Midi Olympique

JE T’AIME... MOI NON PLUS

BOUDÉ PAR LE STAFF DES BLEUS AVANT D’ÊTRE RALENTI DANS SON RETOUR AU PREMIER PLAN PAR L’AFFAIRE DE L’HIGÉNAMINE, BRICE DULIN EST LOGIQUEMEN­T TITULARISÉ EN ITALIE.

- Par Marc DUZAN marc.duzan@midi-olympique.fr

Mike Brown ne rend pas le moindre kilo à Edoardo Padovani (90 kg), lequel n’est pas plus explosif que Brice Dulin, dont la détente est sensibleme­nt équivalent­e à celle de Leigh Halfpenny, aux côtés duquel Rob Kearney et Stuart Hogg concourent pour le championna­t d’Europe du plus gros tour de cuisse. En clair, tous les arrières du vieux Tournoi ont en commun des qualités athlétique­s hors norme et, lorsque la différence ne peut se faire d’un aspect purement technique, celle-ci se joue souvent dans les tronches. À ce sujet, Guy Novès parle d’un « minimum requis » lorsque l’on porte le maillot de l’équipe de France. On évoque de notre côté une ardeur confinant à la colère, une agressivit­é exacerbée dans le un contre un, l’envie de meurtre que doit naturellem­ent stimuler toute convocatio­n en équipe nationale. Guilhem Guirado a cela en lui. Yohan Huget, aussi. Scott Spedding ? Il est permis d’en douter, tant le manque de conviction dont l’arrière des Bleus fit preuve sous les ballons hauts il y a quinze jours, en Irlande (19-9), ne permit jamais de rassurer ses coéquipier­s à l’Aviva. Le dernier rempart de l’ASMCA est un bel athlète, propre sur lui et dépourvu de masse graisseuse. Sans être un lapin de six semaines, il n’a non plus rien d’un assassin en défense, son tête à tête avec Julian Savea lors du dernier Mondial en est d’ailleurs la preuve formelle…

Alors, vous nous répliquere­z probableme­nt que Brice Dulin, son remplaçant en Italie, n’est ni Freddy Krueger, ni Jamie Cudmore. L’arrière du Racing, comme ses contempora­ins Maxime Machenaud ou Morgan Parra, cultive néanmoins un côté « coq de basse-cour », ronchon, mauvais perdant et belliqueux, dès lors qu’il engage ce qu’il considère comme son honneur dans un match de rugby, un tête à tête à « paleta gomme » ou une banale partie de cartes. Seulement lesté de 80 kg, Brice Dulin ne perd ainsi que très peu de duels en défense, se jetant dans les chevilles de ses adversaire­s, à l’Argentine, comme d’autres sautent à l’élastique…

LE MEILLEUR ARRIÈRE FRANÇAIS DU MOMENT

Depuis la fin du Mondial, l’arrière du Racing et le nouveau staff des Bleus la jouent un peu « je t’aime moi non plus », sacralisan­t leurs ruptures et surjouant leurs retrouvail­les. Absent des neuf premières rencontres de l’ère Novès, Dulin a finalement fait son retour en équipe de France à l’automne, face aux All Blacks (1924). Au sujet de l’omission prolongée de l’arrière du Racing, il s’est raconté beaucoup de choses derrière les contrefort­s de Marcatraz. On a d’abord dit que Guy Novès lui faisait payer le fait d’avoir refusé de rejoindre le Stade toulousain, à l’époque où Dulin s’engagea dans les Hauts-de-Seine. L’hypothèse s’est rapidement révélée fausse. On a alors penché pour une rumeur plus « rugby », celle qui faisait alors dire à un proche du staff des Bleus que le dernier rempart des Ciel et Blanc avait

« du mal à lâcher les ballons » et, à tout bien regarder, pouvait être comparé à un joueur de foot US, gagnant des yards mais bel et bien indifféren­t lorsqu’il est question d’assurer une continuité du ballon n’existant pas chez nos lointains cousins ricains. À l’époque, le Racingman se défendait ainsi : « On m’a peut-être reproché de ne pas assez faire de passes. C’était une vérité à une époque de ma vie. Mais mon jeu a évolué. Je fais beaucoup plus jouer qu’auparavant. Le ballon rebondit davantage derrière moi. J’ai encore des manques. Mais je pense avoir réussi à gommer les principaux défauts que l’on me reprochait. »

LABIT : « MEILLEUR QU’À L’ÉPOQUE OÙ IL JOUAIT À CASTRES »

Au moment où Maxime Médard est encore aux fraises, à l’heure où Scott Spedding tarde à rendre au staff des Bleus la confiance placée en lui depuis un an et demi, alors que Geofrey Palis paraît encore loin du très haut niveau, qu’Hugo Bonneval a toutes les peines du monde à revenir et que Gaëtan Germain pâtit d’une réputation (erronée ?) de buteur exclusif, il nous semble évident que l’arrière des champions de France incarne aujourd’hui une évidence. Laurent Labit, son entraîneur dans les

Hauts-de-Seine, analyse : « Brice est dans la forme de sa vie. Il aurait dû démarrer le Tournoi des 6 Nations sans l’histoire que vous connaissez (celle de l’higénamine). À mon sens, il a beaucoup progressé depuis l’époque où je l’entraînais à Castres (2012-2013).

Il s’implique davantage dans le jeu, ne reste plus collé au fond du terrain à guetter les relances. Au Racing, Brice se comporte de plus en plus comme un second numéro 10 lorsque le jeu le demande : il appelle, replace, organise. Son amitié avec Carter, un gaucher comme lui, l’a enfin beaucoup aidé : Dan lui fait bosser le jeu au pied, le teste sous les ballons hauts, c’est pour lui une vraie plus-value ». Alors, Dulin va-t-il mettre tout le monde d’accord en Italie ? La balle est désormais dans son camp…

« On m’a peutêtre reproché de ne pas assez faire de passes. C’était une vérité à une époque de ma vie. Mais mon jeu a évolué. »

Brice DULIN

Arrière du XV de France

 ?? Photo Midi Olympique ?? Brice Dulin revient face à l’Italie, impatient de prouver qu’il est le meilleur arrière français du moment.
Photo Midi Olympique Brice Dulin revient face à l’Italie, impatient de prouver qu’il est le meilleur arrière français du moment.

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