L’usure, un phénomène complexe
Même parfaitement lubrifié, un moteur finit toujours par s’user en raison des frottements qu’il subit durant ses périodes de fonctionnement. Ces frottements sont caractérisés selon trois états successifs, sec, onctueux et fluide. Le premier est court mais redoutable pour la mécanique. Il apparaît dès la mise en route du moteur, après une longue période d’arrêt durant laquelle l’huile est presque entièrement retombée par gravité dans son carter, ne laissant derrière elle qu’un voile très mince. En attendant le réamorçage de la circulation d’huile qui demandera quelques secondes pour être effective, les efforts s’exercent au démarrage sur les minuscules aspérités du métal. Les pièces en mouvement, cames, pignons et pistons, et les fixes, paliers et autres butées, subissent alors des frottements secs, générateurs d’usure par micro-arrachements à la surface des pièces. Cette première phase est suivie d’une période de frottements onctueux, qui apparaissent sous fortes charges, au cours d’un démarrage appuyé ou lors de brusques changements de régime. La charge est alors transférée via un microfilm de lubrifiant, appelé epilamen. De niveau moléculaire, son épaisseur est trop faible pour empêcher tout contact direct entre les surfaces métalliques, qui subissent encore de minuscules arrachements de particules, synonymes d’usure. Bien entendu, le mode onctueux affecte l’ensemble de la mécanique, inverseur et transmissions comprises, à l’exception des pièces fonctionnant dans un bain d’huile permanent. Efficace, ce dernier système affecte hélas le rendement en absorbant une partie non négligeable de l’énergie disponible au vilebrequin. La troisième phase, dite fluide, est celle du fonctionnement nominal. Dans ce cas, les pièces en mouvement sont isolées de tout contact direct à l’aide d’un film de lubrifiant. On parle alors de lubrification hydrodynamique. Le vilebrequin et les bielles sont particulièrement concernés par ce mode de fonctionnement, car il élimine virtuellement tout phénomène d’usure en faisant flotter les pièces sur un palier fluide. Mais, pour qu’il reste théoriquement parfait, il ne faudrait plus changer de régime ni arrêter le moteur ! Le palier hydrodynamique explique pourquoi une succession de démarrages et d’arrêts fréquents est bien plus nuisible à la longévité d’un moteur que de longues périodes de marche, même en charge. Le phénomène est aggravé lorsque le moteur est sollicité à froid, car une température basse freine la circulation de l’huile. Elle se charge alors en eau de condensation et en résidus imbrûlés dus à une combustion incomplète du carburant. Ces dépôts contribuent à dégrader l’huile au fil des heures et à altérer les performances du film lubrifiant, ce qui, en retour, augmente le facteur d’usure du moteur. La seule solution consiste à vidanger l’huile périodiquement et à la remplacer par une même quantité de lubrifiant neuf.