PUMAS : FORCES ET FAIBLESSES DES PATTES ARRIÈRES
SI LA CONNEXION ENTRE L’OUVREUR NICOLAS SANCHEZ ET SON TRIANGLE ARRIÈRE DE « SEPTISTES » CONSTITUE L’ATOUT OFFENSIF NUMÉRO UN DES PUMAS, IL CONSTITUE ÉGALEMENT LEUR PRINCIPALE FAIBLESSE EN MATIÈRE DE DÉFENSE. FORCÉMENT UNE PISTE À EXPLOITER POUR LES BLEUS
Après les Springboks, voici les Pumas. D’un gibier à un chasseur aux griffes acérées, la tâche n’en apparaît que plus ardue, qui plus est pour un Coq. On pourrait digresser ici des heures en paraphrasant les fables d’Ésope mais pour revenir au centre de notre propos, le rugby, il faudrait en effet être bien peu connaisseur des choses de ce jeu pour estimer que le match à venir sera plus « prenable » que le précédent.
En effet, si les Sud-Africains présentaient finalement des caractéristiques de puissance face auxquelles les Bleus sont plus ou moins bien préparés par le Top 14, le défi proposé par les Pumas sera complètement différent. Membres à part entière du Super Rugby et du Rugby Championship, les Argentins en ont en effet épousé tous les codes, notamment en matière d’intensité des courses et de répétition des tâches. En clair, si les Boks ont pu se complaire dans un jeu relativement frontal, les Argentins n’effectueront pas la même erreur face aux Bleus. Ne serait-ce que parce que Mario Ledesma et Gonzalo Quesada, leurs entraîneurs, connaissent par coeur les forces et faiblesses du XV de France.
Mais surtout parce que l’idée d’imposer un énorme rythme et un match de vitesse aux Tricolores correspond étroitement aux qualités des hommes de la pampa. « Les Argentins disposent d’un pack mobile, avec des avants très adroits qui sont capables de bien manipuler et se passer le ballon, un peu à la manière des All Blacks, expliquait récemment l’arrière irlandais Andrew Conway. Cela leur permet de pratiquer un jeu très alerte, où la connexion entre l’ouvreur Nicolas Sanchez et le triangle arrière fonctionne à merveille. »
DES STATISTIQUES OFFENSIVES DE TRÈS HAUT NIVEAU
Andrew Conway ne croyait pas si bien dire. Au vrai, la complicité entre le futur ouvreur du Stade français et les trois ex-internationaux à 7 que sont l’arrière Emiliano Boffelli et les ailiers Bautista Delguy et Ramiro Moyano ont constitué l’atout numéro un des Pumas durant le dernier Rugby Championship, statistiques à l’appui. D’abord en termes d’essais inscrits : Sanchez (4 réalisations), Delguy et Boffelli (3 chacun) pointent parmi les meilleurs marqueurs de la compétition. Surtout au rayon de la construction du jeu… En effet, l’arrière Boffelli est le joueur qui a le plus porté le ballon lors du dernier Four Nations (71 courses) tandis qu’au rayon des franchissements, Delguy (12) et Moyano (10) pointent dans le top 5. Une capacité à avancer et à faire tourner en bourrique les défenses qui se retrouve dans la sacro-sainte case « défenseurs battus » puisque, juste derrière le phénomène Naholo et ses 24 plaquages évités, Moyano et Boffelli se classent deuxièmes (23) à égalité avec Israel Folau, tandis que Delguy se classe au troisième rang à égalité avec Ben Smith (22). En clair, le triangle d’attaque argentin a battu au total 68 défenseurs, soit une moyenne de 10,8 plaquages « cassés » par match. Mieux que n’importe quelle autre nation… Des qualités individuelles qui ont donné lieu à des exploits individuels mémorables (à l’image de l’incroyable essai marqué par Ramiro Moyano face aux maîtres du monde néo-zélandais), mais qui furent surtout le fruit d’actions collectives de toute beauté, la plupart réalisées sous la baguette du chef d’orchestre Nicolas Sanchez. « Face à ces joueurs, Andy Farrell (entraîneur de la défense irlandaise, NDLR) nous a dit de rester connectés en permanence au partenaire qui défend à son intérieur, prolongeait Conway. Face à eux, si on défend de manière trop individuelle, il y a de fortes chances qu’on se fasse punir. » Une problématique qui sera fatalement la même pour les Bleus, surtout si les argentins parviennent à imposer le tempo suffisant pour placer physiquement les Tricolores au point de rupture...
70 % DES ESSAIS CONCÉDÉS SUR LES COULOIRS EXTÉRIEURS
De quoi se faire quelques cheveux blancs ? Heureusement, il y a un mais ! En effet, pour détonants qu’ils soient en attaque, ces mêmes joueurs ne sont pas des assurances tous risques en défense… La statistique est sans appel : durant le dernier Rugby Championship, 70 % des essais concédés par les Pumas l’ont été sur les extérieurs, où les Pumas ont concédé quelques courants d’air. Une faiblesse structurelle compensée par l’énorme activité du pack, qui ne peut malheureusement tout faire tout seul… En effet, conscients de leur déficit en termes de puissance pure (à l’image d’un Sanchez régulièrement protégé et placé dans les côtés fermés pour défendre face aux lancements de jeu après touche ou mêlée), les troisquarts argentins ont tendance à régulièrement monter en pointe pour moins subir sur la ligne d’avantage. Ce qui peut les contraindre à ouvrir des intervalles autour d’eux, relativement « faciles » à exploiter à condition d’arriver avec suffisamment de profondeur, et de faire preuve d’une technique individuelle suffisante. Les Bleus en seront-ils capables samedi prochain à Lille ? Ce sera en tout cas probablement la clé du match pour eux...