Midi Olympique

Un nouveau champion de France

- Éditorial Emmanuel MASSICARD emmanuel.massicard@midi-olympique.fr

Une fois n’est pas coutume, permettez ici un pas de côté pour déborder en dehors de l’actualité. Acceptez donc l’augure d’une pause momentanée, sorte d’une invitation à la respiratio­n, plutôt que d’avoir à commenter la qualificat­ion des Bleues en demie du Mondial néo-zélandais, la préparatio­n des gars de Dupont avant la tournée, les décisions parfois incohérent­es des arbitres en Top 14, le suspense du Pro D2, les résultats des treizistes dans leurs coupes du monde ou la fin de l’invincibil­ité rochelaise à Deflandre… Tout cela attendra bien, croyez moi.

Alors, prenons du temps. Ce week-end, au beau milieu de notre brouhaha traditionn­el, s’est joué un nouveau titre de champion de France. Celui du meilleur ouvrage de rugby 2022. Rien d’anodin à mes yeux : il concrétise un doux rêve porté par Philippe Folliot (sénateur, président de l’Amicale des parlementa­ires du rugby qui talonne encore parmi les siens) et Jacques Verdier, mon prédécesse­ur aux commandes de Midol qui aimait autant la littératur­e que le rugby.

Il y a quelques années en arrière, tous deux avaient lancé l’idée d’un tel prix pour retrouver une forme de tradition mêlant notre sport et ses hérauts avec la chose littéraire et ses récits au souffle d’anthologie qui l’ont souvent magnifié.

Il était question de confirmer et transmettr­e l’idée selon laquelle le rugby a quelque chose de différent à partager avec ses contempora­ins. Qu’il cultive un rapport à l’histoire et à l’aventure unique en leur genre ; un héritage mariant la rugosité d’un sport de combat avec la beauté du geste et une finesse qui confinent parfois à l’art.

Jacques n’est plus là mais son héritage est toujours bien présent au sein du journal. Il se confirme encore avec ce prix littéraire relancé par l’ami Philippe au terme d’une jolie contre-attaque depuis son en but tarnais. À ses côtés, Jean Colombier (prix Renaudot 1990 pour l’immense « Béloni ») dont le dernier ouvrage, « La Totale », est un roman de haute volée écrit par huit mains de rugbymen. Et Richard Escot, qui signa récemment avec Benoît Jeantet le précieux « Jeux de lignes, littératur­e et rugby ». Assis autour d’eux à la table du jury, Laura Di Muzio, Pierre Berbizier, David Reyrat, Jean-Christophe Buisson, Max Armengaud, et votre serviteur. La transmissi­on est assurée, Jacques aurait adoré.

Premier à sortir de la mêlée d’une bonne vingtaine d’ouvrages, Didier Cavarot. L’ancien troisième ligne centre d’Issoire est le papa de « Monsieur Rusigby ». Son personnage et ses nouvelles font vibrer le monde amateur depuis quelques années déjà. Ne vous y trompez pas, s’il se plaît dans « son monde », l’auteur nous parle du rugby en général, avec pertinence et humanité (lire en page 30). Sans prétention mais avec un talent certain, l’Auvergnat s’est posé là ; il y a une forme de logique, d’évidence et surtout de plaisir à le voir décrocher ce premier prix. Avec lui, la flamme est allumée.

Au moment où notre rugby crépite de toutes parts dans l’attente du grand soir tricolore à l’automne 2023, c’est un vrai bonheur de voir jaillir des librairies ce nouveau titre de champion de France quand le rugby des Séries a perdu une partie de ses Boucliers et donc de sa visibilité. Cela manquait clairement au paysage. Et c’est un atout majeur sur le chemin de la transmissi­on de notre culture, quand tout n’est devenu qu’écran, vidéo et image. Ce poids des mots ne m’est jamais apparu aussi précieux.

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