La culture club, force et limite
« La question qui fâche : en 2021, vous préférez voir votre club favori sacré champion de France ou le XV de France faire le Grand Chelem ? » Les internautes de rugbyrama.fr se sont vus proposer ce dilemme la semaine dernière. À 58 %, plus de 17 000 amateurs ont voté pour le Bouclier de Brennus. Une consultation comme le témoignage de la culture club propre au rugby français. « Je ne suis pas du tout surpris, réagit Jo Maso. Dans les pays anglo-saxons, la locomotive, c’est l’équipe nationale. L’équipe de France peut générer des audiences et un enthousiasme extraordinaires mais les supporters sont avant tout derrière leur club. » L’explication est à trouver dans l’histoire : « C’est hérité de la culture du rugby des villages. Le Top 14 est extrêmement suivi. Le public a accepté la mutation de notre rugby et y a adhéré. Ça, on ne pourra pas le changer. » Même si Philippe Dintrans le déplore : « Je pensais que ça allait évoluer d’une autre façon. J’aime bien le système néo-zélandais et j’aurais apprécié de voir la création d’une Coupe des provinces. » « Si le système des provinces était passé, les clubs ne seraient-ils pas à leur place et la relation ne se passerait-elle pas mieux ? », interroge d’ailleurs Pierre Villepreux. Médiatisation indéniable mais jeu trop stéréotypé, calendrier chargé et effectif internationalisé : l’élite du rugby peut déplaire. « Les clubs génèrent plus une image commerciale. À mes yeux, ils ne représentant plus vraiment de territoire », souffle Philippe Dintrans. « On ne peut pas accuser le Top 14 de toutes les calamités non plus », tempère Richard Astre. Jean-Pierre Garuet, par-delà la nostalgie, le reconnaît : « Le rugby professionnel a tout de même amené de la valeur à notre sport. » Qu’on le veuille ou non, rien ou presque ne remplace des confrontations entre voisins : « Dans l’hémisphère Sud, avec la pandémie, ils ont été amenés à rejouer des compétitions nationales. La compétition était dévalorisée quand elle mélangeait les SudAfricains, les Australiens… Là, le public est revenu. »