Midi Olympique a perdu sa Rolls
HENRI GATINEAU A ÉTÉ LE RESPONSABLE DE JACQUES VERDIER. IL NOUS CONFIE QUELQUES ANECDOTES DE LEUR COLLABORATION.
Celui qui avait fourni à Jacques le plus merveilleux des dons d’écriture a décidé de lui retirer brutalement la vie. Au plus mauvais moment, alors que, délivré des servitudes professionnelles, il allait pouvoir se livrer totalement à son exercice favori. Dans le cadre qu’il s’était choisi. Catastrophe ! Jacques était, dans le lot de ceux que j’avais baptisés « mes enfants terribles », le plus talentueux de tous. De nous tous ! Arme à double tranchant car elle impliquait de la part du responsable rienteur que j’étais un comportement délicat. J’ai du, pour cadrer cet hyper-doué dans une collectivité, avoir recours à des procédés inconfortables mais riches. Le plus aigu fut, alors qu’il pensait être l’envoyé spécial de la rédaction à l’occasion d’une tournée dans l’hémisphère Sud, de lui signifier que mon choix s’était porté sur un de ses camarades... Ma porte étant ouverte en permanence, il vint courageusement solliciter des explications qui ne lui convirent pas, bien sûr.
DANS L’INTÉRÊT DU JOURNAL
Notre entretien se conclut sur la déclaration suivante : « tu peux estimer qu’il s’agit d’une injustice mais que ma décision a été prise dans l’intérêt du journal et uniquement
dans cet intérêt ». Jacques avait été profondément blessé dans son orgueil (dans le sens le plus noble du terme) et il m’en a longtemps voulu mais… la maturité et la réflexion aidant il réalisa que j’avais privilégié le travail ingrat sur le terrain de l’information à la qualité de l’expression. Et je compris qu’il m’avait pardonné lorsqu’il soumit à mon appréciation le manuscrit de son premier roman : « Il a neigé sur Paloumères ». Mon avis, dénué de complaisance, fut tout à la fois dérangeant mais fortement encourageant. Le responsable que j’étais s’efforçait, en toutes circonstances, de provoquer une prise de conscience.
AU PARADIS DES PLUMITIFS
Avec le temps (citation du poète-chanteur préféré de Jacques) les choses se mirent en ordre et j’en eu la preuve formelle à la lecture de la dédicace de son « Rugby d’Autrefois » : A vous, Henri, avec toute ma reconnaissance et mon amitié » Fermons le ban !
J’ai sur mon bureau et en permanence sous les yeux le cliché, encadré, d’Alain Lafay représentant, un symbole, la passation de pouvoirs. Raymond Sautet ouvre la marche. Je suis dans son village. Henri Nayrou vient ensuite et Jacques ferme la marche. Dans le paradis des plumitifs, où il réside depuis un certain temps, Raymond, son mentor qui lui ouvrit la porte du journal a dû être surpris d’accueillir son filleul. Si tôt ! Très tôt.
La Rolls Royce a rejoint la locomotive. Nous ne les oublierons jamais.