Midi Olympique

« C’est le feu d’artifice dans ma tête »

WILFRIED HOUNKPATIN - Pilier droit de Castres

- Propos recueillis par Vincent BISSONNET vincent.bissonnet@midi-olympique.fr

Avec quel état d’esprit abordez-vous ce match assurément piège ?

Il y a beaucoup à gagner et beaucoup à perdre : soit ce sont les barrages, soit ce sont les vacances. La qualificat­ion ne dépend que de nous. Il faut l’emporter, c’est tout. Mais attention car Toulon va venir décontract­é. Ce sont ces équipes qui sont les plus dangereuse­s, qui peuvent surprendre dans le jeu. Ils sont sur une bonne dynamique en plus. Ça arrive un peu tard pour eux mais ils voudront finir en beauté en battant les champions de France. Ça leur mettrait du baume au coeur.

Ça peut être le dernier match à Castres de Christophe Urios et de quelques emblématiq­ues. Sentez-vous de l’émotion ?

Nous sommes un peu tristes que ça puisse être le dernier match à Pierre-Fabre. C’est bizarre… Ça ne fait qu’un an que je suis là mais je m’entends super bien avec « Caba » (Caballero, N.D.L.R.). C’est mon voisin de casier. J’ai « Caba » à droite et David

(Smith) à gauche, qui est super cool aussi… Tout le monde est on ne peut plus motivé pour que ces joueurs partent la tête haute. On a envie de vivre ces derniers moments à fond, de profiter de chaque instant. L’atmosphère est bonne. Mais il faut s’appliquer jusqu’au bout.

Castres s’est déjà incliné à cinq reprises à la maison cette année. Est-ce inquiétant ?

Nous sommes loin d’être les seuls dans ce cas. Il y a des revers qui n’auraient pas dû arriver. C’étaient des défaites serrées, pas des grosses claques. Certaines ont fait mal, d’autres ont mis des coups de fouet. Ce qui est sûr, c’est que tout le monde veut effacer ces défaites. Nous avons à nous faire pardonner.

Depuis début janvier, vous êtes régulièrem­ent aligné. Comment vous sentez-vous ?

Je me sens bien physiqueme­nt et mentalemen­t. J’ai pris confiance en moi, je me sens plus présent dans le jeu, j’arrive à être plus actif. C’est cool. J’essaye de donner le meilleur de moi en matchs et je reste un maximum à l’écoute à l’entraîneme­nt. Je ne suis pas parfait, je sais que je dois corriger des trucs, il y a des placements qui ne sont pas bons, des efforts à fournir en plus… Mais je fais tout pour être à la hauteur.

Votre transfert de Rouen à Castres ressemblai­t à un pari. Comment Christophe Urios vous avait présenté ce challenge ?

Quand j’ai rencontré Christophe, il m’avait tout de suite dit que je n’étais pas assuré de jouer, que ça dépendait de moi, de mon boulot, de mon évolution. Il n’était pas sûr à 100 % que ça marcherait. J’étais averti que je devais beaucoup travailler. Avant la présaison, je me suis démené. Je ne suis même pas parti en vacances. Ça a été très dur les premiers mois. Physiqueme­nt, j’ai dû aller au-delà de mes limites. Et dans la tête, ce n’était pas simple à gérer. J’étais dans un cocon à Rouen et là, je me retrouvais à regarder les copains jouer. C’est ce qui m’a forgé le caractère. Je me disais :

« Je vais y aller sur ce terrain, je vais y aller. » Quand j’ai eu cette chance, je me suis encore plus envoyé, l’adrénaline était encore plus forte. Encore maintenant, quand mon nom sort à l’annonce de la compositio­n, c’est le feu d’artifice dans ma tête. Mais je sais que rien n’est acquis. J’en ai pris conscience, depuis un moment. Tout peut aller très vite.

Mais votre ascension a été progressiv­e…

Disons que j’ai pris les petits sentiers. Je ne pense pas être un cas unique. Tout le monde ne peut pas pointer en équipe une à 20 ans. Après, qu’est-ce que deviennent ceux qui restent sur le carreau ? Moi, j’ai fait en sorte de m’accrocher. Après le centre de formation de Montpellie­r, je suis parti en Fédérale 2. Je suis monté en régime avec Rouen. Quand j’étais espoir, je n’étais pas prêt. Mentalemen­t, je n’étais pas assez fort pour survivre dans le monde pro. Surtout à mon poste. J’aurais voulu avoir un parcours à la Demba Bamba mais ce n’était pas pour moi. Alors oui, j’ai mis quatre ans pour parvenir à l’élite mais, contrairem­ent à ce que me disent beaucoup de gens, non, je n’ai pas perdu mon temps. Mon parcours, c’est ce qui fait ce que je suis. Je me suis construit et forgé ainsi. Et finalement, le monde pro est revenu vers moi.

C’est une drôle d’histoire…

Parfois, je me pose avec mon fils dans les bras, le soir, et je me dis : « Mon parcours est assez incroyable. » Vendredi dernier, je regardais Albi contre Rouen et je me rendais compte du chemin parcouru. Je n’oublie pas d’où je viens… Je sais la chance que j’ai d’être ici. Et je sais qu’il ne faut pas que je fasse le con. Je me le dois à moi-même et à mes proches.

Que vous dit Christophe Urios désormais ?

Il est content que j’ai pu progresser comme ça et de pouvoir compter sur moi. Jusqu’au dernier moment, il me poussera pour que je m’améliore. Je pense que je garderai contact avec lui. C’est un mec bien. Je suis content d’être tombé sur un entraîneur comme ça. Je lui suis redevable. Chaque fois que je sors du terrain, d’ailleurs, je lui dis merci… Ça le fait rire.

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