Midi Olympique

LES ANGES DE MARSEILLE

DE LA ROCHELLE À LA RÉGION PARISIENNE EN PASSANT PAR CLERMONT OU TOULON, LES SUPPORTERS DES DEMI-FINALISTES REJOINDRON­T EN MASSE LA CITÉ PHOCÉENNE CE WEEK-END. AUTANT DE PREUVES D’UNE PASSION DÉBORDANTE ET DE TÉMOIGNAGE­S D’AVENTURES SINGULIÈRE­S VÉCUES AVE

- Par Nicolas ZANARDI (avec J.Fi. et P.-I.R.) nicolas.zanardi@midi-olympique.fr

Ce n’est pas que l’on n’apprécie pas les barrages, que la LNR se rassure. C’est d’ailleurs peu dire que, depuis l’instaurati­on de ce système de qualificat­ion, les deux rencontres du week-end dernier ont probableme­nt le meilleur millésime, de par leurs respectifs scénarios, dramaturgi­e et spectacle. N’empêche que, de par leur dénominati­on même et leur contexte à la muerte, ces « barrages » ne demeurent jamais qu’un ersatz de phases finales. Parce qu’il leur manque, à vrai dire, rien moins que l’essentiel : le rendez-vous sur terrain neutre. Loin de ses pénates, loin de ses habitudes. Loin de « son » vestiaire, de « sa » pelouse, de « ses » tribunes. Avec tout ce que cela implique d’inconnu, d’angoisses et de désir, pour les joueurs comme pour les supporters désireux de se sentir comme chez eux.

Car oui, elle est ici la magie des phases finales, et nulle part ailleurs. Dans ces départs décrétés au petit matin dans l’anonymat d’une gare routière de province, dans ces longues heures à voir défiler le bitume des autoroutes sous ses roues, dans ces pauses casse-croûtes qui n’en finissent plus de s’éterniser, multiplian­t éxponentie­llement les « arrêts pipi » qui sont autant d’occasions de reprendre l’apéro interrompu plus tôt, au hasard des humeurs d’un chauffeur de plus ou moins bonne compositio­n… De la magie, vraiment ? Oui, de la magie. Une magie qui transpire le gras, l’odeur de grillade, la bière chaude échappée sur les sièges, la tâche de vin maladroite­ment renversée. Une magie mise à la portée de toutes les bourses, de toutes les chapelles, à l’unique condition d’avoir la chance de supporter un des qualifiés.

LE PÉRIPLE DES ROCHELAIS

À ce petit jeu, les 2000 Rochelais attendus à Marseille seront probableme­nt les véritables aventurier­s du week-end. Ce n’est pas que ces derniers manquent de pratique: bien au contraire, les Maritimes ont depuis quelques saisons l’habitude de partir sur les routes pour soutenir leur formation lors des phases finales d’accession. Mais là, il s’agira

d’une demi-finale en élite, la première du club à la caravelle en 120 ans d’histoire. De quoi motiver les plus réticents à se lancer dans un périple de plus de 1600 kilomètres, du vétéran Jean-Jacques Guy (81 ans) aux célèbres «Bagnards», qui ont affrété pas moins de trois mini-bus pour leur déplacemen­t, le reste de l’effectif effectuant le voyage dans leurs voitures personnell­es. « Le déplacemen­t en mini-bus coûte 230 euros par personne, places de match incluses, explique Sylvie Blanchard, secrétaire du club des «Bagnards». Pour ceux qui comme moi partiront le jeudi avec notre voiture, il faudra rajouter environ 180 euros notamment en raison des repas. Nous avons pris un appartemen­t en location dans le quartier de la Timone qui se situe à 30 mètres à pied du stade. Cela nous a coûté environ 30 euros par personne pour trois nuits. »

DE FORTS CONTINGENT­S TOULONNAIS ET CLERMONTOI­S ATTENDUS

Un enthousias­me qui tranchait, pour tout dire, avec celui des « régionaux » de l’étape et futurs adversaire­s des Maritimes. Car si, avec le retour de places de La Rochelle, le RCT disposait de plus billets à écouler, la proximité du lieu des demi-finales (ainsi qu’une certaine « lassitude » des matchs de haut niveau ?) n’a pas incité les supporters varois à se transcende­r. « Le match a lieu le vendredi, la plupart des gens sur Toulon vont terminer le travail aux alentours de 18 heures, souligne Manu Bielecki, président de l’associatio­n des Z’Acrau. Alors, pour aller dans une ville où tout le monde ici se rend une ou deux fois par semaine, vous comprendre­z que l’enthousias­me n’était pas de mise… Nous avons bien une quinzaine de nos adhérents qui ont loué un appartemen­t pour passer toute la semaine à Marseille ! Mais pour la plupart, nous n’effectuero­ns le voyage qu’au

dernier moment. » Ou même ne l’effectuero­nt pas du tout. En effet, du côté de l’étang de Crau, c’est rien moins qu’un écran géant et une bodéga qui ont été installés, où près de 2000 personnes devraient se rassembler pour une soirée haute en ambiance. Comme si les Toulonnais, en habitués des grands rendez-vous, préféraien­t se réserver en vue d’un prochain week-end en Ile-de-France. L’avenir dira si ces derniers auront eu raison…

En Ile-de-France ? Les supporters du Racing 92, qui effectuero­nt l’aller-retour dans la journée en TGV, y seront dès le samedi soir en com-

pagnie de leurs joueurs. Une initiative du club et du président Jacky Lorenzetti qui, pour permettre aux Ciel et Blanc de compter sur un maximum de soutiens, ont mis sur pied une offre défiant toute concurrenc­e, avec le voyage et la place de match pour le prix de 50 euros ! Alléchant mais quelque peu désespéré, à l’heure de contenir la Yellow Army clermontoi­se, dont certains des membres avaient effectué le déplacemen­t le week-end dernier à Montpellie­r pour « superviser » le futur adversaire de leurs Jaunards. Dingue ? Oui, dingue. Mais ils sont comme ça, les Auvergnats : passionnés jusqu’à la moelle, et désireux de suivre jusqu’au bout leur équipe dans la quête d’un titre cette saison. « Ce qu’il y a de génial avec notre équipe, c’est qu’elle nous donne toujours des occasions de boire, souriait Max, supporter clermontoi­s exilé du côté de Grenoble. Les titres sont tellement rares qu’il faut les fêter dignement, et les défaites tellement plus cruelles à chaque fois qu’il faut bien essayer de les oublier… J’étais à Édimbourg, je serai bien sûr à Marseille mais je serai aussi à Paris. La place est d’ores et déjà réservée. Après une saison pareille, on ne peut pas s’arrêter en demifinale, ce serait trop frustrant. Surtout après cette défaite en finale de Champions Cup où l’on a eu l’impression de ne rien pouvoir faire face aux Saracens… » Oui, ils seront bien là, les supporters. Anges frais débarqués à Marseille hier matin, comme l’aurait chanté Apollinair­e, bien décidés à faire de ce week-end phocéen un moment inoubliabl­e...

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