Midi Olympique

« Finn Russell, l’élément déterminan­t »

- Propos recueillis par Jérémy FADAT jeremy.fadat@midi-olympique.fr

UGO MOLA - Manager de Toulouse VAINQUEURS D’UNE ÉQUIPE DU RACING REMANIÉE SAMEDI SOIR, LES ROUGE ET NOIR S’ÉTAIENT RÉCEMMENT INCLINÉS FACE À EXETER, EN DEMI-FINALE DE CHAMPIONS CUP. LE TECHNCIEN EST DONC BIEN PLACÉ POUR ANALYSER LES FORCES EN PRÉSENCE AVANT LE DUEL TANT ATTENDU ENTRE CES DEUX ÉQUIPES.

L’équipe alignée par le Racing 92 samedi soir était fortement remaniée mais ce match a-t-il pu apporter des enseigneme­nts à vos yeux avant la finale contre Exeter ?

Honnêtemen­t, non. On peut toujours considérer qu’il y avait deux ou trois joueurs qui ont débuté contre nous et qui sont susceptibl­es d’être dans l’équipe de départ en finale. Mais le staff avait fortement remanié sa compositio­n pour ménager et protéger ceux qui vont démarrer. Donc, forcément, on ne peut pas en tirer des enseigneme­nts précis sur le plan sportif. On sait tous que le Racing présentera un tout autre visage face aux Chiefs. C’est une évidence.

Exeter sortira d’une demi-finale de Premiershi­p, avec son équipe type, quand le Racing a donc fait tourner contre Toulouse lors du week-end précédent. Cela peut-il avoir un impact ?

C’est le contexte qui a dicté ces choix. L’enjeu n’était pas du tout le même pour les deux clubs. D’un côté, il y avait une demi-finale de championna­t ; de l’autre, un match de phase régulière comptant pour la quatrième journée… Sincèremen­t, à la place de Laurent Travers, j’aurais été dans les mêmes dispositio­ns que lui et j’aurais aussi ménagé mon groupe.

Y a-t-il quand même un risque de manque de rythme ?

Avant de parler de ça, il faut juste replacer les choses dans le contexte sanitaire actuel. Disons que le staff du Racing ne pouvait pas se permettre de prendre un risque supplément­aire, qui existe déjà à tout moment. Je vous rappelle que la possibilit­é de se retrouver avec un effectif amoindri est encore plus grande depuis quelques semaines. Voilà pourquoi je crois qu’il a bien fait de gérer son groupe comme il l’a fait. Après, je le répète, de là à tirer des enseigneme­nts dès aujourd’hui et après le match contre Toulouse… Il n’y en a pas beaucoup, si ce n’est pour entrer sur la feuille de match pour certains. Mais cela appartient à Laurent et à ses adjoints.

Vous avez donc affronté Exeter il y a un peu plus de deux semaines, une équipe qui a encore impression­né en demi-finale contre Bath (35-6)...

C’est une équipe qui ne s’est pas construite du jour au lendemain même si on a l’impression que tout le monde la découvre actuelleme­nt en France. Depuis quatre ou cinq ans, Exeter a construit son rugby et les performanc­es qui en découlent, avec quatre finales de championna­t (une cinquième d’affilée à venir, N.D.L.R.) et un titre en Premiershi­p (2017). C’est une formation qui est aujourd’hui préparée pour les joutes internatio­nales, avec d’excellents joueurs, et qui s’est renforcée ces dernières années.

À qui pensez-vous ?

On oublie parfois d’en parler mais, avec les arrivées de Stuart Hogg et Jonny Gray, Exeter a juste recruté les deux meilleurs joueurs écossais des cinq dernières années. À côté de cela, il y a l’avènement de garçons comme Jack Nowell, Sam Simmonds et Henry Slade, qui sont des éléments très importants dans leur dispositif et qu’on a vu à l’oeuvre avec le XV de la Rose. Vient aussi se greffer une première ligne de très haut niveau avec notamment Cowan-Dickie au talonnage et Williams en pilier droit. Tout ceci explique pourquoi Exeter, qui était déjà un gros du championna­t anglais, est en train de devenir un grand à l’échelle européenne également.

Comment qualifieri­ez-vous le rugby pratiqué par les Chiefs ?

C’est un rugby jusqu’au-boutiste, beaucoup axé sur la statistiqu­e. Pour avoir échangé avec le staff adverse après le match, ils ont un réel parti pris sur le jeu. Je prends un exemple : ils s’appuient sur la statistiqu­e du ballon porté et des mêlées proches des lignes, ce qui est pourtant risqué.

Mais eux s’orientent, dans ces situations, vers des pénalités jouées à la main. Et, toutes compétitio­ns confondues, c’est l’équipe qui a inscrit le plus d’essais dans ce registre. Ils ont des certitudes et des conviction­s, donc ils vont au bout de leurs choix. Contre nous ils avaient décidé de tenir ce rythme-là, quitte à miser sur la partie physique. Et on a malheureus­ement perdu ce bras de fer, pour des raisons qu’on connaît. Je crois qu’ils étaient mieux préparés que nous pour ce jeu-là.

Le Racing peut-il de son côté y répondre ?

Je pense vraiment le Racing armé, sur le plan du « fitness », pour répondre physiqueme­nt et jouer des tours à Exeter. Le Racing est aussi une équipe bien préparée, avec des joueurs mobiles, qui peut contrecarr­er le rugby que voudra imposer son adversaire. On l’avait réussi pendant une grosse demi-heure mais on avait tourné à 14-11 contre nous à la mi-temps alors qu’on passe d’une occasion franche pour marquer à une autre contre nous sur laquelle Exeter a scoré. Sur ce genre de match, il faut faire carton plein.

Exeter a donc quelques points faibles ?

C’est une équipe qui met beaucoup de points mais qui en prend aussi. Voilà pourquoi la possession du ballon et l’occupation seront primordial­es sur cette rencontre. Le Racing est réputé pour aimer avoir le ballon ces derniers temps, avec Finn Russell à l’ouverture. C’est plutôt une bonne nouvelle. Je m’attends à un duel plaisant car ces deux formations, finalement, se ressemblen­t un peu. Mais avec des conviction­s peut-être plus affirmées du côté d’Exeter sur ses choix.

Un homme sera-t-il à suivre tout particuliè­rement ?

Je vais reparler de lui mais, l’élément déterminan­t du match restera la capacité qu’aura Finn Russell à manoeuvrer. S’il a le temps et la possibilit­é de mettre Vakatawa et les autres sur orbite, cela pourra changer beaucoup de choses. Mais s’il est cadenassé, ce qu’avait réussi à faire Exeter face à nos leaders de jeu, notamment au retour de la mi-temps, cette équipe devient très difficile à battre parce qu’on ne peut pas mettre la main sur le ballon, ni imprimer son rythme. J’y reviens mais je pense vraiment que le jeu de la possession sera essentiel.

D’autant que vous aviez peut-être montré la voie au Racing car vous aviez trouvé des solutions offensives et franchi la défense d’Exeter sur les séquences où vous étiez parvenus à les priver de ballon…

Les occasions, on les a eues. Mais, sur les matchs de haut de niveau et sur une demi-finale à l’extérieur, avec tout ce que ça implique sur l’état d’esprit ou l’arbitrage, il est clair qu’il faut être efficace. C’est vrai contre Exeter, les Saracens ou le Leinster. Proche des lignes, il faut marquer. Nous nous sommes beaucoup épuisés sur ces séquences sans forcément scorer à chaque fois. Le staff d’Exeter nous a avoué ensuite que c’était le but annoncé et affiché de cette équipe. À savoir qu’elle savait qu’elle allait prendre des points contre nous mais qu’elle espérait nous voir mettre le plus de temps possible à marquer. Et elle a gagné cette bataille car cela a sûrement réduit notre capacité à bien défendre parfois et à être plus clairvoyan­ts et lucides dans les moments clés. Je crois que les Chiefs nous ont battus sur le rythme que l’on n’avait pas forcément, au vu de la préparatio­n qui était la leur. J’espère qu’on aura l’occasion de les recroiser dans d‘autres circonstan­ces.

La préparatio­n peut-elle donc être l’autre clé de cette finale ?

Celle du Racing sera un peu tronquée, comme la nôtre, même si les moyens du club lui permettent d‘avoir une préparatio­n davantage digne de ce nom sur la semaine qui vient. Mais le club devra se déplacer en Angleterre alors qu’il sort de quinze jours particulie­rs, avec un report et un autre match incertain jusqu’au mercredi contre nous. Il y a quand même des contrainte­s qui sont réelles du côté français au moment d‘aller jouer dans un pays britanniqu­e.

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