Le plus dur commence...
On peut trouver curieux de s’inquiéter après cette splendide série d’automne. Mais c’est que, sans doute, le plus dur reste à faire. En effet, le Top 14, ses combats, l’incertitude et le risque de blessure, s’associe à notre cher Tournoi dans un format, cette année, pas très favorable. On se doit, en effet, de tenir compte des performances de l’Irlande, de l’orgueil blessé des Anglais, du talent italien, du brio, peu récompensé des Écossais et les crocs des Gallois. Sacré programme ! Alors, bien sûr, l’encadrement va jouer un rôle déterminant en absorbant les doutes, les questionnements pour aboutir au but espéré. Une autre difficulté, c’est que le jeu des coqs est disséqué, analysé par tous les entraîneurs du monde. Une façon, peut-être de sortir d’une stéréotypie gênante, en partie lassante et peu spectaculaire. Faudra-t-il, sans cesse, que nos demis de mêlée, les ouvreurs, les arrières tapent à suivre, rendant le ballon pour espérer une faute de mains ? Alors que ce que redoutent, depuis toujours, les autres équipes, c’est la capacité française d’improvisation et de relances du bout du monde. Comme si l’inventivité était tout aussi nécessaire que le combat. Comment faire ? Et si on laissait jouer les joueurs ! En observant les réactions des entraîneurs de l’actuelle Coupe du monde de foot, n’avez-vous pas été étonnés par leur étonnante gestuelle ? Avec les bras, ils miment le fait d’aller de l’avant, de fermer les angles… comme s’ils jouaient, alors qu’ils ne jouent pas ! Comment alors s’effacer tout en étant présent, comment être rassurant sans être trop prégnant ? Comment attendre la fête finale en masquant son inquiétude profonde ? Pour nous, le peuple du Rugby, notre désir immense, plus anonyme est pourtant essentiel. Ils disent la communion avec les tribunes. Ils sont comme les étudiants, les ouvriers qui honorent leurs familles par leur succès, leurs diplômes qui les autonomisent. Lorsque la Victoire sera là, rêvons un peu ! alors, brutalement, quelques secondes après le coup de sifflet final, ils rentreront dans l’histoire et nous partagerons leur fierté. Je me souviens d’un soir de victoire avec mon club (qui vient, à ce propos, de mettre en place, un projet memoriel « Hall of fame » pour un panthéon de nos joueurs. Très honoré, personnellement de faire partie des vieux sages, qui, après le vote des supporters auront la difficile tâche du choix) Donc, un soir de Victoire, enfin ! Après des décennies d’attente, voilà que ces jeunes gens, plein de fougue, d’entrain, de qualité hormonale déclarent : « nous pouvons devenir grands pères. » Le présent était devenu du passé et ce moment vécu en commun pour toujours en nous. On peut se demander si notre Top 14 ne va pas pâtir de cette espérance mais « le bout de bois » vaut bien un déplacement à Paris (encore que le succès des provinces soit visible pour la tournée d’automne) De même, vive les chants écossais et gallois, pas de Rome cette année, l’année prochaine ! Cette joie comme un battement cardiaque qui prouve notre existence. On verra pour les souhaits de bonne année 2023, particuliers de fait ! Quelques excès utiles lors de la trêve des confiseurs, mais fin d’année : Championnat. Finalement quand on s’inquiète c’est qu’on aime.