TRAJECTOIRE
La démocratisation du matériel électrique et surtout les progrès stupéfiants faits avec les accus LiPos et les brushless donnent maintenant toute possibilité pour motoriser un grand planeur. Pour le poids du lest et des deux gros accus de réception, on peut motoriser un planeur avec une augmentation de poids nulle ou négligeable. Mais comment mettre en l’air le bel oiseau?
Être autonome avec un grand planeur, c’est le passeport pour le paradis des planeuristes ! Encore faut-il décoller… À la pente, on peut se faire aider et il y a du vent pour assurer une portance immédiate. Mais rares sont ceux à pouvoir disposer à l’année d’une belle pente accueillante pour grande plume. On vole donc le plus souvent en plaine, et c’est bien là que réside l’intérêt d’une grande envergure.
Lancer à la main tout seul n’est pas si aisé, voire dangereux pour le modèle. Demander à un aide ? Il faut déjà en avoir un qui soit suffisamment vaillant et qui ne vous lâche pas le planeur en vrac (j’ai cassé un 5 m comme cela). La solution idéale, c’est le chariot de décollage… quand il est bien pensé. Voici plus de vingt ans que j’utilise un chariot pour décoller mes grandes plumes électriques. Toujours de conception perso, je n’ai jamais eu aucun problème, ni de trajectoire ni de fiabilité. Et voici que, pour des raisons d’encombrement lors de mon déménagement, j’achète un chariot en kit, avec le résultat suivant : premier décollage = premier crash ! Voici donc les erreurs à éviter si vous en achetez un ou, mieux, si vous vous le faites vous-même.
AUTOPSIE D’UN CRASH
Je comprends mieux les innombrables vidéos de décollages ratés, dignes de bêtisiers, ou la mauvaise réputation de ce type d’aide au décollage. Il vient de m’arriver avec mon 4,50 m la même mésaventure : le planeur refuse de décoller tout en suivant une trajectoire improbable. Résultat des courses, un petit bijou qui finit sa course le nez dans la terre, heureusement molle, après tout de même une tentative désespérée de quitter le sol. Cela aurait pu être grave si la terre n’avait pas été quasi marécageuse aux abords du terrain. Je ne vous dis pas ma colère. D’où la motivation à vous faire part des erreurs de conception de ce chariot, ou d’autres à en juger des vidéos. À quand même plus de 80 euros le bout de bois, on pourrait en attendre le meilleur, non ?
TOUT CE QU’IL NE FAUT PAS FAIRE !
Ainsi, ce chariot est à lui seul un florilège de ce qu’il ne faut pas faire. Pourtant, tous les matériaux sont de superbe qualité. C’est très bien fait, mais pas bien pensé… Pour commencer, l’incidence des ailes est calée par
rapport au sol à zéro degré. Or, pour voler, il faut de l’incidence. C’est comme si, sur un avion, la jambe de train avant était trop courte : ça ne décollera pas. Avec un planeur, on arrive au bout d’un moment, avec l’aide d’une bosse, à lever le nez à force de cabrer, et c’est comme ça que l’on part en décrochage. Ce qui s’est passé dans mon cas. Alors que si l e planeur possède dès l e départ une i ncidence positive, il va prendre sa ligne de vol en soulageant l’appui sur l es bords de fuite, puis décollera tout seul quand il aura sa portance.
Ensuite, un décollage se fait face au vent, en ligne droite, et non pas en faisant un bel arc de cercle qui vous amène vent de travers et hors de l a piste. On peut imaginer plein de méthodes pour diriger plus ou moins efficacement le chariot et le maintenir sur trajectoire. En fait, il y a bien plus simple : l’empêcher de tourner ! En solidarisant l es deux roues sur un même essieu, elles ne peuvent pas tourner à des vitesses différentes, et donc l’ensemble est obligé d’aller tout droit. C’est le principe du blocage de différentiel utilisé sur les véhicules tout-terrain, qu’il ne faut surtout pas oublier de déverrouiller de retour sur routes bitumées, car la voiture refusera tout bonnement de tourner.
Sur mon chariot, avec l es « différentiels » avant et arrière bloqués, il faut vraiment y mettre de la bonne volonté pour changer de trajectoire ! Il m’est ainsi arrivé avec un planeur sous-motorisé de garder l’axe sur toute la longueur de la piste. Bien motorisé et avec de l’incidence, en général, cela décolle en bien moins que 10 mètres et face au vent.
MODIFICATION DU CHARIOT EXISTANT
Les modifications sont très simples à réaliser. Pour l’incidence, il suffit de remonter l’essieu arrière, ce qui va avoir pour effet d’abaisser l’arrière et donc de donner de l’incidence. Au jugé, j’ai remonté l’essieu de 3 cm le long de la jambe, ce qui fait un peu moins sur l’axe vertical mais, au final, cela permet de passer de 0° à 2°d’incidence. C’est vraiment le minimum, j’avais davantage sur mon chariot perso, que j e n’ai plus maintenant. Ici, deux trous de 12 mm à percer plus haut sur la jambe arrière du chariot et c’est gagné.
Le « blocage » de différentiel est presque aussi simple. Il suffit de retirer les axes de roues et de glisser à la place une tige filetée de 6 mm d’environ 45 cm de long. Avec des rondelles freins à dents si possible et des boulons bien serrés, on pourra solidariser chaque roue sur la tige filetée, qui fait dorénavant office d’essieu.
Résultat des courses, ou plutôt de l a course qui n’est plus folle, le planeur conserve le cap donné au départ et décolle tout seul dès sa portance acquise. Quel confort et quelle sécurité !
AUTRES IMPÉRATIFS
Si vous fabriquez votre chariot, il faut veiller à ce que le bord d’attaque des ailes soit au moins 10 cm derrière l’axe des roues avant, ceci afin d’éviter que le planeur ne bascule sur le nez. À ce sujet, il faut veiller aussi à la garde au sol de l’hélice : la hauteur de votre chariot doit en tenir compte, pour lui conserver minimum 5-6 cm (plus si possible) au-dessus du sol. Prévoyez plutôt large sur ce chapitre car, avec certains nez très longs, des fuselages un peu bananés et des grandes hélices, j’ai eu des surprises. Pas sur ce chariot, où la 23x12 de mon Chilli paraît presque petite tant il est d’une taille XXL (donné pour 14 kg) !
• Les roues : les petites roues utilisées en modèles réduits conviennent mal à un chariot. Elles sont plus sensibles à la moindre aspérité et peuvent donc plus facilement faire dévier la trajectoire de l’ensemble. Des roues de 10 cm de diamètre sont un minimum. Plus elles seront grandes, plus on pourra rouler dans l’herbe facilement, ou bien sur des sols irréguliers. On cherchera dans les
rayons bricolage, ou on essaiera d’en récupérer de-ci de-là, le Graal étant de toutes petites roues de vélo d’enfant.
• Encombrement : celui que j’ai acheté, donné pour des planeurs allant jusqu’à 14 kg, est vraiment énorme, en revanche, il est stable. L’idéal serait de le rendre démontable. Ayant un monospace, j e n’en éprouve pas le besoin pour aller au terrain mais, même à stocker, c’est vrai que c’est contraignant. En ne perdant pas de vue que les roues doivent être solidaires sur un même essieu, on pourrait imaginer que cet essieu serve en même temps de raidisseur en restant démontable. Pas forcément facile à réaliser pour que l’ ensemble reste rigide et facile à démonter, mais si un lecteur l’a tenté ( et réussi !), on pourra en faire profiter la communauté.
• La motorisation : c’est le gros argument du chariot par rapport au système FES, où le planeur décolle depuis son propre train. Ce dernier cas oblige à utiliser une hélice plus petite, d’où un impact très significatif et négatif sur le rendement, et donc l’autonomie. Alors qu’avec un chariot, on a certes l’inconvénient de l’encombrement dans la voiture, mais on peut utiliser de très grandes hélices qui décuplent la traction et vous font décoller en 5 mètres (mon record étant de 2 mètres sur herbe, avec un Cristal 5 m MCM) avec une autonomie facilement doublée pour moins de watts consommés. Comment optimiser sa propulsion, faire le bon choix, ce sera le sujet du moins prochain !
AUTRES ACCESSOIRES INDISPENSABLES
Le trépied Plus un modèle est grand et lourd, plus le trépied est nécessaire. Il est vraiment pratique de pouvoir monter son modèle à hauteur d’homme plutôt qu’au niveau du sol. Quand on y a goûté, on se demande comment on faisait avant (avant, nous étions plus jeunes !). Moins de fatigue, moins de stress, l’essayer c’est l’adopter. À tel point qu’il ne quitte plus la voiture car, pour tous
modèles, je ne saurais plus m’en passer. Toujours est-il que cet accessoire devenu indispensable, mérite lui aussi d’être choisi avec soin, car certaines déceptions sont, là aussi, à craindre.
On peut s’en faire un soi-même, mais on peut en trouver dans le commerce. Le mien vient des accessoires de chez Paritech, mais on en trouve aussi chez Lindinger (et autres). Un trépied pas ou mal adapté vous sera quasi inutile. En effet, pour nous, planeuristes, il faut que le fuselage soit maintenu entre deux fourches avec une forme en U ou en Y. Il faut empêcher le modèle de tourner sur luimême et de tomber, mais faut-il encore que l’on puisse y installer les ailes ! C’est utile aussi… C’est ainsi que le modèle Lindinger vient avec des sangles à la place des fourches de mon trépied préféré. Le hic, c’est qu’à l’usage ce n’est absolument pas pratique. En effet, le fuselage est non seulement mal tenu longitudinalement, mais en plus il est difficile de placer les ailes car les montants supérieurs du trépied gênent l’opération. Les ailes en place, le modèle est en appui sur ces intrados et force sur les volets. Bref, c’est le mauvais plan pour les planeurs. Il faut des fourches, quitte à se les fabriquer soit même en s’inspirant des photos du Paritech, car le trépied de base est un modèle du commerce pour claviers (musique). Ceci étant, je vous engage quand même à faire un tour par la page des accessoires de Paritech, qui regorge d’accessoires originaux et très utiles, pour un coût de transport modeste.
Roulette de taxiage
Acheté en même temps que le trépied, elle devient nécessaire dès que le planeur dépasse un certain
poids. La roulette de taxiway se fixe sur une aile avec un cerclage et un velcro. Elle permet de faire rouler le planeur sur son train, et cette roulette donc, sans qu’un saumon ne racle le sol ou ne se coince sur un quelconque obstacle. On utilise une « laisse », en fait une corde placée dans le crochet de remorquage, ce qui permet de tirer le planeur en toute sécurité. Sans ces accessoires, vous devrez porter l’engin sur une distance parfois importante, et ce à chaque vol. Il faut aussi prendre l’habitude d’avoir la roulette et la « laisse » toujours à portée de main pour aller chercher le planeur et le dégager au plus vite afin de ne pas gêner les autres qui atterrissent aussi…
Crochet de remorquage
S’il est un élément parfois trop négligé, c’est bien le crochet de largage, qui se devrait pourtant d’être infaillible. Comme toujours, le plus simple est le plus fiable, voici ceux que l’on utilise couramment. Le système de « doigt » pivotant dans un tube est l’idéal quand la place dans le nez du planeur n’est pas prise par un moteur. Le gros avantage, c’est que plus la traction est importante, moins l’effort est important pour le servo. En revanche, on perd de la place pour positionner le plomb de centrage. C’est pour cela que l’on utilise un procédé bien plus simple, constitué d’une cabre de frein de vélo circulant dans une gaine. À l’extrémité du câble, étamé et meulé pour supprimer toute aspérité, se trouve une fente verticale par où on engage la boucle du câble allant au remorqueur: c’est le système que j’utilise sur tous mes planeurs. C’est discret, facile à réaliser et efficace. Pour autant, comme tous les systèmes, il est nécessaire de le tester. Pour vérifier que le planeur se largue bien en cas d’urgence, il faut suspendre le planeur au plafond par un gros fil nylon, de façon à ce qu’il pèse de tout son poids. Un aide va actionner la commande pendant que vous retenez le planeur. Il faut que le largage se fasse sans coup férir. Si ça force, que ça hésite, il faut reprendre et voir où ça coince. Pour donner toute sa force au servo, il est important d’utiliser le palonnier le plus court possible, mais aussi de placer ce dernier pour qu’il soit dans le sens de la marche au repos. Le but est que le servo puisse prendre de la vitesse avant de véritablement donner l’effort demandé.
Le dernier système est réservé aux planeurs plus petits car, si la traction sur le câble est trop grande, le largage aura du mal à se faire. Il s’agit d’une came coulissant dans un tube, lui-même barré en sortie par un axe. La boucle est verrouillée par la came qui s’appuie sur l’axe ( voir photo).
EN CONCLUSION
Quand il est bien conçu, un chariot est le moyen le plus sûr de faire décoller un grand planeur. À partir d’un certain poids, il est vraiment confortable et sécurisant de poser son planeur sur le chariot et de décoller en toute simplicité. Le modèle ne décolle que lorsqu’il a atteint sa portance naturelle et ne risque donc pas de décrocher. Quand on y a goûté (avec un modèle bien pensé), on ne peut plus s’en passer. Il vous servira des années durant sans faillir. Comme le trépied, devenu également indispensable.
Le mois prochain, nous dénouerons le vrai du faux afin de bien choisir sa motorisation. D’ici là, bons vols à tous !