Dan Carter L’hommage à un « monstre gentil » Entretien Virimi Vakatawa à coeur ouvert
À 38 ANS, DAN CARTER VIENT DE TIRER SA RÉVÉRENCE SUR UNE CARRIÈRE RICHE DE DEUX TITRES DE CHAMPION DU MONDE ET D’ÉPOPÉES TOUTES AURÉOLÉES DE TITRES MAJEURS, EN NOUVELLE-ZÉLANDE MAIS AUSSI EN FRANCE. RETOUR SUR SES GRANDES ÉTAPES.
Steve Hansen, le coach le plus titré de l’histoire de ce jeu, pose le cadre : « Quand Carlos Spencer et Andrew Mehrtens ont pris leur retraite, les gens pensaient qu’il n’y aurait plus jamais de grand numéro 10 en Nouvelle-Zélande. Puis un gamin de Southbridge a pointé son nez et en un match, il a fait plus de plaquages que n’en avaient jamais réalisés Carlos ou Andrew dans leur carrière. » Southbridge, n’est-ce pas ? C’est un de ces lieux dont on pourrait dire : « pour y vivre, il faut y être né. » Au vrai, ce village semble avoir été posé là par hasard ; au beau milieu de nulle part, à une quarantaine de kilomètres au sud de Christchurch ; entre les pâturages de Leeston et la rivière Rakaia. Le dernier recensement a comptabilisé 783 habitants, des fermiers, leurs épouses et leurs enfants, pour la plupart. « Quand j’étais môme, nous confiait Dan Carter en 2018, mon idole s’appelait Albert Anderson, mon premier voisin. » Anderson comptait alors une poignée de sélections avec les All Blacks. Des bouts de match, des rapines de gloire que l’Histoire a depuis longtemps digérées. « Il était un modèle à Southbridge et moi aussi, je voulais devenir une figure du quartier ; je voulais être All Black. »
À l’hiver 2021, d’aucuns prétendent que Dan Carter -112 sélections, 1598 points marqués, deux victoires en Coupe du monde, deux Boucliers de Brennus, une litanie de succès en Super Rugby et dans le Four Nation- fut le meilleur demi d’ouverture de l’histoire et, peut-être, le plus grand rugbyman de tous les temps. « Il n’a pourtant
pas été épargné par les blessures, poursuit
Hansen. Il y eut le talon, les épaules, les adducteurs, les genoux… Dan, il aurait pu tout arrêter et nous dire : « Là, c’est trop. J’en ai assez. » Il a pris au contraire l’adversité comme un rival à sa mesure. Cette force de caractère fait de lui un immense champion ».
GENDRE IDÉAL ET SACRÉ NOCEUR
Samedi matin, par la banale entremise d’un « post » sur les réseaux sociaux, Dan Carter (38 ans) a donc tiré un trait sur une carrière dont on ne pensait que jamais elle ne s’arrêterait. « DC », puisque ces deux seules initiales suffisent à l’identifier dans le vaste monde du rugby, restera pour nous tous, et au même titre que Jonah Lomu ou Serge Blanco, l’un des grands visages de ce sport et l’un des seuls rugbymen réellement « bankable », pour les publicitaires. « Quand j’entraînais les Crusaders aux côtés de Robbie Deans, nous racontait un jour Vern Cotter, il y avait à Christchurch une immense affiche de Dan en sous-vêtements. Mais elle a dû être retirée parce que les officiers de la ville avaient remarqué que les accidents sur cette portion de route avaient considérablement augmenté en quelques jours ! » Derrière sa belle gueule et ses manières de gendre idéal, Dan Carter ne put pourtant jamais se départir d’une solide réputation de bringueur, laquelle lui attira même les foudres de la police française après qu’il eut été, en 2017, contrôlé positif au volant de sa berline, dans les rues de Paris. Une goutte d’eau dans la mer, sans nul doute…