Midi Olympique

« Je suis dans un registre assez frontal »

GRÉGORY ALLDRITT (Troisième ligne du XV de France)

- J. P.

DU DESTIN QUI LE LIE À L’ECOSSE À SA CONSTRUCTI­ON EN TANT QUE JOUEUR, LE NUMÉRO 8 DES BLEUS REVIENT AVEC INTELLIGEN­CE ET HUMILITÉ SUR SON PARCOURS ATYPIQUE QUI L’AMÈNE DÉSORMAIS À INCARNER, À PAS ENCORE 24 ANS, UNE DES RÉFÉRENCES MONDIALES À SON POSTE. Comment avez-vous vécu l’agitation et l’incertitud­e qui ont plané au-dessus du XV de France depuis le week-end dernier (l’interview a été réalisée) avant le report du match) ?

Comme nous avons eu la chance de rentrer chez nous, je vous avoue que j’en ai surtout profité pour bien couper. J’ai profité de ces quelques moments au calme à La Rochelle avec ma copine pour refaire le plein de fraîcheur et d’énergie. Même si ce serait mentir de dire que je n’ai pas jeté un oeil sur ce qui se passait, comme on commence à avoir l’habitude de ce genre de situation, je ne m’en suis pas plus soucié que ça. Avec le club comme avec la sélection, on a bien compris que l’adaptation doit être le maître-mot cette saison.

En pratique, comment s’est passé votre retour au CNR ?

Nous sommes rentrés dimanche soir. Il y avait simplement à se laisser guider par les protocoles mis en place par le staff. C’est vrai que cela faisait bizarre de prendre les repas tout seul dans sa chambre, mais honnêtemen­t, sur le fond, c’était plus facile à suivre qu’en club. L’organisati­on est faite, il n’y a qu’à la respecter. Quand on doit rentrer chez soi depuis son club, c’est tout de suite plus compliqué d’éviter les interactio­ns avec des personnes extérieure­s.

Parlons rugby, alors. Parce qu’au-delà de vos liens familiaux, votre carrière est intimement liée à l’Écosse, entre ce premier doublé à Murrayfiel­d en 2019, votre première titularisa­tion en 8 pendant la préparatio­n de la Coupe du monde, l’échec de l’an dernier…

C’est vrai que les France-Écosse sont toujours des matchs particulie­rs pour moi. Ce sont toujours des semaines où je reçois beaucoup de messages de soutien, notamment de ma famille qui vit en Écosse mais qui a pris fait et cause pour les Bleus… Mais c’est surtout une sélection qui monte en puissance depuis quelques saisons, qui tient beaucoup le ballon et contre qui les opposition­s donnent souvent de jolis matchs. Personne n’a oublié ce qui s’est passé là-bas l’an dernier, c’est quelque chose qui reste ancré en nous. À nous de prendre notre revanche.

Depuis le dernier Tournoi, vous avez franchi un cap. À quoi attribuez-vous cette évolution ?

C’est un tout. D’une part, j’ai pris conscience du travail qu’il me restait à produire. J’ai aussi joué plus de matchs complets en club, cela m’a aidé à prendre le rythme. Après, il y a peut-être plus de confiance aussi de la part du staff. Tout cela cumulé a servi de déclic… Vous savez, dans un match internatio­nal, on est dans le rouge au bout de cinq minutes. Ce qu’il faut surtout, c’est ne jamais baisser de rythme. Évidemment, dans les vingt dernières minutes, ce n’est pas facile… À mes débuts, en tout cas, j’avais du mal à le faire. Aujourd’hui, quand je vois que je ne suis pas en sprint sur certaines courses, j’arrive désormais à me faire violence.

Le quart de finale de la Coupe du monde au Japon face aux Gallois a-t-il servi de déclic ? Vous étiez sorti et n’étiez pas présent pour la mêlée la plus importante du match…

peut pas dire ça, d’autant que si ça se trouve, je n’aurais pas fait mieux sur le terrain… Je n’ai pas eu besoin d’une action précise pour avoir ce déclic, c’est vraiment un tout. (il se marre) C’est drôle parce qu’en club, Ronan O’Gara et « Greg » Patat répètent souvent qu’un troisième ligne ne sort jamais avant la 70e minute s’il fait un bon match. C’est surtout ça qui a dû me motiver à rester plus longtemps !

Tout était dans la tête, alors…

Attention, quand je dis que ce n’est qu’une histoire de mental, je mens un peu. Après la Coupe du monde, j’ai perdu un kilo et demi et j’ai vu que cela a fait une grosse différence ! Depuis, j’essaie de me tenir à ce poids et les bienfaits se confirment. Ce n’est pas toujours facile parce que chez nous les Gersois, on aime bien se tenir à table ! Mais bon… Si on fait les efforts qui s’imposent à côté, il y a quand même de quoi se faire plaisir tout en restant raisonnabl­e.

Le fait d’avoir vu le XV de France opter pour une stratégie de dépossessi­on, moins énergivore, n’a-t-il pas aussi joué dans votre capacité à être efficace 80 minutes ?

Bien sûr que cela y contribue, c’est pour cela que je dis que c’est un tout… Dans le rugby moderne, les défenses sont tellement fortes qu’il est suicidaire de garder les ballons les trois-quarts du temps. Jouer au pied, c’est un choix qui s’impose parce que cela permet de gagner du terrain et de mettre l’adversaire sous pression sans grosse perte d’énergie. Par contre, lorsqu’on décide de jouer, il faut y aller à 200 %, tous ensemble.

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