AU PIED D’UNE MONTAGNE
IL FAUDRAIT UN MIRACLE AUX CASTRAIS POUR ESPÉRER UNE QUALIFICATION. MAIS QU’IMPORTE. SI LE DÉFI QUI LES ATTEND À THOMOND PARK EST IMMENSE, LUDOVIC RADOSAVLJEVIC EN SAIT QUELQUE CHOSE, PUISQU’IL FUT DE L’ÉQUIPE CLERMONTOISE QUI FIT TOMBER LE MYTHE DE LIMER
Castres et le Munster partagent une longue histoire commune sur la scène continentale. Si longue qu’aucune autre équipe ne peut prétendre avoir affronté plus souvent le même adversaire dans la prestigieuse compétition. En effet, Castrais et Munstermen se sont affrontés à treize reprises en Coupe d’Europe. Seulement voilà, on ne peut pas vraiment dire que l’histoire donne aux Castrais les faveurs des bookmakers. Sur ces treize matchs, le Munster en a remporté neuf, et reste sur six rencontres sans défaites contre le CO : cinq victoires et un nul. Ajoutez à cela que le Munster a remporté 27 de ses 28 dernières réceptions d’un club de Top 14, et vous comprendrez pourquoi les parieurs prudents éviteront de placer leur PEL sur une victoire castraise. 27 sur 28. La statistique fait froid dans le dos. Mais quelle était donc la dernière équipe française à s’imposer dans l’enfer rouge de Thomond Park ? Un indice ? Elle joue en jaune et bleu…
RADOSAVLJEVIC : « CE JOUR-LÀ, ON AVAIT PLUS ENVIE QU’EUX »
Vous avez trouvé ? C’était le 6 décembre 2014. Ce jour-là, l’armada clermontoise se déplaçait avec une idée fixe. Un certain Ludovic Radosavljevic, qui fait aujourd’hui le bonheur du CO, était titulaire à la mêlée : « Ce match est l’un de mes meilleurs souvenirs en tant que rugbyman pro. C’était la première fois que je jouais à Thomond Park. La veille, nous avions fait des repérages au stade, histoire de nous familiariser avec l’endroit. Toute la semaine, Jono Gibbes (ex-entraîneur de l’ASM), qui était passé par le Leinster, nous avait parlé de l’environnement, de ce rugby de village, avec une équipe composée de mecs fiers, issus du cru. Le jour du match, j’étais dans ma bulle. Mais je revois encore ces tribunes entièrement rouges, ce public qui hurle et qui chante, et enfin ce silence de cathédrale à chaque fois que les buteurs se trouvent face aux poteaux. Le match a été très dur. Nous avions eu la chance de marquer rapidement. Après, nous avons beaucoup, beaucoup, beaucoup défendu. »
Mis sur orbite par une première mi-temps titanesque dans laquelle ils marquèrent deux essais par Fritz Lee (1re minute) et Wesley Fofana (21e), ainsi qu’une pénalité et un drop de Camille Lopez, les Clermontois ont ensuite trouvé le temps long en deuxième période : « J’ai encore des images où je revois les Irlandais faire dix, quinze, vingt séquences de jeu à une passe dans notre camp. Mais à chaque fois, ils tombaient tout de suite, et nous nous replacions. Nous étions tellement remontés… Nous avions ciblé ce match. C’était le premier de la double confrontation et nous voulions gagner au Munster. C’est fou à dire quand on parle du Munster, mais ce jourlà, nous avions plus envie qu’eux. On aurait pu défendre comme cela toute la nuit, personne ne les aurait laissés passer. » Sur le terrain jusqu’à la dernière seconde et auteur d’un match admirable, « Rado » avait ainsi vécu un moment unique pour n’importe quel rugbyman français : celui de lever les bras à Thomond Park : « Ce match restera à jamais gravé dans ma mémoire. Quand on connaît l’importance de la Coupe d’Europe, gagner là-bas est quelque chose d’immense. »
TENUE CORRECTE EXIGÉE
Vient ensuite la question fatidique : comment vaincre alors le Munster ? Le demi de mêlée doit bien le savoir puisqu’il l’a fait ! « Vaste question… Nous avions eu la chance de marquer rapidement mais… après il faut tenir ! Et encore, cela ne suffit pas. Il faut les dominer dans l’engagement, tout en restant lucide tactiquement. » Rien que ça… en filigrane, on comprend tout de même que les Castrais devront répondre au défi physique imposé par les Irlandais. Ne serait-ce que pour prouver que le zéro point encaissé face à Leicester n’était pas qu’un mirage, une semaine après avoir encaissé trente points à Agen. Car la semaine suivante, les Castrais recevront les colosses du Racing 92 dans une rencontre qui vaudra cher dans la course à la qualification. Un match qui sent déjà la poudre…