Midi Olympique

« Brive aura des ballons pourris à jouer »

- Propos recueillis par David BOURNIQUEL

En préambule, voyez-vous un favori se dégager nettement avant cette confrontat­ion ?

Non, j’imagine un match très serré. Quand on analyse l’histoire de Brive et Bayonne sur les trente matchs de la saison régulière, on s’aperçoit que les deux équipes ont des lignes statistiqu­es fortes qui s’annulent. Selon moi, si les défenses prennent le pas sur les attaques, les Bayonnais auront alors un avantage. Ils encaissent un peu moins de points que les Brivistes. Au niveau de l’attaque, c’est l’inverse. Ce sont les Brivistes qui sont un peu plus performant­s. Mais dans tous les cas, cela est très serré, ça se joue toujours à deux ou trois points de différence. Après, il y aura des temps forts et des temps faibles que les deux équipes devront gérer au mieux. Statistiqu­ement, on sait par exemple que les Brivistes ont souvent un gros coup de fouet entre la 20e et la 40e minute. Ils inscrivent beaucoup de leurs essais pendant cette période de leurs matchs. Les Bayonnais, eux, sont plutôt performant­s durant les vingt dernières minutes de leurs rencontres. Cela s’est encore vérifié la semaine dernière contre Oyonnax. La conquête aussi sera équilibrée entre ces deux formations qui maîtrisent très bien tous les secteurs de jeu : la touche bayonnaise remporte 83,7 % de ses ballons ; celle de Brive tourne à 85,4 %. Reste la question de la mêlée ? Là, Brive a peut-être un petit avantage. Mais je vois vraiment un match serré, qui pourrait, pourquoi pas, se terminer en prolongati­ons !

Si les deux équipes sont si proches, quelle pourrait être la clé du match, alors ?

La gestion des rucks. Bayonne a la capacité de ralentir les ballons et

Brive va devoir s’adapter. En moyenne, les Brivistes mettent 3,5 secondes pour éjecter le ballon d’un ruck. Or, lorsque l’on joue contre Bayonne, il faut 3,7 secondes en moyenne pour que la balle soit exploitabl­e. 0,2 seconde, cela paraît peu, mais à ce niveau, c’est beaucoup ! Si Bayonne joue à son niveau, Brive aura des ballons pourris à jouer. Les Basques disposent de gratteurs exceptionn­els dans leurs rangs, Abdellatif Boutaty en tête. D’ailleurs, « Abdel » Boutaty n’a pas son pareil pour pourrir aussi les ballons portés. Si vous enclenchez un ballon porté dans sa zone, vous pouvez être certain que vous n’irez pas au bout de votre action. Dans toutes ces actions ingrates et peu visibles du grand public, Boutaty est exceptionn­el.

On parle beaucoup d’une opposition de style entre ces deux formations…

Oui, et à raison. Bayonne, c’est une équipe de contre-attaque, une formation qui se régale dans la désorganis­ation, sur les ballons de récupérati­on, avec des troisquart­s magiciens et un triangle du fond très véloce. On l’a bien vu contre Oyonnax, si on leur laisse un peu d’espace et de la confiance, c’est très vite très dangereux. Ceci dit, les Corréziens sont les maîtres dans la production d’un rugby à zéro risque. Ils sont capables de cantonner le jeu entre les deux lignes des 15 mètres et de n’en sortir que pour porter l‘estocade. Les Corréziens sont capables de ne pas s’exposer et d’attendre les fautes de l‘autre pour se nourrir. Ils usent avec un jeu d’avant dans le sens sur deux ou trois temps de jeu. L’opposition promet vraiment de faire des étincelles. Ce sera tactiqueme­nt très intéressan­t.

Plus que le collectif, voyez-vous des hommes marquer cette finale ?

Je serai très attentif au duel entre Saïd Hirèche et Antoine Battut. Ces deux joueurs sont tellement importants dans le collectif de leurs équipes respective­s… Ils ont un tel leadership que si l’un d’eux venait à ne pas évoluer à son potentiel maximum, il pourrait entraîner toute son équipe vers le fond. Ce sont deux joueurs très durs au mal, qui ont une présence énorme. Un duel de coq. Mais de beaux coqs !

Pensez-vous que le fait que Bayonne ait joué un match de plus durant cette phase finale (le barrage gagné contre Nevers, N.D.L.R.) puisse avoir une incidence sur le résultat ?

Honnêtemen­t, non. Quand on voit la qualité de la deuxième mi-temps livrée par les Bayonnais à Oyonnax, je ne suis pas inquiet sur le fait qu’ils aient complèteme­nt digéré les efforts supplément­aires consentis contre nous. Bayonne a vécu un rêve en demi-finale, cela va les porter, d’autant plus qu’il y aura tout le Pays basque dans les tribunes. Par contre, il y a un aspect mental qui est selon moi très important et dont on ne maîtrise pas réellement les contours : laquelle de ces deux équipes veut le plus atteindre le Top 14 ? Les Brivistes ne sont-ils pas plus programmés pour monter cette saison ? Il y a une question importante à laquelle les joueurs veulent avoir une réponse : quelle confiance puis-je avoir en l’avenir ? Que va-t-il se passer si mon équipe monte ? Il faut qu’il y ait eu, en amont, une vraie gestion de la part de la gouvernanc­e pour rassurer les hommes, montrer qu’il y a une vraie vision d’avenir. Si des joueurs arrivent sur le pré du Hameau en étant juste contents d’être là et en ayant le sentiment d’avoir fini le travail, alors ils peuvent lâcher mentalemen­t. Et entraîner leur équipe dans leur chute.

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