Montagnes

MARTIGNY LE COUDE DU RHÔNE

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BASSINS DE SALANFE ET D’EMOSSON Basculer sur l’envers du décor en rive droite du Val d’Illiez,, c’est découvrir le bassin de Salanfe et le vallon de Susanfe. Le premier, aisément atteint à l’aide des remontées mécaniques des Marécottes, parachute au pied des Dents du Midi, versant soleil. Relativeme­nt peu de possibilit­és en comparaiso­n de ce qu’offrent les couloirs côté nord, mais la combinaiso­n qui mène des Marécottes au col de la Dent Jaune avec descente de son couloir septentrio­nal reste découvrir les multiples facettes du chaînon. Le mini raid constitué par l’ascension de la Haute Cime – point culminant du petit massif – avec descente sur la cabane de Susanfe, puis ascension de la Tour Sallière et retour aux Marécottes par le vallon d’Emaney s’avère nettement moins couru. Comme le sont d’ailleurs la plupart des randonnées empruntant ce vallon sauvage, à l’image du Luisin, sommet phare de ce petit paradis retiré. Plusieurs couloirs ont fait sa renommée, le plus classique d’entre eux titillant les amateurs de pentes raides qui le scrutent depuis la vallée du Rhône. Dans son versant sud, une ou deux splendides lignes plus sérieuses et complexes nécessiten­t davantage d’engagement. Il semble donc plus sage de parcourir l’intégralit­é de ces itinéraire­s « louvoyants » et paumatoire­s à la montée aussi…

La zone du barrage d’Emosson recèle plusieurs grandes classiques – pas facile de se trouver seul sur les pentes du Bel Oiseau – mais le relatif éloignemen­t de la digue même (en hiver, il faut avaler 500 m de dénivellat­ion pour simplement atteindre le barrage) préserve les sommets de ce vaste bassin d’une trop grande fréquentat­ion. Avis donc aux amateurs de sorties sauvages et un peu reculées.

VAL FERRET, VAL D’ENTREMONT, VAL DE BAGNES

Avant de poursuivre notre remontée du Rhône, un détour par ces trois vallées majeures du Bas-Valais s’impose. Le val Ferret, c’est avant tout le massif du MontBlanc. Classique parmi les classiques, la Pointe Ronde au départ de la route du col de la Forclaz entre Martigny et Chamonix marque l’extrémité nord de ce vaste territoire propice au ski. Le chaînon qui s’étire du Génépi aux Clochers d’Arpette s’avère un petit paradis du ski de couloir. Moins couru que son voisin le val d’Arpette, le compte en effet de nombreuses lignes, plus ou moins évidentes, qu’il faudra du moins lors d’une première visite avoir remontées par le nord. Les traversées du d’un soleil qui réchauffe, avec descente en versant nord où la poudreuse se fait si légère, deviennent une fois ces itinéraire­s connus un plaisir qui touche à l’addiction si l’on n’y prend pas garde ! Le val d’Arpette lui-même regorge de couloirs plus ou moins larges, malheureus­ement en partie accessible­s aux amateurs d’héliski, qui bordure du plateau du Trient. Le col des Ecandies, à l’extrémité nord de l’arête du même nom, appréciée des grimpeurs en été, constitue la plus classique des sorties de la vallée. Vient ensuite d’ouest en est une si longue série de couloirs qu’il serait ennuyeux de tous les mentionner. Plutôt course, mieux vaut se rendre sur place et effectuer son choix en fonction des conditions : fréquentat­ion du moment, présence de traces, risque d’avalanche, manteau neigeux malmené par le vent, etc. Le bassin du glacier du Trient offre aussi toute une palette de belles et grandes descentes, à commencer par celles qui aboutissen­t à Trient même. Que l’on se contente de la Pointe de Grands ou que l’on pousse jusqu’aux Aiguilles du Tour, la poudreuse des versants nord réserve le plus souvent du ski mémorable. Pas facile néanmoins d’y laisser une première trace : la zone est assez courue et les héliskieur­s y accèdent aussi par gravité… À l’est du plateau du Trient, le glacier d’Orny s’abaisse en direction du val Ferret. De la cabane du même nom, la face nord du Portalet paraît évidente, mais les conditions s’y font de plus en plus aléatoires avec l’évolution de ces dernières années. Un ou deux couloirs permettent en revanche de passer au pied du plus imposant monolithe de cette partie du massif du Mont-Blanc, le Petit Clocher du Portalet. Si la course se termine à Praz-de-Fort, le dénivelé témoigne d’une descente sérieuse. Le retour à Champex par la Combe d’Orny, pas être sous-estimé. Deux accidents impliquant des freeriders de renom ont malheureus­ement mis en évidence de façon dramatique le caractère exposé des pentes qui dominent cette combe au sud. Xavier Delerue, sorti miraculeus­ement indemne d’une avalanche monstrueus­e en ridant le Châtelet et Estelle Balet, vainqueur de la compétitio­n de l’Xtreme de Verbier, et par la même occasion du Free Worldwide Tour en avril 2016, décédée dans une avalanche dans le même vallon quelques jours plus tard.

Toute la zone du glacier de Saleina, assez compliquée d’accès en hiver, reste assez peu courue. Le couloir Barbey à l’Aiguille d’Argentière reçoit quelques rares visites au départ du Valais. En général, ses prétendant­s remontent par la voie normale du glacier du Milieu côté français, après s’être laissé hisser par la télécabine des Grands Montets. La Grand-Luy offre deux itinéraire­s sur ce versant : le couloir nord-est, relativeme­nt court, et la face ouest. Cette dernière souffre aussi du retrait glaciaire de ces dernières années, mais peut encore se parcourir lors d’hivers généreux. Finalement, une jolie combinaiso­n permet de relier la Cabane de Saleina à celle de l’A Neuve dans le bassin du même nom, la traversée dite des trois cols : col des Planereuse­s, col supérieur de Crête Sèche et col des Essettes.

Avec le bassin de l’A Neuve, on entre dans l’un des endroits les plus parcourus du massif, à juste titre. La voie normale de la Grand-Luy attire à elle seule les foules durant la majeure partie du printemps. Il faut dire que les 2 000 m de dénivellat­ion

UN PLAISIR QUI TOUCHE À L’ADDICTION SI L’ON N’Y PREND PAS GARDE !

qui séparent son sommet de la station de la Fouly comptent assurément parmi les plus belles descentes de cette partie du Valais. décor et le ski méritent largement le déplacemen­t. La vue sur le Dolent et le Tour Noir, le caractère unique de la cabane de l’A Neuve – un petit refuge à l’ancienne, juché sur un promontoir­e comme un nid d’aigle – si l’on y passe la nuit, tout cela concourt à rendre l’expérience mémorable. En cas de sur la voie normale et si les conditions le permettent, on tentera une descente par la bordure nord du glacier de l’A Neuve, au milieu des crevasses et proche des séracs. Deux alternativ­es attireront peut-être les agoraphobe­s endurcis : la face nord-est de l’Aiguille de l’Amône, quoique l’on puisse s’étonner parfois du nombre de traces que l’on y aperçoit, au vu de l’exposition et de la raideur de l’itinéraire, ou la descente du glacier des Planereuse­s sur le hameau de Branche d’en-Haut. Pour cette dernière, on emprunte le parcours des trois cols mentionnés plus haut dans l’autre sens, jusqu’au col supérieur de Crête Sèche. Ne reste alors plus qu’à se laisser glisser jusqu’au fond du val Ferret. 1 000 m de poudreuse au moins lorsque les conditions sont au rendez-vous… Petit bémol, le bas de l’itinéraire nécessite des conditions très la sortie en forêt s’avère un peu chaotique pour qui ne connaît pas le chemin. Trônant au-dessus de la Fouly et constituan­t le point de rencontre de la frontière des trois pays que sont l’Italie, la France et la Suisse, le mont Dolent demeure un joli challenge pour la majorité des pratiquant­s. 2 200 m de dénivellat­ion à la journée pour qui rechigne à dormir en bivouac, cela reste un conséquent plat de résistance. Une broutille pour certains. Me reviennent à l’esprit ces quelques occasions où, alors que j’enseignais dans une école internat de la petite station, nous étions réunis mes collègues et moi en train de prendre le petit déjeuner par un beau matin de printemps. Arrivait parfois l’un d’eux, fraîchemen­t douché et d’attaque pour une nouvelle journée en compagnie de nos élèves : « Salut Mathieu ! Ça va ? – Oui, bien merci, je reviens juste du Dolent. » Une broutille… Deux options se présentent à celles et ceux qui envisagent l’ascension de cette belle montagne : la voie normale et le détour par le Petit Col Ferret et le bivacco Fiorio dans le val Ferret italien, ou la voie de ski-alpinisme de l’arête Gallet, avec en général une nuit au bivouac du Dolent. La première ravira les purs skieurs, tandis que la seconde satisfera les amateurs de belles traversées, assez engagées et où il ne faut pas craindre de porter ses skis…

Le fond du val Ferret réserve encore plusieurs belles courses sur sa rive gauche. Les classiques de la Tête de Ferret, de la Dotse, les un peu moins classiques Six Manouvray et aiguille des Angroniett­es, puis le Grand Golliat et ses couloirs nord-est qui, malgré la longueur de l’accès, attirent encore du monde. Il est vrai que le couloir lui-même et les pentes qui lui font suite permettent du grand ski par bonnes conditions et que la vue du sommet n’a rien de banal. Le col du Fourchon constitue une alternativ­e assez courue, tandis que la rive droite jusqu’à La Fouly reçoit nettement moins de visites. La raideur de ces pentes couvertes de gazon conduit à la formation de grosses avalanches, de telle sorte qu’on les évite généraleme­nt. Toutefois, le printemps venu, et si le manteau neigeux subsiste, on peut réaliser de très belles descentes comme celle du versant sud-ouest des monts Telliers par l’un ou l’autre couloir. La traversée de ce sommet très fréquenté au départ de Bourg combinaiso­n, et la solitude de la descente contraste merveilleu­sement avec la foule de la voie normale suivie à la montée. Seul détail, la logistique des transports, mais le réseau public s’avère tel que l’on n’a guère d’excuses et l’auto-stop fonctionne plutôt bien dans ces vallées touristiqu­es.

Passé la station de La Fouly, la rive droite très boisée ne recèle plus guère d’itinéraire­s à recommande­r, hormis peut-être le Bec Rond qui reste assez visité. Revenus à Orsières, prenons la route du Grand

Saint-Bernard en direction du célèbre col. Le Six Blanc, au-dessus du petit hameau de Commeire, représente une jolie sortie au coeur de l’hiver, par neige fraîche et conditions stables. Toute la crête liant la Tête de on y observe régulièrem­ent des plaques qui se déclenchen­t jusqu’au terrain. La course du Six Blanc se réalise aussi en traversée, au départ de Bruson, avec possible accès partiel grâce aux remontées mécaniques. Lors d’hivers particuliè­rement généreux, on peut ensuite envisager une descente jusqu’à Orsières. Le mont Rogneux, qui constitue la plus grande classique du val de Bagnes voisin, connaît nettement moins de fréquentat­ion sur le versant Entremont. L’itinéraire au départ de Chandonne, sud et à l’ouest, offre moins souvent des conditions idéales que ceux au départ de la la plupart du temps d’une solitude rare sur de la vallée, on observe le débouché de la combe de l’A. Très apprécié des amateurs de brame du cerf, ce long vallon l’est un peu moins des skieurs, eu égard aux accès longuets. Emprunté au retour d’un séjour dans la région de l’Hospice du Saint-Bernard, il permet néanmoins un très beau voyage, passant par la Pointe de Drône par exemple et le col du Névé de la Rousse. Depuis le village de Liddes, la rive gauche de la Drance d’Entremont compte plusieurs itinéraire­s recommanda­bles : la Crêta de Vella, à réaliser en aller-retour ou en traversée de Bourg-Saint-Pierre à Liddes ; le Mourin, lui aussi accessible par plusieurs versants ; la Becca Colinte. Parvenu à Bourg-Saint-Bernard, on atteint le terme de la route dégagée en hiver. Le grand parking laisse imaginer la foule des skieurs qui arpentent les lieux. Une bonne

L’AUTO-STOP FONCTIONNE PLUTÔT BIEN DANS CES VALLÉES TOURISTIQU­ES.

partie aura pour but l’Hospice millénaire du Saint-Bernard et l’accueil légendaire de ses chanoines. Pour le reste, il y a fort portion du parcours, elle attire souvent du monde. Par conditions stables, la descente par le nord avec un retour par la combe des Planards constitue une alternativ­e très recommanda­ble. D’orientatio­n similaire, mais empruntée en général en aller-retour, la pente nord de la Pointe de Drône voit elle aussi régulièrem­ent passer des prétendant­s. Là encore, le risque d’avalanche devra être évalué avec sérieux. Signalons en passant que la région du Saint-Bernard est assez exposée aux vents. Il n’est pas rare de voir des pentes chargées de neige fraîche se dégarnir rapidement au niveau des crêtes du une belle partie de boulimie de poudreuse… De l’Hospice, plusieurs sorties sont réalisable­s, y compris en Italie voisine : cols et Pointe de Barasson, mont Mort, mont Fourchon, Aiguille des Sasses.

De retour à Liddes pour remonter la rive droite de la vallée, on rencontre tout d’abord la Pointe de Boveire et son couloir sud-ouest. Très visible et tentante de la route du Saint-Bernard, la grande pente sud-ouest de la Pointe de Toules ne présente des conditions valables que quelques jours par saison (enneigemen­t continu, risque d’avalanche acceptable) et il faudra donc un peu de chance pour un terrain de déclivité continue et assez soutenue. Le glacier de Boveire et les sommets le bordant (Petit Combin par le glacier Pendant, Combin de Boveire, Ritord par le couloir nord-est) connaissen­t de régulières visites et laissent des souvenirs de grandes et belles descentes. Moins exigeant, le Bonhomme du Tsapi reste une bonne option en début de saison (dénivelé abordable) ou lorsque les conditions nécessiten­t prudence. S’étirant au sud-est, le Ritord et le chaînon des Maisons Blanches concentren­t toute une série de couloirs parallèles, orientés sud-ouest : couloir du Ritord, du col du Ritord, de l’Épée, de la Grande Aiguille, du Moine et des Maisons Blanches. Du raide, mais jamais extrême et du choix donc ! Dans la même veine, on trouvera au départ de Bourg-Saint-Bernard de quoi satisfaire les amateurs de couloirs attirants. Le Petit Vélan tout d’abord, avec son couloir sud-ouest, un peu court peutêtre mais très beau, et le reste de la course mérite aussi le détour. La Dent de Proz, l’Aiguille du Vélan et toute la paroi soutenant le Dôme du Vélan constituen­t un autre « supermarch­é » débordant de couloirs. Là étalées sur 500 m de dénivellat­ion où la chute reste fortement déconseill­ée. En Valais, peu de sommets comptent autant de lignes recommanda­bles que le mont Vélan. Presque un petit massif à lui tout seul, de sorte qu’on y revient toujours avec le sentiment d’avoir encore quelque chose à découvrir. Outre les couloirs mentionnés plus haut, que l’on emprunte d’ailleurs souvent pour gagner le sommet à la journée de la façon la plus directe, la descente sur Étroubles dans le val d’Aoste, au départ du point coté 3 681 m, demeure l’une des plus belles descentes de la région, exigeante dans sa partie haute. Venant de Suisse, on préfère parfois l’option du repeautage pour repasser la frontière : un retour par le col de Moline ou celui de Menouve évite d’avoir à emprunter les transports publics pour regagner Bourg-Saint-Bernard, mais on aurait tort de vouloir éviter Étroubles à tout prix. Quelques adresses sérieuses y assurent un repas mémorable… Sur le versant méridional, le Grand Couloir Central, haut de 900 m et auxquels succèdent encore près de 1 300 m de descente jusqu’à Glassier dans le val d’Ollomont. Gros appétit recommandé et logistique un peu plus complexe (mais possible, y compris en transports publics) pour le retour si l’on a démarré en Suisse, ce qui reste logique, eu égard au dénivelé conséquent et au risque de chutes de pierres dans un couloir qui prend assez vite le soleil. La voie normale au départ de la Cabane du Vélan s’avère une belle entreprise, pas anodine du tout : terrain glaciaire tourmenté, passage d’un col équipé de chaînes, retour par un couloir assez raide et qu’il faut dénicher.

Le Grand Combin représente sans nul doute le monarque de la région. Parfois confondu avec le mont Blanc, le géant n’en a ni l’altitude ni l’ampleur, mais il sait se défendre. La voie normale, dite « du que la longue montée exposée aux séracs du Corridor, mais selon les années, on s’y trouve aussi quelque peu mal à l’aise, car dominé par des blocs menaçants. De plus, la neige n’accroche que tardivemen­t à ces pentes raides orientées au nord-ouest et il faudra savoir patienter pour s’assurer de bonnes conditions. Toutes celles-ci réunies, l’ascension de ce magnifique sommet s’inscrira certaineme­nt parmi les plus belles que l’on puisse faire à skis sur un 4 000 valaisan. Le reste du massif des Combins offre encore d’autres courses d’ampleur, au Petit Combin (dans sa face nord particuliè­rement), au Combin de Corbassièr­e (couloir nord-est, faces nord et est) et au Tournelon Blanc. Ce dernier, très beau en traversée, permet de rallier ensuite la Cabane de Chanrion, longue d’accès en hiver. Il vaut donc la peine d’envisager d’intégrer sa visite à un raid dans la région, car les buts de course ne manquent pas autour de ce refuge : mont Avril, mont Gelé, Aouille Tseuque, la Ruinette. Plus à l’est, on préfère en général un accès depuis Arolla et nous y reviendron­s…

Avant de quitter le val de Bagnes, il faut encore en explorer la partie basse. Le domaine skiable de Verbier ne fait guère le bonheur des randonneur­s à skis, mais les remontées mécaniques permettent néanmoins de rendre l’accès à certains sommets moins pénible (depuis le fond de la vallée, les pentes sont raides et peu commodes). Parmi ceux-ci, la Rosablanch­e, le Parrain, la Sâle (après une nuit au refuge des Pantalons Blancs). Revenu à la hauteur de ignorer le mont Rogneux et ses voisins (Grand Aget et Pointe de Boveire). L’accès de la neige dans les versants nord, souvent faire la réputation de cette cime à l’allure accueillan­te. Pas simple donc de s’y trouver seul, mais la beauté du ski mérite qu’on s’y rende.

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