Le changement, c’est maintenant !
L’horlogerie suisse voit ses prix s’envoler. Le segment de 150 à 1 500 euros est progressivement délaissé. « Pasassezcher,monfils! », se souviendront les anciens. Mais la nature a horreur du vide. Et de nombreuses marques s’engouffrent dans la brèche, qui
L’horlogerie suisse est cruelle : les marques établies peuvent se contenter de rééditer à l’envi des modèles du siècle dernier, sans rien en changer ou presque. À l’inverse, toute jeune pousse doit apporter quelque chose de radicalement nouveau, sous peine d’être inaudible. Quoi ? Tout dépend du produit… et des moyens. Pendant longtemps, ces moyens ont été associés à un nom quasi magique : Kickstarter. L’exemple type est Code 41 : un demi-million d’euros levés en quelques jours, avec pour objectif de démonter les deux principales mamelles de l’horlogerie suisse, ses marges et son culte du Swiss Made. Code 41 pose que l’on peut faire aussi bien en se passant du précieux label, et avec une marge divisée par trois grâce à la vente en direct. La marque construit ses modèles avec ses communautés. Au l de “chapitres”, celles-ci indiquent la direction à prendre pour aboutir au produit nal. Une recette ef cace qui, par dé nition, évite tout échec commercial, puisque c’est le client qui codessine la montre. Et cela depuis 2016. Casser la distribution pour baisser les coûts, Thomas Baillod l’a aussi compris. Sa marque, BA111OD, veut passer du e-commerce au “we-commerce”, quitter le digital pour passer au phygital. Au-delà des grands mots, un concept simple : l’on devient client par cooptation d’un autre client, qui récupère au passage une marge pour acquérir un prochain modèle. Le client n est donc prescripteur et vendeur pour le client n+1, et ainsi de suite. Plus d’intermédiaire ni de vente en ligne : le coef cient tombe à deux. Dif cile de faire moins... Alors, pour se différencier, certains explorent d’autres pistes. L’empêcheur de tourner en rond n° 1 se nomme Lilian Thibault, fondateur d’awake. L’homme a compris, avec un léger temps d’avance, que la montre écoresponsable serait 100 % recyclée ou ne serait pas. Aujourd’hui, il en fait près de 8 000 par an, avec une devise que ne peut pas se permettre la marque suisse institutionnelle : #FCKPLSTC. Un mantra coup de poing pris en affection par un ambassadeur impromptu, Emmanuel Macron, qui en t la brève - mais remarquée - promotion à l’été 2019.
Mais si la montre disruptive fonctionne bien, il ne faut pas oublier la résurgence du vintage, lame de fond pérenne de l’horlogerie des années 2000. Plusieurs marques ont surfé dessus, comprenant à rebours de la Suisse la pertinence du combo “vintage et pas cher”. Baltic, Furlan Mary et surtout William L. ont tracé un sillon. Derrière cette dernière, Guillaume Laidet, touche-à-tout français millenial bien avisé qui, à présent, pilote le retour de Nivada Grenchen et Vulcain, deux belles endormies… suisses. La boucle est bouclée.