Midi Olympique

LA FIN ÉTAIT BELLE

SAMEDI, AU BOUT D’UNE SAISON EN TOUS POINTS DÉCEVANTE, IL S’AGISSAIT AU MOINS DE SOIGNER LES ADIEUX D’AURÉLIEN ROUGERIE EN SON JARDIN DE MICHELIN. CE QUE LES AUVERGNATS SONT PARVENUS À FAIRE DANS UNE SOIRE RICHE EN ÉMOTIONS ET EN SYMBOLES.

- Par Jérémy FADAT jeremy.fadat@midi-olympique.fr

Enfin… Qu’il fut long et douloureux ce cru 2017-2018 du côté de Clermont. Nul besoin de s’étendre sur la neuvième place finale du champion de France en titre ou sur l’éliminatio­n à domicile en quart de Champions Cup. Chacun en Auvergne, des joueurs aux dirigeants en passant par le staff et les supporters, était impatient de passer à la suite. Mais il fallait solder les comptes. Ceci au coeur d’une soirée forcément à part. Ce samedi, la légende de l’ASM, Aurélien Rougerie, disputait son 419e et dernier match sous le maillot jaune et bleu. Lui, le capitaine qui avait ramené le premier Brennus de l’histoire du club en 2010. Lui qui a écrit toutes les dernières pages du livre des gloires ou des souffrance­s. « C’est une icône, clame son président Eric de Cromières. Aurélien, c’est une sorte de Graal qu’on ne peut pas atteindre, ou qu’on ne peut pas imaginer tant que cela ne s’est pas réalisé. C’est trente ans dans le club, 78 sélections et d’autres années à venir dans des rôles différents mais on saura profiter de ses qualités. » Il ne fallait donc pas gâcher les adieux sur une pelouse où son surnom était apparu quelques heures avant le coup d’envoi et devant un public qui n‘avait d’yeux que pour lui. « On s’était dit dans la semaine qu’il était hors de question de perdre pour la dernière de Roro ici, explique Camille Lopez. C’est chez lui. L’ASM, c’est Roro. Alors partir sur une défaite, c’était impossible. »

ROUGERIE : « À TOI DE REPRENDRE LE FLAMBEAU »

Longtemps malmenés par des réserviste­s toulousain­s audacieux et entreprena­nts, les Clermontoi­s ont trouvé les ressources pour s’offrir une victoire de prestige, laquelle restera dans les annales locales. « Ce n’est pas anecdotiqu­e, se félicite justement Rougerie. Je me suis donné du mal pour inscrire un dernier essai. Je n’y suis pas parvenu mais c’est aussi plaisant de repartir avec un succès qui me satisfait pleinement. » Lui qui, quelques minutes après le coup de sifflet final, portait toujours les stigmates de son ultime combat : « Ce maillot, il est pour moi. Je vais le garder. Il y a mes dernières gouttes de sang de rugbyman dessus. C’était une dédicace à Vern (Cotter) parce qu’il aimait bien qu’on sorte du terrain avec du sang sur le maillot (sourires). » Lui a quitté celui du Michelin à la 54e minute, chaudement congratulé par ses coéquipier­s et… au milieu d’une haie d’honneur improvisée par les Toulousain­s. « J’ai été surpris de les voir me rendre aussi hommage, souffle-t-il. C’est énorme quand tu as le respect de tes adversaire­s. Je le garderai au fond de ma tête pour le restant de ma vie. » Surtout, c’est à cet instant qu’il a serré dans ses bras Damian Penaud, lequel prenait sa place. Un symbole pour une passation de pouvoir. « C’était écrit depuis un moment, raconte Rougerie. Depuis qu’il est arrivé. Maintenant, il a une tâche difficile à remplir mais il va évoluer, comme j’ai pu le faire auparavant. J’ai essayé de lui donner toutes les armes possibles et j’essayerai de l’aiguiller encore. Cette accolade entre nous, elle est symbolique mais elle témoigne aussi beaucoup d’affection. Damian, c’est un bon gamin et je lui ai dit : « Maintenant, c’est à toi de prendre le flambeau, débrouille-toi. » Le jeune internatio­nal a entendu le message : « Roro a toujours été là pour moi, m’a épaulé dans les bons comme les mauvais moments. J’ai commencé il y a deux ans pour mon premier match à Agen avec lui. Aujourd’hui, je finis avec lui. » Et il faudra désormais faire sans le gardien du temple. « Cela nous fera bizarre qu’il ne soit plus sur le terrain avec nous, mais il sera là dans un autre costume, assure Lopez. Ce fut un honneur, une énorme fierté de pouvoir évoluer à ses côtés. »

LOPEZ : « LA SAISON A ÉTÉ DÉGUEULASS­E »

Dans une cérémonie qui célébrait aussi les autres partants à la fin de la rencontre, Aurélien Rougerie a d’abord versé quelques larmes en rendant hommage à José Bernardes, le jardinier du club qui a disparu l’année dernière. Avant de stimuler l’orgueil de l’ensemble des joueurs et salariés, pour les voir rebondir dans les mois à venir. « Il ne faut pas lâcher et continuer à bosser encore plus fort, encore davantage dans les détails, affirme-t-il. C’est pour cela que j’ai voulu piquer tout le monde. Mais gentiment bien sûr. » Ce que Lopez a compris : « Comme il l’a dit Roro, j’espère qu’on montrera un autre visage. La saison a été dégueulass­e. Elle se finit bien pour lui et pour nous. Donc, maintenant, on passe à autre chose. » Son président sur la même longueur d’onde : « Le bilan est mauvais, donc c’est bien de terminer sur cette note et de voir les joueurs partir en vacances avec un petit quelque chose de positif dans la tête, plutôt qu’avec des valises. » C’était peut-être le dernier cadeau du maître des lieux : au moins, la sortie est réussie.

 ?? Photo DR ?? « Salida a hombros. » Sorti sur les épaules de Penaud et Fofana, Aurélien Rougerie tire sa révérence sur une victoire à Mihelin.
Photo DR « Salida a hombros. » Sorti sur les épaules de Penaud et Fofana, Aurélien Rougerie tire sa révérence sur une victoire à Mihelin.

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