Midi Olympique

Tendance Les souvenirs de l’ami Gareth

- l MARC DUZAN

Dans quelques jours, la bande à Galthié rejoindra Cardiff où l’attend un XV du Poireau battu trois fois en autant de matchs, depuis le début du Tournoi des 6 Nations. De toute évidence, l’ovale de la principaut­é, tout juste orphelin de ses centurions AlunWyn Jones, Leigh Halfpenny ou Dan Biggar, se trouve actuelleme­nt à un carrefour de son immense histoire et a choisi, pour donner un souffle nouveau à sa noble demeure, de confier son destin à de jeunes loups certes talentueux mais jusqu’ici fort peu à l’aise, dans la jungle du rugby d’en-haut. Alors ? Ce n’est évidemment pas la première fois que le pays de Galles est au bord du précipice et à ce sujet, le grand Gareth Edwards nous racontait : « Avant que ne naissent les princes de Galles des années 70, le rugby de chez nous n’était pas en grande forme. Il ne donnait plus envie aux enfants et personnell­ement, je dois à la seule volonté d’un professeur, Monsieur Somerville, d’avoir poursuivi ce sport. » Mais comment ça, Gareth ? « Il était fou de rugby. Ce n’était pas qu’un sport pour lui. A ses yeux, c’était une façon, pour le pays de Galles, d’exister dans le monde. Alors, un jour où les Springboks venaient de gagner à l’Arms Park de Cardiff, il m’a empêché de quitter l’entraîneme­nt. Je lui ai dit que j’étais fatigué, que j’en avais fait assez et que j’allais rater le bus. Il m’a répondu : « Le renouveau du rugby gallois commence aujourd’hui, avec toi.Tu vas faire des séries de sprint et je te ramènerai ».

Au retour, je me revois pleurer dans sa voiture. Mais il m’a endurci... » Des larmes de Gareth Edwards naîtraient bientôt l’une des plus belles génération­s jamais engendrée par notre sport et, au talent du numéro 9 de Cardiff, vinrent aussitôt se greffer les rouflaquet­tes de JPR Williams, les courses chaloupées de Phil Bennett et le flair de Barry John, autant de légendes emportées ad patres, au fil de ces deux dernières années. Des hommes qui ne partirent de rien et à qui appartient encore pourtant la paternité du plus bel essai de tous les temps, aplati en 1973 sous le maillot des Barbarians Britanniqu­es, face aux All Blacks de Ian Kirkpatric­k. Un chef d’oeuvre que l’ami Gareth nous contait ainsi : « Ce jour-là, l’ailier néo-zélandais Bryan Williams tape un long coup de pied. Phil (Bennett) récupère, fait demi tour et contourne trois défenseurs. Après trois passes, le ballon arrive dans mes mains. Je ne m’y attendais pas ! J’étais persuadé que Phil jouerait au pied ! En une seconde, j’ai du revoir mon plan de bataille et j’ai accéléré comme un possédé. Jusqu’à l’en-but adverse... J’ai récemment revu les images. Je ne sais toujours pas comment nous sommes parvenus à réaliser un truc pareil. Cet essai a marqué les gens. Un jour, j’ai même rencontré un jeune homme de Singapour. Il s’appelait Mike Huang. Il était né au début des années 70 et ne connaissai­t rien du rugby, avant de tomber sur cette vidéo. Vingt-cinq ans plus tard, son fils s’appelle Gareth et il ne manque jamais un match du pays de Galles. » C’est beau comme un Land of My Fathers, monseigneu­r…

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