Midi Olympique

Fini, l’état de grâce

- Emmanuel MASSICARD emmanuel.massicard@midi-olympique.fr

La date était cochée depuis des semaines, d’une croix rouge vif posée sur le calendrier des rendez-vous à ne pas manquer en 2024. Un peu comme ces étapes de légende du Tour de France qui nous font saliver à l’avance, tant elles portent la promesse d’avoir à vivre un moment d’exception.

Raté. Face à l’Irlande, le XV de France a entamé son Tournoi post-Mondial par une défaite quasi record dans l’histoire des Bleus (17-38). Un fiasco collectif et une désillusio­n pour tous ceux qui espéraient poser un voile d’oubli sur la défaite si cruelle concédée à l’Afrique du Sud, en quart de finale de la Coupe du monde (28-29).

Les faits et causes de ce naufrage marseillai­s sont multiples, vous les lirez en détail dans ce journal. Mais ne cherchez pas l’arbitre comme excuse, ni même la météo ou ce coquin de sort qui nous aurait encore fui après avoir tant souri aux Bleus, ces dernières années. Cette fois, ils n’ont pas existé. L’affiche phare du Tournoi s’est écrite avec un XV de France sans solution, désarmé et en panne de jeu ; comme si les hommes d’Alldritt n’avaient toujours pas digéré l’éliminatio­n en Coupe du monde.

Le contraste est cruel avec les Irlandais qui, à l’inverse, ont brillammen­t tourné la page. Pour eux, les idées claires, un rugby maîtrisé et de l’envie à revendre. Ils se sont imposés malgré tous leurs absents. Et malgré la déception d’un Mondial qui ne les a pas épargnés.

Il faut donc croire qu’on s’est trompé quelque part, qu’on nous a menti ou que le discours en forme de méthode Coué porté par le sélectionn­eur n’a pas touché l’oreille de ses joueurs. Non, la page de la Coupe du monde n’est pas tournée. Et non, la défaite concédée aux Springboks n’était pas un simple accident, l’échec isolé au milieu d’un parcours d’excellence. D’ailleurs, l’année 2023 n’avait pas toujours montré le meilleur visage des Bleus ; ensuite, cet échec irlandais témoigne encore de vraies difficulté­s.

Insurmonta­ble ? On n’en jurerait pas. A tout le moins, cette période d’entre deux mandats signe la fin de l’état de grâce pour le XV de France, plus encore son sélectionn­eur qui surfait sur la vague des résultats et sur une folle promesse : devenir champion du monde à domicile. La chance est passée, retour sur terre. Les clubs français ont déjà renégocié le contrat de confiance (après avoir peu goûté l’absence d’explicatio­n), ils n’en resteront pas moins sur la défensive. Côté gradins publics, c’est pareil : les critiques ne se cachent plus face à ce rugby devenu minimalist­e, qui ne gagne même plus et qui se perd dans l’illusion fumante de « l’intensité combattue ». Les Bleus étaient pourtant si brillants, quand ils dansaient sur l’air de la vitesse et du grand mouvement.

Pour la première fois, Fabien Galthié enchaîne les difficulté­s significat­ives avec son XV majeur (hors Dupont, Ntamack et Jelonch qui sont incontourn­ables). Pour la première fois, il ne pourra pas s’en remettre à ses bons mots, ses folles lunettes et ses formules de sachant. Pour la première fois, il va devoir monter au front, trouver des solutions pour remettre son équipe sur les rails et choisir un système de jeu qui colle à ses hommes autant qu’à leur culture.

Pour la première fois, le sélectionn­eur va devoir revenir en arrière, se souvenir des promesses de ses débuts, quand il nous vantait le savoir-faire français pour « tuer » les actions plus vite que son ombre… Bref, Galthié a du pain sur la planche : un rugby à (re)trouver, des matchs à (re)gagner et des coeurs à (re)conquérir. Tout recommence, samedi en Ecosse !

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