UN PAS EN AVANT, DEUX EN ARRIÈRE
C’est incompréhensible. Je ne me l’explique pas. » Dimanche midi, un membre de l’encadrement du XV de France n’en finissait plus de se ronger le cerveau en se remémorant le film d’un match raté sur toute la ligne. « L’équipe fait deux pas en avant et, immédiatement, trois pas en arrière. J’ai l’impression qu’après cette rencontre, nous repartons de zéro. » Le chantier semblait avancer lentement mais sûrement. Par-delà le résultat, le contenu de la prestation de samedi a dilapidé les quelques progrès entrevus et replongé les Bleus dans le doute. « Nous n’avons rien fait, déplorait ainsi Julien Bonnaire au coup de sifflet final. Il y a deux essais sur portés, mais dans le jeu, il n’y a pas eu de déplacement, pas d’organisation. Il n’y a rien eu du tout. » Les Tricolores ont livré un brouillon d’une rare médiocrité, manquant de précision, d’enthousiasme, d’intelligence. Le liant, l’intensité, l’engagement dans les duels, le combat dynamique : tout ou presque s’est révélé défaillant, défavorable. La défense, satisfaction jusqu’alors (89 % de réussite au plaquage), a souffert comme rarement face aux Fidjiens, auteurs de cinq essais dont trois refusés (80 %). L’attaque, surtout, inquiète.
En 2018, Guilhem Guirado et ses partenaires ont inscrit seulement dix-neuf essais, soit une petite moyenne de 1,7 réalisation par match quand les Blacks en marquent six ; plus proches de nous, l’Irlande et l’Ecosse en comptent environ 3,5, l’Angleterre et le pays de Galles 2,5…
ET TOUJOURS AUTANT D’INTERROGATIONS
Le collectif, s’il parvient à briller par intermittence comme sur le bijou en première main conclu par Teddy Thomas face aux Pumas, reste perfectible. Et, dans le concert international actuel, les talents français ne peuvent réaliser de miracles à chaque sortie. La rencontre de samedi l’a montré, cruellement : « Les Fidjiens sont individuellement meilleurs que nous, il ne faut pas se leurrer », commentait Julien Bonnaire. Le salut tricolore aurait dû passer -et passera à l’avenirpar une application et un investissement irréprochables. Les signes distinctifs d’une équipe sûre de sa force, de son fait, dotée de repères solides et de certitudes. Mais les changements d’entraîneurs et la spirale négative de résultats ne permettent pas aux troupes de Jacques Brunel d’avancer dans les meilleures conditions : « Ce match n’aide pas pour la confiance. L’ensemble de l’équipe a plongé », soufflait l’entraîneur de la touche. Une deuxième victoire consécutive aurait permis de valider un semblant d’avancée. Tout est à nouveau ébranlé. Dans un peu plus de deux mois, les Bleus commenceront le Tournoi avec encore beaucoup d’interrogations sur leur jeu, sur leur véritable niveau et même sur leur identité. La Coupe du monde approche à grand pas et les doutes restent tenaces.