Midi Olympique

« C’était dur de voir comment ça se passait pour l’équipe »

- Propos recueillis par J. Fa jeremy.fadat@midi-olympique.fr

THIBAUD FLAMENT - DEUXIÈME LIGNE DU XV DE FRANCE VICTIME D’UNE FRACTURE DU PIED EN DÉCEMBRE, IL A FAIT SON RETOUR AVEC TOULOUSE SAMEDI ET POSTULE POUR LE DÉPLACEMEN­T DES BLEUS AU PAYS DE GALLES. DIMANCHE MATIN, QUELQUES HEURES AVANT DE REJOINDRE MARCOUSSIS, IL A ACCEPTÉ DE SE CONFIER SUR SON ACTUALITÉ. Qu’avez-vous ressenti au moment d’entrer en jeu, ce samedi contre Castres ?

J’étais léger, et surtout content de reprendre enfin le rugby. Cela faisait un moment que j’étais écar- té des terrains. Cela permet de se régénérer mais, sur la fin, c’était vraiment pesant. Avec la victoire au bout, ce retour était tout bénéfice pour moi.

On vous a trouvé saignant sur vos premières interventi­ons. Quelles ont été les sensations ?

Plutôt bonnes. J’étais un peu porté par mon envie de reprendre et mon manque de jeu. Sincèremen­t, au niveau des sensations, je suis satisfait.

Avec les échéances en club et en sélection, la volonté et donc le risque de précipi- ter votre retour existait-il ?

Franchemen­t, c’était assez compliqué de se montrer patient. On posait des délais qu’on repoussait à chaque fois. Au début, il était prévu que je re- joue contre Bayonne (le 3 février, NDLR). Pas pos- sible. Puis, c’était contre Oyonnax (le 17 février, NDLR). Ça ne l’a pas fait non plus. En fait, je vou- lais viser une reprise pour le début du Tournoi mais je n’ai pas pu.

Et donc ?

Le plus embêtant à mes yeux, c’était de fixer des délais et d’avoir le sentiment d’échouer à chaque fois. Je le vivais comme ça. En parlant avec les ki- nés, eux m’ont dit : « On n’a jamais soigné un pied fracturé en moins de huit semaines. » Donc, ce n’est pas comme si la blessure avait pris du retard anormaleme­nt. On essayait de faire au mieux. En réalité, cela suivait son cours et il me fallait respec- ter les délais classiques et mes sensations qui n’étaient pas encore bonnes.

La douleur a-t-elle disparu ?

Elle est partie, même si c’est un peu raide le len- demain. Je le sens un peu mais ce n’est pas déran- geant et je n’y pense pas du tout sur le terrain. C’est largement supportabl­e. Il y a toujours un équi- libre à trouver, entre le fait de reprendre le plus tôt possible et celui de ne pas entraver la fin de la ré- cupération. Là, je crois être dans les bons créneaux.

Était-ce un soulagemen­t d’être sur la liste du XV de France, dévoilée jeudi dernier ?

J’étais surtout heureux de voir des événements sympas arriver pour moi. Mais je restais concentré sur le match de samedi, avec la volonté de réussir ma reprise. Je prends les choses comme elles viennent et j’ai hâte de retrouver le groupe.

D’autant que vous avez dû faire le deuil de ce début de Tournoi…

C’est le lot de tout sportif, d’être parfois sur le côté, mais c’était dur. Surtout de voir comment ça se passait pour l’équipe sur le terrain. J’avais un sentiment d’impuissanc­e et j’ai eu beaucoup de mal à regarder les matchs.

Était-ce une souffrance ?

Peut-être pas à ce point. Mais j’ai toujours eu du bol en équipe de France. Depuis que je suis arrivé en sélection, ça tourne très bien, à part évidemment cette défaite en quart de finale de Coupe du monde. J’ai été trop bien habitué à des Bleus qui gagnent tout. Là, c’est plus compliqué et ça fait bizarre.

Vous n’avez pas pris la parole après le revers contre les Springboks. Comment avezvous vécu la digestion ?

J’ai eu besoin de l’en- caisser, de couper com- plètement et de ne plus penser à tout ça. C’était difficile… (Il s’arrête). Le pire, c’est que je n’ai pas vraiment de regret.

C’est-à-dire ?

J’étais évidemment tel- lement déçu. Mais, jus- qu’à la 75e minute, j’étais intimement convaincu qu’on allait gagner le match et qu’on allait remporter cette Coupe du monde. J’en étais vraiment persuadé. Alors, voir tout s’écrou- ler… Mais, je le répète, je n’ai pas de regret. Il y a une immense dé- ception mais j’ai voulu le prendre avec du recul. C’est aussi pour cela que je devais penser à autre chose avant de basculer sur la reprise avec Toulouse il y a trois mois.

Votre blessure était-elle aussi une occasion de récupérer physiqueme­nt et mentalemen­t ?

Oui. Je gardais un pied au club où j’étais tous les jours pour les soins et les entraîneme­nts. Mais j’ai eu l’opportunit­é de faire autre chose le week-end, de prendre du temps pour moi, avec mes amis, ma copine, mon chien, etc. Cela m’a fait du bien.

Vous avez forcément discuté avec certains coéquipier­s. Comment jugez-vous le moral du groupe après ce début de Tournoi délicat ?

On voit qu’il y a quelque chose qui cloche mais il n’y a pas le feu au lac non plus. Nous sommes sur un nouveau cycle et la Coupe du monde n’a peut-être pas encore été totalement digérée par le groupe. Il n’y a eu que trois matchs, il faut faire corps et rester soudés. On va bosser.

Avec les autres nouveaux, espérez-vous apporter votre fraîcheur ?

Peut-être, oui. J’y ai pensé mais je veux surtout arriver avec une énorme envie. Le truc, c’est aussi de ne pas se poser trop de questions, de ne pas se mettre la pression et d’être naturel. Le groupe veut repartir dans la bonne direction.

Thomas Ramos disait dans nos colonnes, après le match contre l’Italie, qu’il faut sor- tir la tête haute avec deux succès…

Évidemment. Pour moi, c’est compliqué d’en parler car je n’ai pas vécu les choses de l’intérieur jus- que-là. Mais l’idée, c’est de remporter ces deux derniers matchs et de relancer une nouvelle dynamique. Puis de mettre de côté ce début de Tournoi compliqué.

Vous êtes entré en troisième ligne face au CO, avant de finir le match en deuxième ligne. Qu’est-ce que ça change pour vous ?

Là non plus, je ne me pose pas vraiment cette question (sourire). Surtout en ce moment. J’étais d’abord content de retrouver l’avant-match, le terrain, d’être avec le groupe. Je me sens bien sur les deux postes.

Après le forfait de Willemse, vous aviez évolué en numéro 5 au Mondial. Avec l’arrivée de Meafou et la progressio­n de Tuilagi, il y a moins de chances de vous y voir désormais…

On verra ce que veulent faire les coachs avec moi mais je pense effectivem­ent que je devrais moins évoluer à ce poste.

À droite de la deuxième ligne, vous avez déjà expliqué que vous laissez plus d’énergie dans les taches de l’ombre. Y a-t-il une frustratio­n ?

Oui, forcément un peu. Mais c’est toujours le collectif et l’équilibre de l’équipe qui priment. Nous sommes tous à son service. Je peux dépanner en numéro 5 mais ce n’est pas mon poste de prédilecti­on. Du coup, il y avait une forme de frustratio­n mais je me devais de la mettre de côté. D’autant que c’était un énorme privilège de commencer presque tous les matchs de la Coupe du monde.

On va donc enfin observer les premiers pas de votre partenaire Emmanuel Meafou sur la scène internatio­nale…

« Je m’interrogea­is un peu avant le match contre Castres et mes sensations m’ont clairement rassuré. [...] Je me suis senti mieux là quand lorsque jai repris avec Toulouse après la Coupe du monde. »

Je suis hyperexcit­é pour lui. C’est tellement mérité. Manny (surnom de Meafou, NDLR) a largement le niveau pour prétendre à ce genre de compétitio­ns internatio­nales. Je suis certain qu’il va très bien s’adapter au rythme et aux échéances qui l’attendent. Et je suis bien placé pour savoir que c’est une très bonne nouvelle pour l’ensemble de l’équipe.

Pour finir, vous sentez-vous prêt physiqueme­nt à être sur la feuille de match à Cardiff ?

Oui, je me sens prêt. Honnêtemen­t, je m’interrogea­is un peu avant le match contre Castres et mes sensations m’ont clairement rassuré. Je suis conscient de n’avoir pas joué pendant un moment, et de n’avoir fait que trente-cinq minutes ce samedi, mais je ne me suis pas senti décalé ou à la bourre. Franchemen­t, je me suis senti mieux là quand lorsque j’ai repris avec Toulouse après la Coupe du monde.

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