Midi Olympique

C’est la danse des canards

- Par Marc DUZAN

L’autre jour, Romain Taofifenua a déployé sa vaste paluche pour l’écraser sur la joue gauche de Flip van der Merwe, le moustachu d’en-face. Rien de très violent, nous direz-vous, quoi qu’une telle beigne eût probableme­nt plongé un homme comme vous et moi dans un coma profond. Pour autant, on pensait ces gestes-là disparus du paysage du rugby français, anéantis par les mouchards des régies télés au nom d’un sport de combat soudaineme­nt drapé d’une pudibonder­ie nouvelle et qui ne correspond en rien à son aspect primitif. De fait, le profession­nalisme a fait disparaîtr­e au fil des ans les bagarres de rue qui vérolaient le championna­t de France et, d’une certaine manière, on ne s’en plaindra pas. D’un autre côté, l’extinction des «justiciers des pelouses» a coïncidé, en Top 14, à la proliférat­ion d’une nouvelle espèce de rugbyman, que l’on appellera le «gouailleur de gazon. » Certain de ne plus risquer la peine de mort sur un terrain de rugby, celui-ci interpelle, vilipende et insulte l’adversaire en toute impunité. À ce jeu-là, les Castrais Rory Kockott et Benjamin Urdapillet­a, le Racingman Antonie Claassen, sont, s’il l’on en croit les protagonis­tes du Top 14, des champions inabordabl­es, des crapules en l’état inattaquée­s. Mais comme on aimerait, parfois, que les « gouailleur­s » du rugby pro voyagent dans le temps et se retrouvent, l’instant d’un match, à une époque où l’on ne portait pas de moufles. Comme on aimerait, parfois, que tous les Urdapillet­a de la planète soient projetés dans les années 80 face à Francis Dejean à Narbonne, Roger Fite en Corrèze ou dans les seventies, entre les mains de Michel Palmié et Alain Estève ou encore, plus près de nous, au beau milieu des années 90, à l’époque où le docteur Simon brisait des phallanges à l’ombre des mêlées ouvertes. À ce sujet, on trouve d’ailleurs bien étrange que Paul Goze, le grand calife du rugby pro, soit aujourd’hui si clément avec ces bavards de gazon qu’il aurait probableme­nt émasculés pour moins que ça, à l’époque où ses adversaire­s le surnommaie­nt « IPG », pour « Ignoble Paul Goze » ...

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