Midi Olympique

MARO ITOJE, LA TÊTE ET LES BRAS

- Par Nicolas ZANARDI nicolas.zanardi@midi-olympique.fr

SI LA DÉFENSE DES SARACENS S’EST AVÉRÉE DÉTERMINAN­TE EN FINALE DE CHAMPIONS CUP, CELLE-CI DOIT BEAUCOUP AU TRAVAIL DE SON DEUXIÈME LIGNE, DONT LES INTELLIGEN­TES INTERVENTI­ONS DANS LES RUCKS ONT OBLIGÉ LES ATTAQUANTS DU LEINSTER À SE SURCONSOMM­ER. ANALYSE ET EXPLICATIO­NS.

Tous ceux qui ont assisté à la dernière finale de Champions Cup entre les Saracens et le Leinster auront nécessaire­ment été frappés par une impression : celle de voir, au fur et à mesure de la rencontre, les Irlandais attaquer en perpétuel sous-nombre, au pont de devoir se cantonner à un jeu de possession à une passe fatalement rendu inefficace par la dimension physique supérieure des joueurs anglais. De quoi se poser la question : comment les coéquipier­s d’Owen Farrell sontils parvenus à se retrouver presque systématiq­uement en supériorit­é numérique face aux assauts irlandais ? On peut bien sûr, en premier lieu, évoquer l’excellence de la condition physique des Sarries, capables de se relever et de se replacer à une vitesse hallucinan­te, et cela même lors des rares situations de franche avancée du Leinster. Une explicatio­n certes tout à fait recevable, mais qui ne saurait suffire à elle seule. D’autant plus que les Irlandais sont également réputés pour être une des équipes les plus « fit » d’Europe, et avaient en outre sur cette rencontre l’avantage de la fraîcheur…

De fait, c’est bien au rayon technico-tactique qu’il s’agit de rechercher l’explicatio­n. Laquelle s’est manifestée, après une deuxième vision du match, par une surconsomm­ation des joueurs irlandais dans les phases de rucks offensifs. Une inefficaci­té inhabituel­le, qui doit évidemment beaucoup à la densité physique des George, Skelton, Itoje ou Vunipola. Mais également à une bonne part de malice… Il fut en effet patent que, sur cette rencontre, les Anglais ont utilisé quelques artifices auxquels les

Irlandais ne s’attendaien­t pas, à commencer par un Maro Itoje diablement malin…

UTILISATIO­N INTELLIGEN­TE DE LA RÈGLE

Qu’a fait le deuxième ligne internatio­nal, au juste ? Oh, rien d’autre qu’une utilisatio­n subtile du règlement… Ainsi, sur certaines situations où les Irlandais semblaient avoir gagné le ballon, Itoje a à plusieurs reprises semé une belle pagaille. Non pas en les engageant des contre-rucks pour les repousser dans l’axe, mais en cherchant systématiq­uement à faire tomber le joueur adverse situé en « tête de pont », en le tirant vers l’avant. La manoeuvre obligeant les partenaire­s de se dernier à se porter au soutien, ce qui eut pour effet de consommer beaucoup plus de joueurs que prévu, à l’image de l’exemple ci-dessus, qui mobilisa quatre soutiens offensifs au lieu d’un seul ! Une manoeuvre certes discutable du point de vue de l’esprit du jeu, mais que rien n’interdit dans le règlement. En effet, l’alinéa 16 de la règle 15 le stipule en toutes lettres : dans un ruck, un joueur ne doit pas

- Ramasser le ballon avec leurs jambes.

- Écrouler intentionn­ellement ou sauter sur le ruck.

- Marcher intentionn­ellement sur un autre joueur.

- Tomber au-dessus du ballon quand celui-ci sort du ruck. - Botter, ou tenter de botter, le ballon hors du ruck.

Rien qui interdise donc de tirer un joueur vers le sol… Un coup de Jarnac grandeur nature qui a fichtremen­t bien fonctionné, au moment le plus important de la saison… De quoi donner des idées avant les phases finales qui s’annoncent, et pourquoi pas de la prochaine Coupe du monde ? Réponse dans les prochaines semaines. ■

 ??  ?? Ensuite ? Itoje poursuit son travail, en restant scrupuleus­ement dans l’axe du ruck, de façon à ne pas être sanctionné par M. Garcès. L’Anglais parvient ainsi à « tirer » encore trois adversaire­s, dont un qu’il parvient à carrément éliminer en le propulsant au sol. Au final, d’un ruck qui aurait pu ne mobiliser que deux joueurs, Itoje parvient à en « griller » cinq. Plus du tout la même histoire pour l’attaque, privée de trois soutiens potentiels…
Ensuite ? Itoje poursuit son travail, en restant scrupuleus­ement dans l’axe du ruck, de façon à ne pas être sanctionné par M. Garcès. L’Anglais parvient ainsi à « tirer » encore trois adversaire­s, dont un qu’il parvient à carrément éliminer en le propulsant au sol. Au final, d’un ruck qui aurait pu ne mobiliser que deux joueurs, Itoje parvient à en « griller » cinq. Plus du tout la même histoire pour l’attaque, privée de trois soutiens potentiels…
 ??  ?? Sur une séquence du Leinster, le ballon semble parfaiteme­nt libéré et protégé au sol, avec un joueur placé en position de « gripping ». Maro Itoje semble donc logiquemen­t arriver trop tard pour contester le ballon. Mais c’est mal connaître l’Anglais… Plutôt que d’amorcer un contre-ruck, le deuxième ligne des Saracens choisit plutôt de tirer au sol le premier soutien, obligeant un autre de ses partenaire­s à venir se consommer.
Sur une séquence du Leinster, le ballon semble parfaiteme­nt libéré et protégé au sol, avec un joueur placé en position de « gripping ». Maro Itoje semble donc logiquemen­t arriver trop tard pour contester le ballon. Mais c’est mal connaître l’Anglais… Plutôt que d’amorcer un contre-ruck, le deuxième ligne des Saracens choisit plutôt de tirer au sol le premier soutien, obligeant un autre de ses partenaire­s à venir se consommer.
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