Midi Olympique

« Fabien Galthié fut le plus favorable à mon égard »

- Propos recueillis par J.P. avec R.V.

2000-2001 AUX CÔTÉS DE FABIEN GALTHIÉ JOUEUR. Comment vous êtes-vous retrouvé à Colomiers en 2000 ?

En 1999, mon club de Isetan a été supprimé. C’était un moment où j’ai dû choisir entre le travail et le rugby. J’avais 30 ans et je souhaitais devenir pro- fessionnel. Au Japon, ce statut paraîssait impossi- ble à obtenir. À cette époque un Français était mem- bre du conseil de direction de la JRFU. Comme je voulais aller en France, il a contacté différents clubs. Quatre équipes ont fait des offres dont Colomiers. Le club proposait de venir passer un test de dix jours avant de prendre la décision d’offrir un contrat pro- fessionnel ou non. Comme il s’agissait du premier recrutemen­t de joueur asiatique au niveau profes- sionnel il y eut beaucoup de tests (physiques, bien sûr, mais aussi sur la capacité à vivre ensemble…) En rejoignant Colomiers (juillet 2000, N.D.L.R.), j’ai été écarté de l’équipe nationale japonaise car j’étais devenu profession­nel.

J’étais internatio­nal dès ma deuxième année d’uni- versité à Meiji. J’avais joué la Coupe du monde 1991, et surtout en 1992, j’avais été pris dans une sélection mondiale pour fêter le centenaire de la Fédération néo-zélandaise. J’étais le seul Japonais avec cinq Sud-Africains. Ce match fut un moment char- nière pour moi. J’avais passé un mois et demi en

Nouvelle-Zélande, un truc incroyable pour moi. Je jouais à Isetan, le club d’une entreprise. Ce n’était pas le plus grand club, mais je privilégia­is le tra- vail intéressan­t que me donnait cette entreprise, je m’entraînais entre 21 h 30 et 23 heures.

Étiez-vous seul à débarquer en France ?

Oui. J’ai vécu dans une copropriét­é sur le golf toute ma vie à Colomiers. J’ai appris le français grâce à un couple qui s’occupait de l’école de rugby de Colomiers, et au bout de trois mois j’ai fait un rêve en français ! Après cela, j’ai commencé à compren- dre la langue. Au début, j’avais des problèmes de com- préhension, mais peu à peu j’ai commencé à com- prendre et c’est devenu amusant. J’adore cuisiner et j’aimais aller au supermarch­é, acheter du steak, boire du vin (pas cher mais très bon !) et passer un bon moment.

Comment Fabien Galthié se comportait-il ? Était-il déjà un patron ?

Quand je suis allé passer mon test, un entraîneur m’a présenté aux joueurs. Galthié était le plus favorable à mon égard. Il a dit : « Appelons-le Yoshi ». Galthié avait la confiance de tout le staff et on lui faisait con- fiance en tant que capitaine pour rassembler les joueurs lors des entraîneme­nts et des matchs. Outre Fabien Galthié, je me souviens de Marc Dalmaso, Francis Ntamack, Jean-Luc Sadourny Ces quatre joueurs, proche de moi en âge, m’ont beaucoup sou- tenu. Ils m’ont accueilli très chaleureus­ement. Il y avait cinq internatio­naux dans cette équipe, pour moi c’était extraordin­aire de me retrouver dans cet environnem­ent.

Oui, mais pour moi ce fut quand même très excitant

IL A JOUÉ EN FRANCE EN

de vivre ça, je jouais au rugby tous les jours comme activité principale. Rendez-vous compte. Mais j’ai dû partir au bout d’un an, car entre-temps, le rugby était passé profession­nel au Japon. Et j’ai reçu une offre de Sanyo Electric (devenu Panasonic). Ce fut un gros dilemme pour moi. Mais j’avais été profession­nel et comme le rugby offrait de nouvelles perspectiv­es pour les jeunes, je voulais leur offrir un exemple.

Quand vous étiez jeune, quelles images aviez-vous du rugby français ?

En 1985, quand j’étais lycéen, je ne pouvais voir de rugby étranger qu’une fois par an à la télévision japonaise, à l’occasion du Tournoi des 5 Nations. Quand j’étais en troisième année de collège, j’avais été fasciné par un match France-pays de Galles, le jeu des Français de Philippe Sella et Serge Blanco. À partir de là, l’envie de jouer en France a pris racine en moi avec l’espoir de jouer avec ces deux joueurs extraordin­aires.

Que devenez-vous aujourd’hui ?

Je travaille avec des amis pour démarrer un club de sport multidisci­plinaire au Japon, le Samurai Seven, qui enseigne actuelleme­nt le Seven. Nous formons des joueurs de l’équipe nationale. Je suis propriétai­re et directeur de ce club. J’ai aussi créé une académie junior (Rugby Sky Paradise). Enfin je suis aussi commentate­ur de télévision, critique rugby dans les médias. Mais tout ça est finalement lié à mon séjour à Colomiers. J’avais étudié le monde du sport jusqu’à obtenir un Doctorat de l’Université de Tsukuba. Mon objectif était déjà de créer un club sportif multidisci­plinaire comme en France au Japon. Je voulais aller apprendre ça aussi en allant en France.

 ?? Photos DR ??
Photos DR

Newspapers in French

Newspapers from France