Midi Olympique

VERS UNE PÉRIODE D’AUSTÉRITÉ ?

PAR DELÀ LES PERTES DIRECTES LIÉES À LA SUSPENSION DES COMPÉTITIO­NS, LE RUGBY PROFESSION­NEL FRANÇAIS S’INQUIÈTE DES CONSÉQUENC­ES À LONG TERME SUR LES RECETTES DE BILLETTERI­E ET DE PARTENARIA­TS.

- Par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

Depuis l’avènement du profession­nalisme, le rugby français s’est développé de façon exponentie­lle. Toujours plus vite, toujours plus haut, toujours plus fort. Ces dernières années, la Ligue Nationale de Rugby n’a cessé de se gargariser à grands coups de communiqué­s pour souligner ici un record d’affluence, là-bas une somme jamais atteinte pour la vente de ses droits TV. Et que dire de l’inflation des salaires des principaux acteurs de ce jeu ? La menace d’une croissance trop rapide planait depuis quelques temps déjà. Certains observateu­rs mettaient en garde. Mais nul n’avait prédit une pandémie aussi ravageuse que soudaine. Le Coronaviru­s est en passe de frapper fort. Très fort. Évidemment, la première inquiétude — légitime ou non ? — des présidents de club est de rejouer le plus vite possible. Jouer pour remplir les stades mais surtout les caisses. Seulement voilà, la deuxième vague s’annonce immense. Un véritable tsunami appelant à une longue période d’austérité. Les entreprise­s partenaire­s des clubs seront forcément impactées. La priorité sera alors de sauver les emplois, sûrement pas de pérenniser les liens de sponsoring. « La situation avec les partenaire­s et les abonnés pourrait vite devenir compliquée », confirme le président du SU Agen Jean-François Fonteneau. « La baisse des revenus liée aux partenaria­ts, elle est évidente, juge de son côté le Directeur Général du Stade français Thomas Lombard. Je ne vois pas comment elle ne pourrait pas arriver. On se demande comment on va faire pour payer nos joueurs sur la durée et j’imagine que toutes les entreprise­s ont les mêmes problémati­ques. Sachant que, pour beaucoup d’entre elles, elles génèrent plus d’économie que nous. » « Tout le monde va prendre de plein fouet le deuxième effet Kiss Kool, ajoute le président du Biarritz Olympique Jean-Baptiste Aldigé.

Tous les acteurs économique­s vont souffrir et quand nous allons nous retourner vers nos partenaire­s, certains auront peut-être mis la clé sous la porte. Pour les autres, l’achat d’image et de visibilité sera forcément jugé secondaire. » Le BO a d’ailleurs décidé de tendre la main à ses partenaire­s.

« Nous avons décidé de ne pas prélever les mensualité­s contractue­lles tant que nous ne rejouerons pas, explique Aldigé. Nous allons les décaler dans le temps. » Et le patron du club basque de justifier : « Il y a une grande différence entre les clubs de Top 14 et ceux de Pro D2. Pour ce qui nous concerne, les mesures mises en place par le gouverneme­nt pour le chômage partiel vont nous permettre d’être quasiment remboursés intégralem­ent de nos charges salariales. Ce qui ne sera pas le cas pour les clubs de Top 14 qui auront à payer un gros différenti­el. Ensuite, nous n’avons pas du tout en Pro D2 les mêmes recettes de billetteri­e qu’en Top 14. Nous aurons donc moins à souffrir de la suspension des compétitio­ns. »

LE BUDGET LOISIRS DES MÉNAGES REVU À LA BAISSE

Justement, la question des affluences dans les stades se posera aussi, forcément. Il est de coutume que le budget loisir des Français soit le premier à subir les crises financière­s. « La campagne d’abonnement­s sera difficile, assure

Lombard. De notre côté, nous avions envisagé de revoir les tarifs à la baisse avant l’arrivée de cette crise. Nous allons sûrement encore devoir faire des ajustement­s. Mais décemment, peut-on aujourd’hui demander aux gens de se réabonner ? Leur priorité, après une crise qui va frapper tout le monde, ne sera pas de prendre un abonnement à JeanBouin ou ailleurs. » Autant dire que l’avenir du rugby profession­nel français s’annonce plutôt sombre. ■

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