L’art d’être treize à la bonne table
TOULOUSE LE STADE, PORTÉ PAR UN DUPONT INTOUCHABLE, EST ALLÉ ARRACHER UN BONUS OFFENSIF QUI N’AVAIT RIEN DE TOUT CUIT. LES TOULOUSAINS SE SONT MÊME RETROUVÉS À TREIZE PENDANT DIX MINUTES.
Quelle soirée folle ! Elle fut, saluée par les sauts de cabris de tout le banc toulousain quand à la 82e minute, Juan Cruz Mallia inscrivit en bout de ligne l’essai du bonus sur un service au pied d’un ouvreur de fortune, dont les initiales sont A et D. « On voyait bien sur le grand écran qu’il nous manquait un essai, on a dit aux joueurs qu’il fallait essayer d’aller chercher le bonus. Il était évident que sur le dernier renvoi, Bayonne allait chercher à récupérer le ballon et qu’il fallait s’organiser pour ça. Finalement, on l’a récupéré au sol… » Et tout s’est enchaîné jusqu’au septième essai de Toulouse, un club qui à la 74e, craignait encore de se faire coiffer sur le poteau par son adversaire. Le plus incroyable, c’est que le Stade toulousain, même porté par un Dupont stratosphérique se retrouva en danger car réduit à treize après deux cartons jaunes reçus coup sur coup par Fa’asalele et Laulala (40e).
C’est ce moment qui nous a finalement le plus marqué. Au milieu d’une série de fulgurances offensives, les Toulousains ont réussi l’exploit de se sortir de ce guêpier. À la reprise, non seulement, ils n’ont pas encaissé de points, mais ils ont marqué un essai par Alban Placines après un pilonnage de Bituniyata et un renversement de Graou.
UNE ORGANISATION SPÉCIALE
« Ce fut le tournant du match. On s’était organisés à la pause pour jouer à treize. Il fallait penser aux lancements, notamment sur les touches. Nous avons été obligés de faire des touches à quatre. Je donne un coup de chapeau aux joueurs, car cette phase a été parfaitement maîtrisée à ce momentlà. Et pour nous, ce n’est pas évident de construire le jeu à quatre, surtout pour nous. Ce n’est pas notre style de jeu. Mais on a su construire un ballon porté qui a débouché sur une pénalité. Et nous avons enchaîné avec du jeu dans l’axe et du jeu en renversement, exactement ce qu’il faut faire dans ces circonstances. »
Le score final est un peu flatteur pour les Toulousains, mais il est aussi le fruit de cette lucidité tactique. Jamais aussi près d’une sélection méritée, Alexandre Roumat en parla volontiers. « Honnêtement, c’était un cas assez inédit pour nous. On sait que défensivement, il ne faut pas se consommer dans les rucks et rester sur nos pieds. Offensivement, il faut savoir rester près du 9 et du 10 et ne pas faire du large-large et se contenter d’un rugby plus minimaliste ; Il fallait faire travailler les avants mais aussi compter sur nos ai- liers et nos centres censés venir ramasser et relever le ballon pour occuper cette zone le plus longtemps possible. À l’image de Seta Bituniyata. »
L’ailier fidjien n’est pas très médiatique, mais samedi, il fut aussi séduisant que les plus prestigieux de ses coéquipiers, les Tauzin, Capuozzo, Lebel, Retière, Kinghorn, Delibes. Ce fut l’un des enseignements de ce match. Le festival Dupont, lui ne relevait pas de la découverte, même s’il fut en soi, sidérant.