SUR UN RYTHME ENDIABLÉ
TROISIÈME VICTOIRE EN TROIS MATCHS POUR LE RACING 92, AVEC EN PRIME LE BONUS OFFENSIF À L’ISSUE D’UNE RENCONTRE DISPUTÉE SUR UN RYTHME DE DINGUE. LE CLUB FRANCILIEN EST PLUS QUE JAMAIS SUR LA VOIE DE LA QUALIFICATION.
Mener une carrière de joueur de rugby professionnel n’est visiblement pas compatible avec une formation « Actors Studio ». Allez donc demander à Juan Imhoff ce qu’il en pense. Au bout d’une course supersonique, qui laissait Nigel Owens trop loin pour ne pas faire appel à la vidéo, l’international argentin ne maîtrisait pas le ballon à l’instant de l’aplatir dans l’en-but (31e). Et il a eu beau serrer les poings, lever les bras et tenter de jouer un rôle pas tout à fait naturel, au fond de lui, Imhoff savait pertinemment que sa célébration manquait de conviction. Et que l’arbitre gallois ne lui accorderait ni cet essai (31e), ni la palme d’or du meilleur acteur. Bien tenté quand même. Car, jusque-là, le scénario méritait une récompense. Tenez-vous bien, cet essai, s’il avait été accordé, c’était celui du bonus offensif… Durant la première demi-heure de jeu, la maîtrise des Racingmen s’est affichée au moins aussi grande que l’écran de « Paris La défense Arena », crachant ses pixels jusqu’à vous aveugler. Et ceux qui n’y ont vu que du feu, ce sont les Tigres de Leicester. Un premier essai de Virimi Vakatawa dès la 8e minute de jeu. Puis un second sur un lancement en première main signé de Juan Imhoff (13e), profitant de l’infériorité numérique des Tigers (carton jaune de Manu Tuilagi), le Racing récitait son rugby de mouvement, au coeur d’une folle intensité. Les Franciliens innovaient aussi certaines combinaisons en touche (5e), avec deux feintes de pivot pour finalement lancer Szarzewski dans l’intervalle. C’était beau, c’était bon. Dans la semaine précédent la rencontre, Laurent Labit avait prophétisé : « Si on tient le ballon, nous aurons des opportunités. C’est la plus mauvaise défense du championnat anglais. » Bien vu. Mais le coach des trois-quarts racingmen avait aussi mis ses joueurs en garde : « Quand ils ont le ballon, ils savent être dangereux. » Un exemple ? Même en infériorité numérique, même après une mêlée tournée dans le mauvais sens, les joueurs de Geordan Murphy ont su réduire la marque (Holmes, 16e), là aussi grâce à un essai en première main. Mais, rien ne semblait pouvoir stopper les velléités offensives franciliennes durant cette première mi-temps.
ORGIE OFFENSIVE
Porté encore une fois par son magicien Finn Russell, le Racing n’a ni cogité ni tergiversé lorsqu’il a fallu remettre la marche avant. Au contraire. Et c’est évidemment le génial écossais qui a permis à Simon Zebo, par un off-load venu de nulle part, d’inscrire le troisième essai (24e). Finalement, il n’aura suffit que de 34 minutes au Racing 92 pour décrocher - objectif avoué - le point de bonus offensif grâce à Baptiste Chouzenoux, élu à juste titre « Man of the match ». Son sourire fatigué à l’issue de la rencontre en disait long sur l’intensité des débats. « Il y a eu beaucoup de rythme en première période, a-t-il dit. Beaucoup d’essais également. C’est ce que nous voulions. Malheureusement, on a rendu trop de ballons aux Anglais. Ils ont même marqué un essai en première main alors qu’ils étaient en infériorité numérique. Ça, ce n’est pas possible. Heureusement, nous n’avons pas douté. Seulement, quand on regardait le score, nous n’avions pas tant d’avance que ça. En fait, nous n’avons pas su tuer le match. » Et rendu la rencontre encore plus excitante.
Jusqu’au bout, les Tigres de Leicester ont vendu chèrement leur peau. Et beaucoup joué. Au point de faire trembler « Paris La défense Arena ». Aux deux essais inscrits en première période, les joueurs de Murphy en ont ajouté deux autres par Tuilagi (42e) et Thompstone (69e) en deuxième période, synonyme de bonus offensif pour eux aussi. C’est donc bien une orgie offensive à laquelle les 16 538 spectateurs ont assisté. « Paris La défense Arena » a ça de bien qu’elle peut accoucher d’un festival en plein hiver. « C’était un vrai match de Coupe d’Europe, a souligné l’entraîneur des avants Laurent Travers. Seulement, quand on met de la vitesse et beaucoup de jeu, on s’expose forcément à des contres. » D’ajouter, entre félicité et agacement : « J’aurai aimé un peu plus de maîtrise en fin de match car lorsque nous affronterons d’autres équipes, cela ne pardonnera pas. » Certes, mais quel plaisir d’assister à une telle rencontre.