VRAIMENT PRÉSERVÉE
UNE VALLÉE OÙ LA NATURE RESTE
À l’occasion d’une sortie en montagne, je tombe sur un autocollant placardé sur l’arrière d’une voiture avec la mention « Ubaye Spirit ». J’ai parcouru cette vallée à de nombreuses reprises, notamment lors de l’année où j’habitais à Digne-lesBains. C’était la « haute » montagne la plus à portée de mes spatules et de mes chaussons d’escalade. Durant ces jeunes années, souvent en journée « one shot », je n’avais rien perçu d’autre qu’un réservoir d’itinéraires. Je n’étais qu’un simple consommateur boulimique qui empilait les sorties et les souvenirs. Avec l’âge, avec l’expérience, avec un autre regard, je me suis peu à peu intéressé à l’essence même de ces vallées et de ces montagnes qui nous accueillent. Parmi tant d’autres lieux, j’ai donc essayé de comprendre ce qu’est l’esprit de l’Ubaye.
Hormis les trente-huit tonnes italiens ayant en ligne de mire le col de Larche, on passe rarement ici. On y vient. On vient en vacances l’été à Barcelonnette ou à Jausiers. On vient grimper à la Pierre André ou au chapeau de Gendarme. On vient chausser les peaux à Maljasset ou à Fouillouse. On vient voir les marmottes du Lauzanier ou les bouquetins de Saint-Ours. N’y cherchez pas l’ours ; il y a disparu vers le milieu du XIXe siècle. En revanche, il faut lever les yeux pour tenter d’observer le gypaète barbu ou le vautour fauve. Le premier est de retour en tant que nicheur et s’est établi quelque part du côté de Fouillouse. Le second passe en escadrilles durant la belle saison en cherchant attentivement les carcasses d’animaux.
Ici, c’est donc un peu comme le Queyras. L’Ubaye est une vallée où l’on vient et non une vallée où l’on passe. L’Ubaye commence dès la retenue de Serre-Ponçon. On a tendance immédiatement à penser aux hauts sommets du Chambeyron ou à la station de Pra-Loup mais l’Ubaye commence bien en aval. Le vallon du Laverq, l’envers de la Blanche ou encore les adrets du Parpaillon sont des montagnes qui méritent beaucoup plus qu’un simple regard depuis la route. Et tant mieux pour les locaux qui trouvent encore une grande tranquillité en allant se promener dans ces lieux injustement boudés. En même temps, cette tranquillité reste tout de même généralisée en dehors de la période de vacances. Avec nettement moins de 10 000 habitants, la vallée de l’Ubaye n’a pas le potentiel de résidents des vallées des Alpes du nord ou même du Briançonnais et du Gapençais. C’est une vallée où la nature reste vraiment préservée. C’est ce qui frappe ici lorsqu’on vient hors saison comme nous l’avons observé en réalisant les derniers repérages pour notre magazine préféré. L’esprit de l’Ubaye, ce sont aussi ses hameaux, faits de murs en pierres et de toits en lauzes. Petit à petit, les hommes reprennent en main ce patrimoine. De