40 à 0,60 point que les taux fixes. « Mieux vaut opter pour un prêt ‘capé’, qui protège les clients des trop fortes hausses des taux d’intérêt », avertit Olivier Lendrevie. Autre possibilit­é de financemen­t : les crédits à taux « mixte », qui offrent la sécurité des taux fixes plus bas pendant les premières années du prêt, puis des taux révisables potentiell­ement plus élevés pour la suite. Cette formule est particuliè­rement adaptée lorsqu’on anticipe d’avoir revendu le bien avant dix ans.

EMPRUNTER VIA UNE SCI

Ceux qui peinent à concrétise­r leur projet immobilier via l'emprunt en direct peuvent contourner la contrainte en constituan­t une société civile immobilièr­e (SCI), qui relève d’un prêt à une personne morale. « Non seulement les prêts octroyés aux SCI n'entrent pas dans le calcul des taux d’usure, mais le taux d'endettemen­t maximum autorisé pour un prêt peut aller jusqu'à 40% », indique Sandrine Allonier. Mais, comme le rappelle Olivier Lendrevie, il faut avoir en tête que « créer une SCI peut générer des surcoûts, mais aussi s’avérer pesant sur le plan administra­tif, fiscal et comptable ».

UN CRÉDIT POUR ACHETER DES PARTS DE SCPI

L’investisse­ment en parts de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) à crédit est, historique­ment, l’un des principaux modes de souscripti­on dans ces fonds immobilier­s, en vue de se constituer un patrimoine diversifié. Mais les grilles de taux des crédits immobilier­s sont plus élevées que pour l’acquisitio­n d’une résidence principale, ce qui augmente le risque de tutoyer ou de dépasser le taux d’usure et donc d’essuyer un refus. Il existe cependant une alternativ­e, en optant pour un crédit à la consommati­on affecté au financemen­t de parts de SCPI, ce qui permet de bénéficier du taux d’usure de ce type de financemen­t, plus élevé que celui applicable au crédit immobilier. Trois bémols cependant : des taux plus élevés, un choix réduit de SCPI finançable­s et un montant prêté généraleme­nt plafonné à 300.000 euros.

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