PRENDS GARDE, LEINSTER
QUEL QUE SOIT SON VISAGE, QUEL QUE SOIT L’ADVERSAIRE, LE RACING DÉGAGE ACTUELLEMENT UNE IRRÉPRESSIBLE IMPRESSION DE FORCE…
On vous entend déjà hurler. Ce titre est hors de propos, hein ? Diable, on admet volontiers qu’entre les vingt-trois Jiff du Lot-et-Garonne, tous broyés à La Rabine, et l’ossature du dernier grand chelem irlandais, il n’y a non pas un monde, mais une galaxie. On conçoit également que Mauricio Reggiardo, emporté par les excès propres à sa latinité, s’emballe un peu lorsqu’il parle des Racingmen de Vannes comme des « futurs champions d’Europe » (lire ci-contre). Malgrè tout, on ne peut aujourd’hui nier qu’il se dégage de cette équipe du Racing une irrépressible impression de force, de puissance et de sérénité. Antoine Miquel, le numéro 8 et capitaine agenais, concédait samedi soir : « À Vannes, nous avons encaissé quarante points et aurions pu en prendre beaucoup plus. À mes yeux, même l’équipe B du Racing pourrait être championne de France. » Entendez par là que dans le Morbihan, les deux Laurent avaient choisi d’aligner une équipe de réservistes où Anthony Tuitavake (3 sélections chez les All Blacks), Antonie Claassen (6 sélections chez les Bleus), Joe Rokocoko (68 sélections chez les Tout Noir) et Rémi Talès (24 sélections en équipe de France) étaient des soudards comme d’autres. Les boss ? Ils étaient, tel Camille Chat, en tribunes, ou plus majoritairement, embastillés au Plessis-Robinson où ils préparaient, depuis six jours déjà, la finale de la Champion’s Cup. Vu comme ça, on jurerait donc que le déplacement à Vannes n’a pas servi à grand chose en prévision de la grande messe de San Mamès. Au printemps 2018, le staff francilien a clairement segmenté son groupe en deux entités - l’un était dévolu à terminer la phase régulière de la meilleure façon qui soit, l’autre amené à disputer les matchs qui comptent - et il y a donc peu de chances pour que les dompteurs du Michelin ne soient pas reconduits en intégralité à Bilbao, samedi soir. À moins que…
IMHOFF EN DOUBLURE D’IRIBAREN ?
Écarté du quart et de la demi-finale de Champion’s Cup, l’Argentin Juan Imhoff est irrésistible depuis deux matchs et sème le trouble dans l’esprit des deux Laurent. Auteur d’un doublé à Vannes après en avoir signé un autre à Bordeaux, une semaine plus tôt, le Puma est dans une forme étincelante et, qu’on le veuille ou non, a retrouvé le niveau qui avait fait de lui l’un des meilleurs ailiers du Mondial 2015. Peut-il doubler Marc Andreu, décisif à chaque fois qu’il eut à endosser le maillot ciel et blanc ? Et comment, surtout, expliquer un tel souffle de rage de la part d’un joueur que l’on pensait résigné à suivre la fin de l’épopée européenne en tribunes ? Laurent Labit, le coach des trois-quarts franciliens, analyse : « Juan est un grand compétiteur. Il a été déçu parce qu’il a eu du mal à retrouver son meilleur niveau, à une époque de l’année. Dans un coin de sa tête, il pensait surtout faire son retour en équipe d’Argentine pour la tournée d’été mais les nouvelles qu’il a reçues du pays n’allaient pas forcément dans ce sens… Ça l’a beaucoup déçu. À un an de la Coupe du monde, il a néanmoins compris que ses performances de très haut niveau avec le Racing feront probablement changer d’avis les sélectionneurs argentins. » La tentation Imhoff est réelle. La montée en puissance d’Edwyn Maka, aussi. Le géant du Tonga (2,02 m et 148 kg), titulaire à l’époque où Donnacha Ryan souffrait des cervicales, a signé une performance à sa mesure en Bretagne, dégommant ses adversaires tel Bud Spencer dans «On l’appelle Trinita», marquant même un essai après avoir emporté trois défenseurs sur son dos. Titulaire à Bilbao, Maka ? Impossible, Nakarawa et Ryan sont indiscutables. Mais la place du colosse sur le banc de touche semble aujourd’hui s’imposer d’ellemême…
Enfin, au poste de numéro 9, la question du remplaçant de Teddy Iribaren n’a toujours pas été tranchée. Alors que l’on aurait pu croire que Xavier Chauveau tenait la pole, l’élongation dont il souffre l’a privé du déplacement en Bretagne. Du même coup, le jeune Antoine Gibert (buteur) a signé contre Agen sa performance la plus aboutie sous le maillot ciel et blanc, se repositionnant dans la hiérarchie. Coiffera-t-il Chauveau sur le poteau ? « Je n’en sais rien, sourit Labit. Moi, je me souviens simplement que nous avons été champions de France avec un demi de mêlée nommé Juan Imhoff… » Chiche ?