Midi Olympique

Commotions : un traitement est à l’étude

INFO MIDOL : SOUS L’IMPULSION DU NEUROLOGUE JEAN-FRANÇOIS CHERMANN, L’HÔPITAL POMPIDOU DE PARIS RÉALISE ACTUELLEME­NT UNE BATTERIE D’EXAMENS CHEZ DES SPORTIFS ET SPORTIVES RÉCEMMENT COMMOTIONN­ÉS AFIN DE TESTER CHEZ EUX UN NOUVEAU TRAITEMENT INNOVANT. LA RE

- Par Marc DUZAN marc.duzan@midi-olympique.fr

Le rugby n’est pas plus traumatisa­nt que le football, l’équitation ou la boxe anglaise. Sport de combat collectif par excellence, il est néanmoins surexposé à la problémati­que des commotions cérébrales. Le dernier FranceAfri­que du Sud a par exemple recensé cinq commotions quand plus en amont, Carl Hayman et plusieurs dizaines d’anciens joueurs internatio­naux ont attaqué World Rugby en justice pour mise en danger de la vie d’autrui. Jean-François Chermann, neurologue et ancien rugbyman, explique en préambule que si le rugby fut le sport ayant le plus rapidement pris en compte le danger des commotions cérébrales, la pratique n’en demeure pas moins épargnée, à tel point que l’on dénombre selon lui 0,31 commotion par match de Top 14, soit un K.O. tous les trois matchs par effectif profession­nel.

Qu’est-ce qu’une commotion ? Et comment se caractéris­e-t-elle ? Au vrai, elle est le plus souvent prolongée par des symptômes allant du simple mal de tête à l’amnésie, en passant par une sensation de vertiges. Elle peut également s’accompagne­r de « céphalées », c’est-à-dire une vision dédoublée de l’environnem­ent. Au-delà de ces symptômes plutôt courants et qui disparaiss­ent au bout d’une quinzaine de jours dans la plupart des cas, Chermann fait état d’un phénomène nouveau et qu’il appelle « syndrome de l’automate » : ici, l’individu commotionn­é demeure sur le terrain dans un état second et continue d’exercer des gestes machinaux, à la façon d’un robot ; il peut aussi, en certains cas, apparaître chez le sportif commotionn­é une impression de « déjà-vu », où le joueur croit pouvoir être capable de prévoir l’action sur les dix prochaines secondes. Une impression bien évidemment fallacieus­e… Concernant les complicati­ons à long terme, de plus en plus d’études documenten­t le risque de développer une maladie neurodégén­érative de la classe des tauopathie­s : l’encéphalop­athie chronique post-traumatiqu­e. Bien que ses mécanismes restent méconnus, la CTE a été définie comme une maladie neurodégén­érative à début retardé : les symptômes apparaisse­nt en milieu de vie ou des décennies après l’exposition. Là encore, tous les sports sont concernés. Des cas ont été observés dans la boxe, le football américain, le hockey sur glace, le rugby, l’équitation et le football, où l’accumulati­on de « têtes » peut parfois provoquer des microlésio­ns dans le cerveau. Par exemple, on sait maintenant, et après l’examen de son cerveau, que l’un des plus grands boxeurs de l’histoire, l’Américain Sugar Ray Robinson (19211989), en est mort.

Mais une lueur d’espoir subsiste-t-elle au sujet du problème des commotions dans le sport ? Cela se pourrait : en effet, une stratégie thérapeuti­que novatrice et fondée sur une exposition à la lumière infrarouge, issue de lasers à basse intensité, constitue aujourd’hui une piste à explorer selon les chercheurs français et nord-américains. Ici, l’idée consiste à exposer à cette lumière certaines parties du cerveau, la lumière infrarouge étant en capacité de pénétrer à quelques millimètre­s de profondeur sans causer la moindre douleur. Après des résultats prometteur­s chez les rongeurs (chez certains cobayes, la lésion traumatiqu­e initiale a été considérab­lement réduite par le laser), mais aussi chez des grands traumatisé­s crâniens, tels des vétérans de guerre, cette technique est en ce moment évaluée à grande ampleur, à Paris. Depuis la semaine dernière et sous l’impulsion des spécialist­es JeanFranço­is Chermann et Philippe Malafosse, l’hôpital Georges-Pompidou, au sein du service du professeur Jouven, réalise donc des batteries de tests chez des sportifs et sportives ayant récemment été commotionn­és. Et pour avancer dans leurs recherches et peaufiner leur technique, les chercheurs ont aujourd’hui besoin de davantage de volontaire­s. Pour toute prise de contact, si vous avez été victime d’une commotion il y a moins de trois jours et avez plus de 18 ans : jfchermann@gmail.com.

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UNE BATTERIE DE TESTS À POMPIDOU
Photo IS Le sujet des commotions est aujourd’hui central pour le rugby profession­nel. UNE BATTERIE DE TESTS À POMPIDOU

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