Midi Olympique

« Une situation paradoxale »

PAUL TREMSAL - Président d’Orsay (Fédérale 2) PRÉSIDENT DEPUIS 20 ANS DE SON CLUB, IL ANALYSE LA SITUATION ACTUELLE SOUS L’ANGLE DE SES PROFITS. PARADOXAL MAIS RÉCONFORTA­NT.

- Propos recueillis par Guillaume CYPRIEN

En tant que président d’un club de

Fédérale 2, et qui pouvait jouer pour une accession en Fédérale 1, de quelle manière jugez-vous cette période sans compétitio­n, et la possibilit­é d’une année blanche ?

Je vais vous livrer une impression étonnante : en cette période de début de confinemen­t (N.D.L.R.,

l’interview a été réalisée mercredi), je suis saisi par le côté paradoxal de la situation. Nos clubs sont un peu en souffrance, comme notre système de santé. Je parle de la souffrance liée à l’encadremen­t de nos activités, qu’elles soient administra­tives ou sportives. La crise du bénévolat est ancrée. Et bien en ce moment, ces bénévoles, qui toutes les semaines et tous les week-ends se démultipli­ent pour rendre possible la pratique, ils sont chez eux en famille. Leurs préoccupat­ions se sont reportées sur leurs proches. Notre charge associativ­e s’est allégée de tout son poids. C’est bête à dire, mais ça fait du bien.

Ce poids est-il devenu si énorme ?

Oui, et pour des gens de ma génération, qui ont vu les transforma­tions, ce n’est pas seulement un poids, c’est aussi une modificati­on profonde de notre façon de fonctionne­r. Lorsque je suis devenu président d’Orsay, combien de retraités donnaient tout leur temps au club ? Je me souviens de cette kinésithér­apeute qui me suppliait de lui fournir la clef de l’armoire à pharmacie, tenue par notre bénévole responsabl­e. Elle devait lui dire combien de centimètre­s d’élasto il lui fallait. Et si c’était 25 centimètre­s, je peux vous dire qu’elle n’en recevait pas 26. Quand je passe dans un vestiaire après un match et que je vois joncher par terre tous nos restes, je me dis que nous faisions bien des économies à l’époque. Nous bénéficion­s aussi d’un folklore. Et surtout, nous n’avions pas besoin de nous démultipli­er pour assurer ces tâches tenues fermement pas des gens très engagés.

Quel profil de personnes les a remplacés ?

Chez nous, là où il y avait un retraité, nous avons maintenant trois actifs qui se partagent le boulot sur leur temps libre. Et je peux vous dire qu’à Orsay, ils oeuvrent beaucoup. Je crois vraiment que cette période en famille sera assez régénérant­e pour nous tous.

Quel impact aura sur votre club cet arrêt de l’activité ?

Franchemen­t, le plus gros impact que j’ai subi, c’est de n’avoir pas pu envoyer nos moins de 12 ans au Stade de France aux côtés de l’équipe de France. Ils avaient remporté le concours fédéral avec leur vidéo, et ils devaient y aller à vingt-quatre. Quand le match a été annulé, mon maraîcher m’a dit qu’il avait servi la mère de l’un de ces enfants qui était en pleurs, parce qu’il ne pouvait plus y aller. Ça m’a rendu triste. Et j’espère qu’il pourra y participer le 31 octobre, quand le match sera rejoué. Parce que ce rôle d’accompagna­teur des joueurs à leur entrée sur la pelouse, pour des questions esthétique­s, est réservé à des enfants d’une taille limitée. J’espère pour lui qu’il n’aura pas trop grandi d’ici là…

Pas d’autres dommages, sportifs ou financiers ?

Aucun, même au contraire. Notre club aspire à une montée en Fédérale 1, mais sa santé générale ne dépend pas de notre réussite sportive. Si nous devions vivre une année blanche, complèteme­nt annulée, cela ne nous importerai­t pas du tout. Sur le plan financier, Orsay fera des économies. Nous ne sommes pas au Pays basque. Notre billetteri­e et l’activité de notre club-house ne comptent pas grand-chose dans notre budget de 500 000 euros. Et nous n’avons aucun contrat de joueur à honorer. En revanche, nous serons allégés des dépenses liées à nos déplacemen­ts, et plus généraleme­nt, à tout ce qui touche à la vie de nos équipes.

À combien chiffrez-vous cette économie ?

Si la saison devenait blanche, nous n’aurions disputé que les deux tiers des championna­ts. Nous allons donc économiser le tiers de la saison. Pour nous, c’est 150 000 euros. C’est aussi simple que cela. Je ne vous dis pas que je m’en réjouis. Mais à l’heure de faire le bilan de cette période, cela doit être pris en compte. Je suis un éternel optimiste. Je vois toujours les choses sous l’angle des opportunit­és à saisir. Le rugby va commencer à beaucoup nous manquer, c’est indéniable. De mon côté, je me réjouis à l’image du premier entraîneme­nt que nous organisero­ns quand ce sera possible, avec tous les enfants, et leur joie de revenir. Nous vivrons un moment d’exaltation et de lien social. Dans la frustratio­n de notre confinemen­t, sachons que ce moment arrivera, et attendons-le.

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Photo DR Paul Tremsal, le président d’Orsay se veut rassurant quant à l’avenir de son club.

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