LA VIE SANS FOFANA
L’ABSENCE DU CENTRE CLERMONTOIS, VICTIME EN JANVIER D’UNE RUTURE D’UN TENDON D’ACHILLE, PÈSE LOURD. AUTANT PAR SON IMPACT DIRECT QUE SUR LES PERFORMANCES DES JOUEURS QUI L’ENTOURENT.
Doucement, Wesley Fofana réapprend à marcher. Et il en fait profiter le monde, via des vidéos postées sur les réseaux sociaux. Il marche avec des béquilles, à la clinique de La Châtaigneraie, près de Clermont-Ferrand, où il fut opéré le 23 janvier dernier d’une rupture du tendon d’Achille gauche. Il marche aussi au centre d’entraînement clermontois, sans assistance mécanique mais dans un AlterG, ce tapis de course intégré dans une bulle permettant de se soustraire à la gravité terrestre (et donc à son propre poids, pour soulager le membre opéré). Une rééducation lente pour une blessure grave, qui privera le centre Clermontois de rugby jusqu’à la fin de la saison. Et qui prive, dans le même temps, le XV de France de son meilleur joueur.
TOUT LE MONDE EN PÂTIT
Perdre Fofana, « dont je n’ai jamais caché qu’il est le leader de notre ligne de trois-quarts » (Novès) n’est évidemment pas anodin pour le XV de France. Pour son potentiel offensif, dont il était le plus grand pourvoyeur grâce à ses appuis, son couple poids/vitesse et son sens des intervalles. Pour sa capacité à rendre les autres meilleurs, aussi. Déjà, le cliché de Fofana qui ne fait pas de passes a vécu. Il est même passé de mode, il y a un an, en même temps que les consignes de jeu changeaient dans le secret de Marcoussis. Surtout, la crainte que génère Fofana chez l’adversaire permet habituellement à ses coéquipiers de profiter d’espaces accrus. Ce qui n’est plus vrai pour ce Tournoi. « Un joueur d’un talent supérieur, sur le terrain, focalise beaucoup de défenseurs sur lui. C’est vrai pour tous les joueurs dans son cas », confirme le sélectionneur. « Ce sont des éléments qui facilitent la vie et le jeu des autres. Wesley est un joueur de talent qui a aussi atteint une forme de maturité. Ce qui donnait aux autres beaucoup plus d’espaces ». Ses coéquipiers en club et en Bleu, Lopez, Lamerat ou Nakaitaci, n’ont jamais semblé aussi bons, en équipe de France, qu’en novembre dernier, quand Fofana monopolisait les patrouilles défensives adverses. Virimi Vakatawa ou Yoann Huget, sur l’autre aile, n’avaient jamais semblé bénéficier d’espaces aussi vastes. Et l’absence de Fofana, que la promotion de Fickou ne comble pas totalement, pèse aujourd’hui clairement sur l’animation collective française, autant que sur les performances individuelles.
PAS D’ADAPTATION COLLECTIVE
N’empêche, le XV de France s’est refusé à adapter son jeu et ses lancements. Question de philosophie, d’abord. « Si vous modifiez tout pour l’absence d’un seul joueur, le message vers votre équipe est négatif. Cela veut dire que vous souffrez d’une dépendance à son égard et que les autres ne sont pas capables de faire sans lui. » Plus que l’entraîneur, c’est le manager qui parle. « Les doublons, que j’ai pu connaître par le passé, vous apprennent ceci. Que le collectif est toujours plus fort qu’un homme. Ce sont des situations durant lesquelles les équipes s’endurcissent ». Un scénario que les Bleus expérimentent actuellement. En attendant que le Clermontois, certainement le meilleur joueur français actuel, ne fasse son retour. Avec, dans sa hotte, quelques intervalles pour ses partenaires.