DE L’AUDACE !

Quand on demande à Silvia Vidal, grimpeuse au long cours récompensée d’une mention spéciale cette année aux Piolets d’or, si on naît aventurier ou si on le devient, la réponse est limpide : « Nous naissons aventuriers. Naître, c’est une aventure en soi. C’est plus tard que nous décidons si nous voulons continuer à être des aventuriers. »« Quand je serai grand, je serai aventurier. » Qui ne se souvient pas un jour avoir prononcé cette phrase ? Qui est, depuis, resté fidèle à cette promesse ?

Il faut se pencher un peu sur le palmarès des Piolets d’or pour se rendre compte que certains réussissent mieux que d’autres à garder leur âme d’enfant. Un type comme Mick Fowler, 65 ans au compteur, n’a jamais été vacciné de ses tribulations himalayennes, et il est toujours là pour nous les raconter. Car « un bon alpiniste est un vieil alpiniste », selon le bon mot d’Heckmair. C’est d’ailleurs ce que vient récompenser le Piolet d’or Carrière, réservé à ceux qui ont su rester en vie. Et c’est tout l’équilibre que doivent trouver les alpinistes de pointe, entre audace et longévité.

La ligne de crête est ténue, d’autant que l’esprit d’aventure est de plus en plus contraint à mesure que la connaissance du monde qui nous entoure se développe. Faut-il se couper volontairement des moyens de communication à notre disposition ? S’engager dans une face dont on ne sait rien, ou dont on ne connaît pas les conditions ? À ce titre, les lauréats 2021 rendent chacun compte de leur vision de l’aventure.

Mais l’exploration ne se résume pas à la découverte de blancs sur la carte, et c’est tout l’enjeu de l’alpinisme contemporain que de savoir réinventer la pratique de haut niveau autrement que par une première ascension ou l’ouverture d’un itinéraire sur des sommets du bout du monde. Reste à ce que les Piolets d’or reconnaissent à leur tour cet élan de créativité.